Changement abrupt de sujet

De surcroît, chez les scouts, l’introduction d’un sujet peut également se faire sans marqueurs ni syntagme, sans métalangage ni question, comme dans l’extrait suivant :

Extrait n°1 (23-4-2004 : l. 1146-1148) :

1 Q : oui ou alors si tu veux un truc ou alors un truc en tente prolongée où on est tous sur le même étage ça permet=
2 C : =je me suis je me suis je me suis détruit moi pour le rallye
3 Q : qu’est-ce t’avais fait/

Par l’enchaînement immédiat, Corentin empêche Quilien de terminer son idée et change complètement de contexte. Tandis que Quilien parle encore des installations prévues (1), Corentin se met à aborder une expérience personnelle qui ne concerne pas le monde scout (2). La coupure thématique n’est annoncée par aucun marqueur ; seules les répétitions interrompent le flux de la conversation et indiquent une hésitation du locuteur. Si celle-ci s’explique par l’initiative abrupte de changer de sujet, elle n’aide certainement pas l’interlocuteur à suivre le fil des pensées du locuteur.

La raison pour laquelle Corentin peut changer de sujet sans indices supplémentaires est qu’il s’adresse à une personne précise avec qui il est déjà en train de discuter et qui connaît les deux contextes. Corentin n’a donc pas besoin d’attirer son attention et, grâce à leur savoir commun, c’est-à-dire le fait qu’ils appartiennent au même rallye, il peut être sûr d’être tout de suite compris. Pour ces raisons, Corentin n’a besoin d’aucune activité discursive pour introduire le nouveau sujet.

Dans son étude sur les changements thématiques dans les conversations de couple, Crow a constaté que « the longer the couple has been together, the more topic shift they perform in their conversation » (2004 : 153). Nous pouvons faire une observation similaire pour le contexte scout et conclure que plus les interlocuteurs se connaissent, moins ils ont besoin de marquer un changement thématique.