L'église Notre-Dame Saint-Vincent possède plusieurs saints patrons en raison de l’histoire de la paroisse : ce fut l'ancienne église des Grands Augustins dédiée à Saint-Louis, elle est aussi l'héritière de Notre-Dame de la Platière et de l'ancienne église liée à la recluserie de Saint-Vincent. C’est pour ses raisons que l'église Notre-Dame Saint-Vincent possède un programme allégorique très particulier, notamment sur la façade avec la statue de la Vierge et celles de Saint Louis et de Saint Vincent. Toutefois, pour ne pas la confondre avec Notre-Dame Saint-Louis de la Guillotière, l’église est couramment appelée Notre-Dame Saint-Vincent. Saint Vincent et saint Louis sont respectivement représentés trois fois dans cette église : par une ronde-bosse en façade, par une ronde-bosse à l’intérieur vers le chœur et par de petits reliefs figurant leur mort.
Saint Vincent fut un diacre de Saragosse et de Valence, martyrisé en 304 sous Dioclétien, pour avoir soutenu son évêque Valère – à l’exemple du diacre saint Laurent. À l’extérieur (cat. 432), il est représenté par Charles Dufraine en 1882, debout629, vêtu de la dalmatique, tenant sous son bras droit un missel et la palme des martyrs qui lui servent d'attributs, son bras gauche se tient le long du corps, son visage est rond et juvénile, impression accentuée par sa coiffure courte formant un arceau sur son front et ses tempes. Le sculpteur se sert de l'aspect lisse de la dalmatique pour donner à la statue un effet monumental et solennel, faciliter la lisibilité, sans pour autant que l'œuvre soit dépourvue de vie. De même, les traits de son visage sont peut-être particulièrement arrondis pour les rendre bien discernables. Son allure est à la fois douce et ferme, sereine et déterminée ; elle traduit la transcendance de la foi fortifiant les plus faibles victimes du martyr. Ainsi le jeune martyr figure-t-il comme un garant de la foi, en pendant avec Saint Louis : ils semblent garder l'entrée de l'église.
Saint Louis (cat. 433) se tient debout, vêtu de la cape que portaient les croisés, elle drape le lourdement tout en étant discrètement ornée de fleurs de lys en très léger relief, invisibles à l'œil nu à distance. Ce costume est complété par une couronne, un de ses attributs. De sa main droite, il tient un sceptre et de l'autre une maquette de la Sainte-Chapelle, édifice qu'il fit construire pour abriter la couronne d'épine et les clous de la Passion : ce sont là ses autres attributs. Cette composition rappelle la statue de Charles V de Bourbon, sculptée vers 1365-1378 (Louvre). Malgré sa pose figée et son visage beau et doux, cette statue exprime la droiture, la loyauté, la mesure et une distinction naturelle.
Les deux saints patrons se posent comme les gardiens de l’entrée de l’église, mais se sont aussi des réussites pour leur belle simplicité et lisibilité, leur allure posée mais vivante ; ainsi ils s’accordent harmonieusement à l’architecture, malgré leur taille et leur assemblage très saillant sur des replats de la façade.
À l’intérieur, la statue de Saint Vincent (cat. 431) – réalisée par le même sculpteur, au même moment – prend une toute autre apparence. Toujours debout, son costume de diacre est plus léger et moderne. Ses bras sont croisés sur sa poitrine, le gauche tient deux livres – l’Ancien et le Nouveau Testament – , et du droit, il fait un geste d’écart, tout en tournant le visage à l’opposé. Il semble éviter quelque chose avec grâce et dédain. Ses yeux sont clos et sa chevelure mi-longue boucle. Cet ensemble de caractéristiques lui donne un air maniéré.
Sur le socle, le bas-relief figure le saint emprisonné. Il est agenouillé au centre devant une porte de prison, à moitié vêtu d’une toge et lève ses mains jointes dans une attitude de supplication ; deux anges apparaissent en volant face à lui, à droite ; derrière lui, à gauche, un soldat romain debout se frappe la tête de la main et un autre tombe à genou en s’inclinant. Pendant ses tortures, le saint fut effectivement emprisonné, mais cette scène n’est ni traditionnelle ni clairement identifiable. Cependant une gravure anonyme des années 1870 illustre aussi cet épisode de saint Vincent assisté par les anges dans sa prison630.
En face, la statue de Saint Louis (cat. 428) du même artiste, possède aussi cette moue dédaigneuse. Le saint est vêtu d’une tunique et d’une cape, d’un pan de ce manteau il enveloppe sa main droite pour porter avec respect la couronne d’épine – attitude symbolique car il la maintient aussi du bout des doigts de la main gauche. Son épée reste attachée à sa ceinture ; il est couronné et sa chevelure mi-longue ondule, comme d’usage.
En dessous, sur le socle, le relief représente la mort du saint631 qui succomba de la peste à son retour de la deuxième croisade qu’il avait entreprise. Il est étendu dans sa tenue légère de chevalier sur une litière devant un grand reliquaire, de chaque côté deux compagnons d’arme l’entourent, l’un a posé un genou à terre et mis sa tête dans sa main, pour exprimer le désarroi.
XIIIe siècle : statue, portail sud, cathédrale de Chartres. XIVe siècle : statue, église Saint-Vincent, Carcassonne. XVe siècle, albâtre anglais, Louvre. Nicolas Chanterène, statue, 1517, portail, église des Hiéronymites de Belem, Lisbonne. XVIe siècle : statue de pierre, église Sainte-Madeleine, Verneuil-sur-Avre.
Gravure anonyme d’une collection particulière ; ill. E. Hardouin-Fugier, B. Berthod, Dictionnaire iconographique des saints.
Sa mort est uniquement connue en peinture, et un peu plus représentée au XIXe siècle : Natoire, La Mort de saint Louis, 1756, plafond, église Saint-Louis-des-Français, Rome. A. Lenoir, 1854, cycle, église Saint-Séverin, Paris. P. Glaize, 1869, église de Saint-Louis-d’Antin, Paris. A. Douillard, salon de 1878.