l) Saint Dominique et saint Thomas d’Aquin

L’église du Saint-Nom-de-Jésus est l’église d’un couvent de dominicains. Ainsi, il s’y trouve une statue du saint fondateur Dominique de Guzman (1170-1221) et celle du principal saint théologien de l’Ordre, Thomas d’Aquin (1225-1274).

La statue de Saint Dominique (cat. 307) est une œuvre de J.-H. Fabisch datant de 1874. Placée en hauteur sur une console aux motifs d'inspiration médiévale – tourelles créneaux et arcs trilobés –, et surmonté d'un dais de même inspiration – arcs trilobés, gables et créneaux – , elle surmontait l’autel consacré au saint au bout du collatéral gauche, aujourd’hui disparu. La console abrite le relief d'un chien tenant dans sa gueule un flambeau, attribut de saint Dominique : sa mère l'aurait vu en songe accompagné de ce chien noir et blanc tenant le flambeau, avant sa naissance. Le saint est vêtu de l'habit de l'Ordre des Prêcheurs, qu'il fonda, c'est-à-dire une robe, le capuce, le scapulaire (blancs) et par dessus, la chape noire à capuche. Il tient contre lui, de sa main droite, un crucifix fleurdelysé : la croix dominicaine. De sa main gauche, il porte une Bible – c'est uniquement avec l'Évangile qu'il voulut ramener les hérétiques cathares à la catholicité – et son rosaire, relié à la ceinture sur le coté. J.-H. Fabisch réalise une parfaite illustration iconographique648, mais dépourvue d’attrait artistique, notons cependant le visage un peu fort du saint qui lui donne un aspect un peu plus personnel.

Thomas d’Aquin (cat. 305) fut un temps oblat au monastère du Mont-Cassin, fit des études à Naples avant d’entrer chez les dominicains faisant fi de l’avis de sa famille. Il enseigna la théologie à Paris et mourut à l’abbaye cistercienne de Fossanova sur le chemin qui devait le mener au concile de Lyon. Auteur de la Somme théologique, il fut promu docteur de l’Église : grand dévot au saint Sacrement, il voua sa vie aux études des mystères divins, en particulier celui de la sainte Eucharistie. C’est pourquoi il est appelé le « docteur angélique ».

Dans le collatéral de gauche, le relief adossé au mur sur un fond de mosaïque doré se situait au-dessus de l’autel qui lui était consacré, aujourd’hui supprimé. Il représente le saint philosophe très raide, dressé sur le penseur arabe Averroès, dont il fut le grand adversaire, recroquevillé sous ses pieds. Son habit religieux plisse de manière très droite et régulière, son visage est impassible, il présente contre lui un livre bien ouvert. L’autel qui concordait étant absent, il est difficile d’estimer l’effet escompté de l’ensemble ; le relief demeure surprenant de rigidité. D’un point de vue iconographique, il est bien identifiable par la mise en valeur du livre et sa domination de l’homme tenant un autre ouvrage, cependant, il ne possède pas d’autres attributs traditionnels – Esprit Saint sous la forme d'une colombe qui lui inspire la connaissance des choses de Dieu, une étoile ou le Saint Sacrement rayonnant sur sa poitrine649 au centre du scapulaire, ou un ostensoir – le caractère particulier de la scène parait suffire pour le désigner. Cette figuration possède des antécédents, notamment : Le triomphe de Saint Thomas d'Aquin par Andrea Bonaiuti à l’église Santa Maria Novella à Florence ; Le triomphe de Saint Thomas d'Aquin par Gozzoli, tempera sur bois, conservée au Louvre.

À titre de comparaison lyonnaise, Thomas d’Aquin figure parmi les saints qui convergent sur le devant de l’autel du Sacré-Cœur à l’église Saint-Polycarpe (cat. 784). Fabisch n’a pas hésité à le représenter un peu fort, ce que les artistes ont bien souvent omis. Ici, son physique ressemble fortement à celui peint par Carlo Crivelli (Venise 1435 – Ascoli Piceno 1495) pour un retable en 1494. À Saint-Polycarpe, il tient des deux mains un rouleau à demi déployé, il semble placide et imperturbable.

Notes
648.

XIIIe siècle, Arnolfo di Cambio, statue du tombeau du cardinal de Braye, église de San Domenico, Orvieto. XIVe siècle, figure assise en bois, provenant du couvent des dominicains, Leipzig. 1493, statue en bois polychromé, retable de Blaubeuren (Souabe). Début XVIIIe siècle, Pierre II Legros, statue, série des fondateurs d’Ordres religieux, Saint-Pierre de Rome. E. Lesquesne, salon de 1862, haut-relief, église Saint-Augustin, Paris, 1866. T. Gruyère, 1865, église Saint-Thomas-d’Aquin, Paris.

649.

Un dominicain de Brescia le vit apparaître aux côtés de saint Augustin, la poitrine ornée d’une grande escarboucle qui éclairait l’Église.