c) Pas d’importation possible

De même, aucun artiste étranger à la région ne semble être intervenu pour sculpter dans les églises de Lyon, que ce soit pour les plus petites réalisations ou les œuvres majeures. En revanche, des chantiers importants de provinces n’hésitèrent pas à faire appel à des artistes à la carrière nationale. Falguière sculpta une grande partie des œuvres de Sainte-Anne d’Auvray ; à Marseille, travaillèrent Cantini (Marseille), Levesque et Ramus ; Guillaume père à Notre-Dame de Bon-Secours à Rouen sous la direction de l’architecte Barthélemy. Mais, à Lyon, le défi d’adaptation paraît trop grand ; à moins que les commanditaires lyonnais aient privilégié leurs compatriotes par identitarisme.

Parmi les plus grands chantiers lyonnais, on aurait pu s’attendre à voir se croiser sur celui de Notre-Dame de Fourvière, plusieurs sculpteurs renommés dans tout le pays ; à l’image de la diversité des intervenants dans les églises parisiennes (voir exemple p. 116) ; à l’image du succès des artistes parisiens dans la décoration des grands sanctuaires. Cependant, ce ne fut pas la politique des architectes Pierre Bossan et Sainte-Marie Perrin père et fils, qui firent toujours appel à de proches collaborateurs. Mais, sur ce chantier – où il n’y avait pas de conseil de fabrique – c’est la commission Fourvière qui donnait le dernier mot. Aussi la lutte fut parfois rude, car la commission aurait préféré le système des concours et voir de grands noms parisiens intervenir. Pour le retable des Noces de Cana (1900-1905), la donatrice imposa Eugène Guillaume, membre de l’Institut et directeur de l’Académie de France à Rome, grand nom qui convenait à la commission ; Charles Dufraine et Millefaut étant mort, Sainte-Marie Perrin accepta cette participation. Pour celui de La Visitation, offert par Mgr Chatelus, l’ancien recteur de Fourvière et évêque de Nevers imposa un concours auquel se présentèrent Berqueut, Prost, Vermare et Larrivé ; ce dernier fut choisi et l’œuvre fut achevée en 1914. Pour celui de L’Annonciation, Larrivé avait commencé à y travailler (voir cat. 120-123), ne pouvant répondre, céda la place à son ami Castex. Castex présenta une esquisse avant la première guerre, après de délicates mises au point entre l’architecte et le sculpteur, le relief fut achevé en 1922. Après la mort de Sainte-Marie Perrin père, la Commission, cherchant un sculpteur considéré par l’opinion publique, sollicita Bartholomé pour le retable de La Nativité de la Vierge (1919-1922), qui envoya son élève Denis Puech289. Mais Larrivé, soutenu par l’architecte Sainte-Marie Perrin, demeura l’architecte officiel de la basilique. Après sa mort, un concours fut ouvert pour le retable de La Pentecôte (1940-1943), auquel participèrent Belloni, Bertola et Gratien ; le lyonnais d’adoption Belloni l’emporta, il devint le dernier sculpteur attitré de la basilique. Ainsi, sur cet immense chantier de sculpture que fut la basilique de Fourvière, seules deux œuvres furent réalisées par des artistes étrangers à la ville : le retable de La Nativité par Puech et le retable des Noces de Cana par Guillaume.

Notes
289.

Il fut l'élève de Bartholomé, qui lui céda la commande de l'autel de la Nativité, à la basilique Notre-Dame de Fourvière. Il exécuta ce retable en 1921, avant de partir pour Rome, prendre la direction de la Villa Médicis, en octobre 1922, juste à temps pour le sacre de Mgr Faugier