3.5. Conclusion du chapitre

Les programmes d’enseignement fixent le savoir à enseigner qui deviendra ensuite le savoir enseigné par le professeur. Le passage du contenu de savoir mentionné dans les programmes, à une version didactique de cet objet de savoir, est nommé transposition didactique (Chevallard, 1985).

La centration de notre thèse sur les questions de l’enseignement et de l’apprentissage de la résolution de problèmes impose de s’intéresser à la fois aux contenus des programmes et aux travaux des didacticiens des mathématiques.

Les recherches engagées dans les Universités de Bordeaux et de Strasbourg, respectivement par Brousseau (1972) et Glaeser (1973) ont ouvert la voie à ce nouveau champ de recherche qui, bien que récent, rassemble d’ores et déjà de nombreux travaux.

La théorie des situations didactiques (Brousseau, 1986b) en constitue la pièce maîtresse. Il s’agit d’observer et d’analyser les pratiques de l’enseignant dans la conduite de sa classe et dans les tâches mises en œuvre, autrement dit de s’intéresser au processus même d’enseignement. Pour Brousseau, les causes de l’échec sont à chercher dans ce processus même et dans le rapport de l’élève au savoir et aux situations didactiques. Brousseau (1980a) a notamment défini le concept de contrat didactique pour caractériser les habitudes spécifiques d’un enseignant. Il a d’ailleurs mis en évidence deux effets de ce contrat : l’effet Topaze et l’effet Jourdain. Le recours à la notion de contrat didactique nous paraît incontournable pour analyser des séances de classe. Brousseau a nommé dévolution le moyen didactique qui consiste à faire en sorte que l’élève se sente responsable, au sens de la connaissance, du résultat qu’il doit rechercher (Brousseau, 1988b).

Tandis que Brousseau développe à Bordeaux la Théorie des Situations Didactiques en centrant sa réflexion sur les stratégies de l’enseignant dans la conduite de la classe, Glaeser fonde à Strasbourg la didactique expérimentale des mathématiques en considérant à la fois les savoirs scolaires et les savoirs acquis en dehors de l’école. Glaeser préfère d’ailleurs parler d’éducation mathématique ; le but est de donner le goût mathématique. Nombre de ses travaux portent sur la place de la résolution de problèmes dans cette éducation mathématique. Le premier fascicule du Livre du problème (Glaeser, 1973) intitulé Pédagogie de l’exercice et du problème pose clairement la distinction entre la notion d’exercice qui selon Glaeser se réduit à l’exécution de tâches algorithmiques et la notion de problème qui invite au tâtonnement, à l’invention, à la recherche de différentes pistes permettant d’accéder à une solution. Au travers de ce Livre du problème en six fascicules, Glaeser souhaite susciter chez les enseignants une réflexion sur la finalité de l’enseignement des mathématiques et sur les habitudes de travail. Mais la réflexion de Glaeser porte aussi sur la méthodologie à mettre en œuvre dès lors que l’on procède à des observations dans les classes. Ainsi, la didactique expérimentale des mathématiques qu’il a fondée s’appuie sur une expérience de terrain qu’il a voulue placer, en ce qui concerne la rigueur scientifique, au plus près des conditions expérimentales en laboratoire. Dans toutes les observations qu’il effectue dans les classes, il prend soin d’adopter une démarche rigoureuse en déterminant avec minutie les variables didactiques et en insistant sur la nécessité de comparer des situations presque identiques ne variant que sur quelques paramètres.

Ces recherches ont ouvert la voie à d’autres travaux dans le domaine de la didactique des mathématiques. Quelques-uns d’entre eux, en relation avec la thématique de l’enseignement de la résolution de problèmes sont cités dans ce chapitre : les travaux qui se réfèrent à l’usage de classifications (Pluvinage, 1993 ; Rauscher, 1993) ; les travaux qui analysent l’usage d’un type spécifique de problème (Bouvier, 1981 ; Arsac et al., 1988 ; Godot, 2002 ; Grenier et Payan, 2003 ; Charnay et al, 2006) ; les travaux qui se réfèrent à la notion de situation-problème (Douady, 1984b).

Dans ce chapitre, nous faisons également référence à la théorie des champs conceptuels développée par Vergnaud (1981), sur laquelle nous reviendrons dans le chapitre suivant destiné à recueillir le point de vue des psychologues sur la notion de problème.