2. Généralisation sur la carrière de l’objet technique pendant la vente : traduction des objets intermédiaires

Par rapport aux autres étapes de la carrière de l’objet technique, la vente permet de mettre en lumière les mécanismes de passage des représentations de l'objet à l’objet intermédiaire. Il ne s’agit pas d’affirmer que le processus de vente se limite à la construction d’objet intermédiaire et notre étude montre que cette étape prend également la forme d’une boucle lien les trois formes de l’objet. Néanmoins, la construction d’un consensus sur la définition de l’objet dans un réseau constitue le cœur de cette étape et nous permet de développer notre modèle sur cet aspect. Nous avons distingué trois types en fonction des rapports de pouvoir existant et de la maîtrise que les acteurs ont des différents langages. Le cas des transports en compte propre en France est une « traduction unilatérale ». Le vendeur utilise son monopole sur le langage des caractéristiques techniques des véhicules et des produits de la marque pour contrôler ce processus. Le cas du transport pour compte d’autrui en France et de la relation entre chargeurs et transporteur en Chine est une « négociation ». C’est un rapport de pouvoir préexistant au réseau sociotechnique qui influe le processus. L’acteur favorisé par le rapport de force impose alors sa représentation de l’objet. Enfin, le cas des relations entre un transporteur et son cercle de connaissance est une « discussion ». Le concept de « face » permet de maîtriser les rapports de force au sein du cercle et de créer une confrontation plus ouverte entre les différentes représentations de l’objet en présence.

Le processus de construction des objets intermédiaires à partir des représentations est donc marqué par la co-construction des aspects techniques et sociaux c’est-à-dire par leur entremêlement sans qu’il soit possible de les distinguer. Néanmoins, dans les trois cas de traduction des représentations, les accords sur la définition du camion dépendent aussi des possibilités de combinaisons qui sont liées aux contraintes techniques, qui ont été anticipées par le constructeur en France ou aux stocks constitués par les concessionnaires en Chine. Des contraintes techniques et physiques liées à l’objet matériel interviennent dans la traduction. Ainsi, la combinaison de certains éléments n’est pas possible du fait de leur constitution. Cette contrainte tient à l’appartenance de l’objet technique au domaine physique ou à un système technique. Néanmoins, elles ne sont pas pour autant asociales puisque le choix d’autres techniques, ou s’il n’en existe pas, la recherche d’autres techniques auraient pu permettre d’apporter une réponse compatible. Il se produit alors une interaction entre domaine technique et social qu’il est possible de décrire grâce aux outils de l’approche de la co-influence.