3.2.4. Problème et exercice selon Glaeser

Glaeser, en tant que mathématicien universitaire, place le problème en tête des activités des mathématiciens ; et en tant que didacticien, il considère que le professeur doit développer chez l’élève l’aptitude à poser et résoudre des problèmes. (Glaeser cité par Noël, 1999). Pour Glaeser (1971), un problème est une question dont on ne connaît pas la réponse, l’inverse n’étant pas vrai : toute question n’ayant pas de réponse n’est pas toujours un problème. La réponse ne doit pas être triviale ; et pour qu’il y ait problème, la démarche de résolution ne doit pas apparaître dès la lecture de l’énoncé. Ainsi, un problème pour un élève n’est pas nécessairement un problème pour un autre élève. De plus, l’élève doit être motivé par la résolution. Un problème peut en effet se révéler difficile à résoudre et nécessiter un engagement sur une période relativement longue.

Glaeser distingue la notion de problème de celle d’exercice qui, elle, se réduit à l’exécution de tâches algorithmiques et ne conduit pas, comme le problème, à un tâtonnement, à l’invention, à la recherche de pistes permettant d’accéder à une solution. Dans l’exercice, on ne retrouve pas cette dimension heuristique que Glaeser place au cœur même de la définition du problème. Cette distinction revêt une telle importance chez Glaeser qu’elle devient l’objet du premier fascicule du Livre du problème (Glaeser, 1973) intitulé Pédagogie de l’exercice et du problème. Il s’agit là d’une typologie des exercices selon les objectifs pédagogiques en vue desquels ils sont donnés aux élèves (Pluvinage, in Glaeser, 1999). À travers cet ouvrage qu’il considère comme un outil de formation pour les jeunes enseignants, il exprime son souhait et sa volonté (i) de susciter une réflexion sur la finalité des mathématiques, (ii) de lutter contre des habitudes de travail qui ont parfois transformé des innovations en stéréotypes. On peut voir là une allusion au décalage entre l’innovation de Clairaut qui avait consisté au début du 18ème siècle à introduire la résolution de problèmes dans son enseignement et la généralisation de cette soi-disant méthode de redécouverte voulue par Blutel un siècle plus tard.

À partir d’un ensemble d’énoncés qu’il présente comme des exemples, Glaeser invite les enseignants à adopter un regard critique quant aux situations qu’ils vont soumettre à leurs élèves et ainsi à réfléchir, voire à modifier leur enseignement des mathématiques. Il propose une classification des énoncés en sept catégories dont chacune dit-il relève d’une pédagogie différente (Glaeser, 1973, p. 10).

Nous présentons ici le tableau considéré comme fondamental par son auteur (Tableau 1), et qualifié, vingt-cinq ans plus tard, d’excellente initiative par Brousseau (in Glaeser, 1999) qui en loue le mode pragmatique.

Tableau 1 : Classification des énoncés (Glaeser, 1973, p. 10)
Sigle Catégories d’énoncés Comportement de l’élève Comportement du professeur
EE Exercices d’exposition Apprendre
Acquérir des connaissances
Exposer incomplètement
Transmettre des connaissances
P Problèmes Chercher
Trouver
Susciter la curiosité
Encourager la persévérance dans la recherche
ED Exercices didactiques S’entraîner
Acquérir des mécanismes
Fixer des connaissances, des aptitudes, des habitudes
ETT Exécutions de tâches techniques Prendre ses responsabilités
Mener un travail à bonne fin en prenant l’engagement de ne pas laisser subsister d’erreurs
Inciter à la minutie, au soin.
Exiger un travail bien fait
A Exemples d’illustration
Exercices d’application
Transférer des connaissances théoriques dans un contexte pratique Rattacher l’abstrait à d’autres centres d’intérêt
M Manipulations Observer
Expérimenter
Bricoler
Motiver les résultats d’une étude abstraite ultérieure
T Tests. Sujets de compositions, d’examens, de concours Vérifier la valeur de ses connaissances
Faire valoir ses aptitudes
Contrôler les résultats de l’enseignement sur chaque élève