Annexe 3. Lexique sociotechnique

Configuration : représentation abstraite, c’est-à-dire construite par le chercheur, pour montrer l’interrelation entre les différents éléments distingués analytiquement : les domaines physique et social, les systèmes techniques, les structures, ensembles et filières techniques et enfin les représentations de l’objet, les objets intermédiaires et les objets matériels.

Domaine : il s’agit de distinguer un domaine régit par des lois physiques, chimiques ou biologiques et un domaine régit notamment par des représentations, la subjectivité des acteurs et l’implication dans un contexte et une histoire. Pour autant, il ne s’agit pas ici de déclarer l’indépendance de ce domaine physique vis-à-vis du social. Ce que nous décrivons comme des domaines sont en fait deux modes de lectures de la réalité et ils ne sont donc pas exclusifs l’un de l’autre.

Ensemble technique : Deuxième niveau de la hiérarchisation des objets techniques mis en place par B. Gille. Un ensemble technique nécessite des techniques affluentes concourant à un résultat final. Les techniques sont issues de systèmes techniques différents. Il s’agit d’éléments pouvant recevoir, transformer et restituer une forme d’énergie de manière autonome. Le moteur rail est un ensemble technique.

Filière technique : Troisième niveau de la hiérarchisation des objets techniques mis en place par B. Gille. Une filière technique nécessite des actes techniques différents concourant à un résultat final. C’est une suite d’ensembles techniques destinés à fournir le produit désiré et dont la fabrication se fait en plusieurs étapes successives. Le camion est une filière technique seulement si on lui ajoute l’ensemble des infrastructures routières qui lui permettent de fonctionner.

Objet : Usuellement, l’objet peut être à la fois une chose, une personne ou une finalité. Généralement, il est défini en opposition au sujet. Nous avons choisi de ne pas utiliser ce terme générique trop large et de spécifier différents sens.

Objet intermédiaire : Une des trois formes de l’objet technique.

Objet matériel : Une des trois formes de l’objet technique.

Objet physique : Cf. objet matériel.

Objet technique : Se réfère au sens restreint du terme « technique ». Il s’agit de la technique matérielle comme produit d’une activité. Pour utiliser la distinction établie par J. Monod, ce terme désignera un objet artificiel, matériel et au monde.

Prises : Concept développé par C. Bessy et F. Chateauraynaud429 qui montrent comment les individus construisent des jugements sur des objets physiques. La prise assure le passage des sensations au jugement. D’un côté, elle s’accroche aux plis de l’objet évalué par une démarche qui peut être orientée par une finalité ou des valeurs. De l’autre, elle crée des repères pour les acteurs de l’évaluation qui qualifient l’objet et rendent possible l’insertion de l’objet dans un espace de calcul. Nous avons proposé de distinguer différents types de prises : les prises subjectives reposant sur les sens de l’individu dans son corps à corps avec l’objet et les prises objectives dont le mécanisme de jugement a été externalisé et repose sur une mesure couramment acceptée.

Représentation de l’objet : Une des trois formes de l’objet technique. Le terme de représentation permet d’opérer une distinction, au moins analytique, entre l’objet matériel et la vision qu’en ont les individus. Le terme de représentation est donc utilisé en opposition avec un objet matériel et non avec la réalité puisque aucune des formes l’objet ne peut prétendre être véritable. Néanmoins cette distinction implique d’accepter existence d’une réalité extérieure à l’individu.

Réseau : nous avons distingué les réseaux sociotechniques et les réseaux (ou cercle) de connaissances interpersonnelles. Le premier terme se réfère au groupe d’acteurs qui se forme autour de l’objet technique dans toute action technique. Le deuxième terme est la traduction du concept chinois de « guanxi » qui repose sur des relations interpersonnelles et permet de compenser le manque de garantie au niveau légal pour poursuivre une partie qui ne remplit pas sa part d’un contrat.

Structure technique : Premier niveau de la hiérarchisation des objets techniques mis en place par B. Gille. Une structure technique est un acte technique unitaire. En ce qui concerne l’objet technique, il s’agit d’un objet technique simple ou complexe mais qui repose sur un seul type de techniques. Cet auteur distingue les structures élémentaires (par exemple les outils) et les structures de montage (par exemple les machines). Les premières sont un acte technique reposant sur un type de techniques, c’est-à-dire issu du même système technique. Les « pièces » ou les « outils » sont généralement des structures élémentaires.

Système technique : Concept issu de l’histoire des techniques pour décrire les interrelations entre différentes techniques au moment de leurs innovations. Il s’agit de décrire l’évolution technique comme une succession de systèmes regroupant des techniques au sens large. Dans notre travail, nous avons distingué deux systèmes techniques dans le moteur dCi 11 : le système de la mécanique (qui repose sur la thermodynamique et l’énergétique) et le système de l’électronique. L’introduction de structures techniques issues du deuxième, dans un ensemble technique jusqu’ici composé essentiellement de structures liées au premier, pose des problèmes de compatibilité.

Technique : terme polysémique qui renvoie principalement à deux aspects. La technique peut être immatérielle : c’est alors un moyen nécessaire à la réalisation d’une activité. Cette acception, appelée « sens large », correspond à une méthode, un savoir-faire. Cette technique est un moyen nécessaire à la réalisation d’une activité. Mais la technique peut également être matérielle : il s’agit dans ce cas du produit de l’ingénierie, c'est-à-dire le résultat de la technique immatérielle au sens large. Ce deuxième sens est dit « restreint ».

Technique « a-scientifique » : Concept construit par B. Gille. Il s’agit des techniques reposant sur un savoir purement empirique, sans théorie, ni raisonnement. Cet auteur distingue quatre niveaux de connaissance « a-scientifique » de la technique : le geste et la parole, la recette, la description et le modèle réduit.

Technique « scientifique » : Concept construit par B. Gille. Il s’agit de techniques reposant sur une théorisation. Cet auteur distingue trois niveaux de techniques « scientifiques » : le calcul, la formule et la théorisation a priori.

Technique immatérielle : Première acception du terme technique. Ce terme correspond à une méthode, un savoir-faire.

Technique matériel : Seconde acception du terme technique. Cf. objet technique.

Technologie : connaissances des techniques.

Notes
429.

BESSY C., CHATEAURAYNAUD F., op. cit., 1993.