Description des vestiges

Le texte de la Vita Martialis décrit la destruction par le Saint d’un temple païen où étaient vénérées les idoles de Jupiter, Mercure, Diane et Vénus, pour y consacrer une église à Saint-Etienne2032. Une seconde mention d’un temple à Jupiter seul figure dans le VIIIe sermon sur la translation des reliques de Saint-Martial (XIe siècle)2033 : ‘In urbe Lemovica de temple Jovis factum est templum Redemptoris’. Une autre source de la même époque (Les Sermons synodaux de Limoges d’Adémar) rapporte que le temple n’aurait pas été détruit, mais qu’on en aurait fait une église, afin que les travaux ne retardent pas l’installation du nouveau culte chrétien2034.

Les Vies de Saints font couramment des récits de conversion de lieux de culte qui font partie des poncifs du genre et la date tardive du récit doit inciter à la prudence2035. Cependant, l’archéologie atteste bien une occupation du lieu à l’époque antique. Sur le site même de la cathédrale, J. Arbellot rapporte qu’au niveau des chapelles ont été trouvés une base de colonne, des fragments de marbre et ‘une aire en ciment mêlée de tuileau et de cailloux brisés’, vraisemblablement un sol2036. Dans le transept, il signale des structures apparemment antiques et une colonne de marbre, haute de 2,50 m et d’un diamètre de 0,30 à 0,35 m2037. Texier et Fayette ont également découvert un édifice dont les murs sont construits en opus mixtum 2038.

Au niveau de la porte Saint-Jean, au nord de la cathédrale, des fondations antiques ont encore été observées2039, ainsi qu’un élément d’inscription difficilement restituable : ---]RITI CIVI[---2040. E. Espérandieu propose la restitution ---Augusto]riti civi[tas---, ce qui en ferait une inscription publique. Mais O. Hirschfeld rejette la lecture pour restituer ---eme]riti civi[s--- et la classe parmi les épitaphes. L’inscription est perdue et aucune des publications ne fait état de ses dimensions, ce qui aurait pu éventuellement donner une indication sur sa qualité, publique ou privée. Deux autres inscriptions ont été découvertes en même temps, mais leur texte ne nous est pas parvenu.

Enfin, de nombreuses découvertes ont été réalisées aux alentours de la cathédrale. Si certaines sont des blocs utilisés en remploi dans les édifices religieux2041, d’autres au contraire semblent bien avoir été trouvés en contexte. C’est le cas en particulier à l’emplacement du palais épiscopal, où en 1759 C.N. Allou mentionne la présence de mobilier céramique, de vases en verre, d’objets métalliques en association avec des autels funéraires, des sarcophages et des blocs d’architecture2042 : des inscriptions funéraires ont en effet été trouvées dans la cathédrale et à proximité2043.

Ces découvertes laissent plutôt présumer une zone funéraire dans ce secteur. Dans l’état actuel des connaissances, la possibilité d’un temple sur le site n’est pas confirmée par l’archéologie.

Notes
2032.

Cité dans Arbellot J., 1883, p. 3 : ‘Deinde cum omni populo venit ad templum idolorum in quo erat statua Jovis, Mercurii, Dianae et Veneris. Confractisque idolis, dedicavit ibi ecclesiam in honore sancti Stephani protomartyris’.

2033.

Cité dans Arbellot J., 1883, p. 3.

2034.

Cité dans Arbellot J., 1883, p. 3 : ‘Martialis primam totius Galliae ecclesiam fecit, non a novo opere constructam, ne ipsa dilato novi operis occasionem regno diaboli faceret, et triumphos Christi retardare videretur, sed de vestuto templo gentilium sub una die perfecit basilicam fidelium, ut ipsa celeritas sanctae ecclesiae incitamentum credendo incredulis praestaret’.

2035.

Voir Bayeux : II, p. 464.

2036.

Arbellot J., 1858, p. 174. Voir encore Arbellot J., 1883, p. 6 qui reprend dans sa monographie sur la cathédrale rigoureusement les termes de son article, publié 25 ans auparavant.

2037.

Arbellot J., 1894, p. 610.

2038.

Loustaud J.-P., 2000, p. 326.

2039.

Arbellot J., 1883, p. 6.

2040.

Arbellot J., 1885, p. 64. CIL XIII, 1392. Espérandieu, 1891, n° 69 p. 157-158.

2041.

Citons : des blocs antiques (dont certains inscrits) dans les fondations du clocher de l’église romane et un chapiteau corinthien de grande taille utilisé dans les fondations de l’église de la Règle.

2042.

Allou C. N., 1821, p. 73-76.

2043.

Espérandieu, 1891, n° 33, 69, 79-83, 84, 85, 91, 92 ou CIL XIII, 1387, 1399, 1402, 1405, 1406, 1407, 1408, 1412, 1414.