b) sanctuaires et origine des oppida

Si nous insistions précédemment sur le caractère isolé des nouveaux lieux de culte à caractère communautaire, il est important de noter que ceux-ci précèdent d’un siècle les regroupements d’habitats constatés au IIe siècle av. n.è. dans la Gaule du nord. La plupart des sanctuaires sont alors intégrés à ces nouvelles formes d’habitat. Le rôle des sanctuaires dans le processus d’urbanisation a été démontré par des recherches récentes aussi bien dans la Gaule du sud, que dans la Gaule du nord, avec des décalages chronologiques toutefois 348.

Certains sites de la Gaule du nord sont aujourd’hui bien connus. Sur l’oppidum de Manching, un espace sacré recevait des offrandes, entre autres des armes et des pièces de harnachement, dès le Ve siècle349. L’habitat est venu se développer autour du lieu de culte qui va occuper la place centrale de l’oppidum. Toujours en Allemagne sur d’autres oppida (comme au Donnersberg), des enclos, apparemment vides de structures, sont aménagés en des points culminants et constituent la première période d’occupation de l’oppidum 350. Un dernier cas de figure intéressant à rappeler est celui de Gournay-sur-Aronde, où le sanctuaire daté du IIIe siècle est d’abord isolé ; dans le courant de La Tène finale, il est entouré d’un habitat protégé derrière un rempart de type murus gallicus 351.

Dans le sud, D. Garcia a bien montré comment des témoignages cultuels anciens (stèles, guerriers accroupis, dépôts votifs) sont aussi à l’origine du choix d’implantation de certaines agglomérations352. Des dépôts d’offrandes sur des points culminants, comme ceux des plateaux des Cannebières à Correns (Var) ou de la Cloche aux Pennes-Mirebeau (Bouche-du-Rhône), sont antérieurs à l’installation de l’habitat sédentaire. A Roquepertuse, une stèle, témoin d’un lieu de culte antérieur, est remployée dans le parement du rempart daté du passage du IVe au IIIe siècle av. n.è.353.

Au terme de cette présentation des lieux de culte et de l’habitat groupé, il apparaît que la période laténienne n’a pas connu la pratique d’implanter des sanctuaires à proximité des habitats agglomérés, telle que nous la retrouverons à la période suivante. Les lieux de culte apparaissant au début de La Tène moyenne ont un caractère communautaire fort. Ils jouent un rôle fédérateur important, vraisemblablement au niveau du pagus. Pour beaucoup, ils sont à l’origine du choix d’installation d’un habitat groupé, même si d’autres facteurs, notamment économiques, ont pu aussi être des éléments déterminants dans ce choix. Les nouveaux habitats agglomérés que sont les oppida ont des fonctions qui ne doivent pas les apparenter aux urbes du monde gallo-romain : les notions de pomerium et de capitale leur sont étrangères. Dans les oppida, l’habitat se développe autour du lieu de culte, auquel peuvent être associées des activités politiques, comme on le voit nettement à Acy-Romance.

Au vu de ces considérations et pour répondre à la première des questions que nous posions en préambule à ce chapitre, nous devons conclure que la notion de sanctuaire périurbain est parfaitement étrangère à l’époque de l’Indépendance.

Notes
348.

Pour la Gaule du nord : Fichtl S. et al., 2000, p. 179-186. Pour le sud : Garcia D., 2003 et 2006.

349.

Sievers S., 1991, p. 149.

350.

Fichtl S. et al., 2000, p. 181.

351.

Brunaux J.-L. et al ., 1985, p. 24-51. 

352.

Supra note 348.

353.

Boissinot P. et al., 2000, p. 255.