La question de la lèpre sociale en Afrique de l’Ouest nous entraîne dans une dimension philosophique qui transcende les frontières nationales et méta-nationales pour nous plonger dans l’universel et l’humanisme. Lors de nos multiples rencontres avec les lépreux à Dakar et dans leurs villages, ils n’ont cessé d’aborder la question éthique. Cela nous a confortés dans l’idée que la relation entre éthique et politique n'est pas seulement un problème théorique : elle articule des aspects moraux existants et réels face à l'histoire singulière et universelle de l’homme.
Pour aborder cette dimension éthique, nous nous ferons accompagner particulièrement par Emmanuel Levinas. Si les auteurs dissertent sur une éventuelle relation de cause à effet entre la Shoah et la pensée de Levinas, nous pensons que la Shoah constitue un évènement crucial dans sa vie et son œuvre. Nous retenons de l’approche d’Emmanuel Levinas la pertinence de sa vision éthique en confrontation avec des situations-limites telle que la Shoah. Sans comparer, nous retenons la pertinence du questionnement éthique porté par les lépreux et toutes les personnes en situation de lèpre sociale face à la société de mépris et d’exclusion qui les enferme (ou les environne).
‘« C'est peut-être le fait le plus révolutionnaire de notre conscience du XXe siècle … que la destruction de tout équilibre entre la théodicée explicite et implicite de la pensée occidentale et les formes que la souffrance et son mal puisent dans le déroulement même de ce siècle. Siècle qui en trente ans a connu deux guerres mondiales, les totalitarismes de droite et de gauche, hitlérisme et stalinisme, Hiroshima, le goulag, les génocides d'Auschwitz et du Cambodge. Souffrance et mal imposés de façon délibérée, mais qu'aucune raison ne limitait dans l'exaspération de la raison devenue politique et détachée de toute éthique... Que parmi ces événements, l'Holocauste du peuple juif sous le règne de Hitler nous paraisse le paradigme de cette souffrance humaine gratuite où le mal apparut dans son horreur diabolique, n'est peut-être pas un sentiment subjectif. La disproportion entre la souffrance et toute théodicée se montra à Auschwitz avec une clarté qui crève les yeux. Sa possibilité met en question la foi traditionnelle multimillénaire. Le mot de Nietzsche sur la mort de Dieu ne prenait-il pas dans les camps d'extermination la signification d'un fait quasi empirique ? Faut-il s'étonner dès lors que ce drame de l'Histoire Sainte ait eu parmi ses acteurs principaux un peuple qui, depuis toujours, était associé à cette histoire et dont on aurait tort d'entendre l'âme collective et le destin comme limités à un quelconque nationalisme et dont la geste, dans certaines circonstances, appartient encore à la Révélation - fût-ce comme apocalypse - qui aux philosophes «donne à penser» ou qui les empêche de penser ? » 105 ’Les sociétés modernes, avec différents régimes politiques, proclament universellement l'idée de pays, de nation, d’Etat de droit, de droits fondamentaux des citoyens. Parmi ces droits, la liberté de la personne humaine. Tout cela est parti, il est vrai, des Etats occidentaux (Amérique du Nord, France, etc.) mais le monde entier se réclame aujourd’hui de la démocratie et de cette doctrine de la liberté et de l’autonomie des citoyens. Le problème se pose beaucoup plus au niveau de la matérialisation de ces droits fondamentaux, d’un pays à un autre, d’un continent à un autre, d’une époque à une autre.
Cette idée de base de l'humanisme occidental a été déchirée dans l’histoire contemporaine par l'hitlérisme. Cette doctrine consiste à définir l’homme par une mystique sélective biologique aboutissant au racisme et à la barbarie. « Une société à base consanguine découle immédiatement de cette concrétisation de l'esprit. Et alors, si la race n'existe pas, il faut l'inventer » 106 . Le racisme hitlérien est la négation de l'humanité de l'homme. Mais, d’autres formes de mépris et de négation de l’humanité de l’homme se profilent dans les politiques publiques qui n’accordent pas assez de place ou pas du tout aux personnes en situation de lèpre sociale. Si l'essence de l'homme se définit par la liberté, il y a dans nos sociétés dites modernes des hommes et des femmes à qui ce statut est fort difficile voire impossible à reconnaître. Les idées de liberté, de transcendance du sujet, de raison, ainsi que la prise en compte du problème social, sont certes édictées et consignées dans des codes juridiques, mais leur place et leur sens sont profondément et quotidiennement bafoués avec le développement de l’individualisation et du libéralisme sauvage de la société et des rapports humains. « On doit se demander si le libéralisme suffit à la dignité authentique du sujet humain »107.
La compréhension de la lèpre sociale peut passer par une certaine conception de l'éthique dégagée par Emmanuel Levinas. Nous la cernerons mieux en la mettant en regard de la notion classique de morale108. Leur point commun est d'avoir pour moteur le sujet lui-même. La morale s'identifie à une recherche de perfection, laquelle peut prendre de multiples formes, avec l’établissement d'une harmonie ou d'un juste milieu dans son comportement, la maîtrise des pulsions, l’obéissance de l'homme à une loi que sa propre raison lui impose, l’accès à la contemplation ou, au contraire, l’impératif d'action et de réalisation, etc. Quant à l'impulsion éthique, elle ne vient plus de moi. Elle procède de la révélation d'autrui, de l'autre homme, la personne en situation de lèpre sociale, par exemple.
Mais que signifie autrui ? Et à partir de là, comment comprendre que la révélation d'autrui soit d'emblée corrélative de l'obligation éthique ? La personne en situation de lèpre sociale est, pour nous, Autrui ; elle n'est pas nous et elle n'est pas une chose.
Autrui n'est pas du tout une chose. La personne en situation de lèpre sociale ne peut être définie par son histoire, par sa situation sociale, par une quelconque caractéristique physique ou psychologique, par une image, par son caractère ou par telle ou telle aptitude. En tant qu’Autrui, elle est, selon les termes de Jean-Paul Sartre,
‘« Un pur trou dans le monde. (Elle) procède de l'absolument Absent »109. Aussi, elle « n'est pas un contenu connu, qualifié, saisissable à partir d'une idée générale quelconque et soumis à cette idée. (Elle) fait face, ne se référant qu'à soi »110 ’La relation à autrui, nous dit Emmanuel Levinas, est relation à l'infini. Autrui se présente à nous comme infini. L'idée de l'infini est connue comme une idée abstraite, comme une idée formelle. La relation à autrui est sa déformalisation.
‘« L'expérience, l'idée de l'infini, se tient dans le rapport avec Autrui. L'idée de l'infini est le rapport social. Ce rapport consiste à aborder un être absolument extérieur. L'infini de cet être qu'on ne peut pour cela même contenir, garantit et constitue cette extériorité. Elle n'équivaut pas à la distance entre sujet et objet. L'objet, nous le savons s'intègre à l'identité du Même. L'extériorité de l'être infini se manifeste dans la résistance absolue que, de par son apparition - de par son épiphanie - il oppose à tous mes pouvoirs » 111 .’Il est difficile de faire admettre que la personne en situation de lèpre sociale est aussi (et comme tout le monde) un être de parole. En effet, l'expression, la parole, le discours constituent pour elle une situation privilégiée. Par la parole, autrui se manifeste en soi. Selon Emmanuel Levinas, Visage est quasiment synonyme d'autrui. Visage signifie présence vivante et expression, le contraire d'un masque, d'une image figée dans sa forme.
‘« La manifestation de l'en-soi consiste pour l'être à se dire à nous, indépendamment de toute position que nous aurions prise à son égard, à s'exprimer. Là, contrairement à toutes les conditions de la visibilité d'objets, l'être ne se place pas dans la lumière d'un autre mais se présente lui-même dans la manifestation qui doit seulement l'annoncer, il est présent comme dirigeant cette manifestation même - présent avant la manifestation qui seulement le manifeste... Le visage est une présence vivante, il est expression. La vie de l'expression consiste à défaire la forme où l'étant, s'exposant comme thème, se dissimule par là même. Le visage parle... Celui qui se manifeste porte, selon le mot de Platon, secours à lui-même. Il défait à tout instant la forme qu'il offre » 112 ’La relation à la personne en situation de lèpre sociale se déploie dans la dimension morale.
‘« La transcendance du visage est, à la fois, son absence de ce monde où il entre, le dépaysement d'un être, sa condition d'étranger, de dépouillé ou de prolétaire. L'étrangeté qui est liberté, est aussi l'étrangeté-misère. La liberté se présente comme l'Autre; au Même qui, lui, est toujours l'autochtone de l'être, toujours privilégié en sa demeure. L'autre, le libre est aussi l'étranger. La nudité de son visage se prolonge dans la nudité du corps qui a froid et qui a honte de sa nudité »113 ’Avec la déformalisation s'ouvre la résonance éthique, de sorte que la dimension « historique » de la pensée « lépreuse » vient s'intégrer tout naturellement dans le cadre de la réflexion philosophique la plus abstraite. La personne en situation de lèpre sociale se révèle dans la personne de celui qui est réellement nu, dans celle de l'étranger sans assise, du pauvre, de la veuve et de l'orphelin (dont parlent le Coran et la Bible), du SDF (sans domicile fixe), du fou, de l’exclu, etc. L'appel des personnes en situation de lèpre sociale, prolongé par les exigences des droits de l’homme, devient philosophie première au point de constituer le noyau de l’organisation et du fonctionnement des Organisations non gouvernementales comme des Organisations internationales. La relation à l'infinité de la personne en situation de lèpre sociale se transcrit en accroissement à l'infini des obligations à son égard. « Autrui en tant qu'autrui se situe dans une dimension de la hauteur et de l'abaissement » 114 . Une certaine morale internationale reconnait que
‘« Laisser des hommes sans nourriture - est une faute qu'aucune circonstance n'atténue » 115 et que « l'étendue des obligations à l'égard des hommes pleinement hommes n'a pas de limites … les besoins matériels de mon prochain sont des besoins spirituels pour moi » 116 .’Quelle place, si l'on suit cette conception de l'éthique, faut-il accorder à la politique, aux institutions ou plus généralement à l'histoire ? Ou inversement comment l'horizon éthique qui a été dégagé se situe-t-il par rapport à la politique et à l'histoire ? Emmanuel Levinas conçoit le rôle de la raison politique à la manière classique et la relation éthique est ce qui, par définition, est en rupture par rapport à la politique. Toutefois le fossé qui la sépare de la politique n'est pas sans nuances. Sans jamais pouvoir être comblé, il comporte néanmoins des degrés.
Prolongeant Emmanuel Levinas, on peut dire que si, selon son expression, l'éthique doit être déclarée « philosophie première », c'est la guerre qui est la raison politique première. Ce constat est établi sans appel dès les premières lignes de Totalité et Infini. La guerre ne se range pas seulement - comme la plus grande - parmi les épreuves dont vit la morale. L'art de prévoir et de gagner par tous les moyens la guerre - la politique - s'impose, dès lors, comme l'exercice même de la raison. La politique s'oppose à la morale. Selon l’Auteur, la politique en guise de guerre, n'est pas une contingence, un regrettable accident ou une maladie qu'il faut soigner. Oser énoncer que la guerre est exercice de la raison implique qu'on ne saurait la réduire à un non-sens ou même à une simple situation empirique qu'il suffirait de rapporter à un jeu de causes et d'effets.
‘« La liberté ne se réalise pas en dehors des institutions sociales et politiques qui lui ouvrent l'accès de l'air frais nécessaire à son épanouissement, à sa respiration et même, peut- être, à sa génération spontanée... [Mais] il existe une tyrannie de l'universel et de l'impersonnel, ordre inhumain quoique distinct du brutal. Contre lui, s'affirme l'homme comme singularité irréductible, extérieure à la totalité où il entre » (Totalité et Infini, 218).’L'ordre politique garantit la liberté mais, comme le laisse présager cette dernière phrase, il n'est en aucune façon celui de la relation éthique. On le voit déjà dans le glissement de sens subi ici par la notion même de liberté. Il ne s'agit plus de cette liberté qui se reconnaît comme injuste et responsable envers autrui. Tout le sens de l'institution politique est, bien au contraire, de permettre l'expansion des libertés et leur compétition par une saine limitation qui les préserve d'une destruction réciproque.
L'ordre politique n'est pas celui de la relation à l'infini ouvert par la révélation d'autrui, c'est l'ordre d'une totalité dans laquelle les personnes en tant que telles disparaissent au profit de l'abstraction de l'Etat. Le fossé entre les ordres politique et éthique reste pour l'instant infranchissable. Il faut toutefois ajouter une précision. Lorsqu’Emmanuel Levinas proteste contre le totalitarisme de l'Etat et plus généralement de l'histoire, ce n'est pas au nom du sujet qui se rebelle contre une loi qui l'enserre. L’auteur se distingue par là d'autres courants philosophiques qui opposent à la rationalité universelle le cri de révolte de l'individu blessé.
Par la suite, cette idée trouvera un prolongement dans la réflexion de Levinas sur les « Droits de l'homme » qui, avant même d'être fondés sur la « nature humaine », idée prévalente depuis la Renaissance, doivent être considérés plus originellement comme les « droits de l'autre homme »117. Levinas démontre en tous cas dans une lecture talmudique que cette manière de voir est caractéristique de l'humanisme juif :
‘« Soulignons encore un détail de la situation où se place la Michna ici, caractéristique de l'humanisme juif : l'homme dont il convient de défendre les droits, c'est d'abord l'autre homme, ce n'est pas initialement moi. Ce n'est pas le concept « homme » qui est à la base de cet humanisme, c'est autrui » 118 .’Certes la relation éthique se produit dans l'histoire mais elle la transcende absolument. « Si elle [l'histoire] prétend intégrer moi et l'autre dans un esprit impersonnel, cette prétendue intégration est cruauté et injustice, c'est-à-dire ignore Autrui. L'histoire, rapport entre hommes, ignore une position du Moi envers l'Autre où l'Autre demeure transcendant par rapport à moi. Si je ne suis pas extérieur à l'histoire par moi-même, je trouve en autrui un point, par rapport à l'histoire, absolu ; non pas en fusionnant avec autrui, mais en parlant avec lui... Quand l'homme aborde vraiment Autrui, il est arraché à l'histoire » 119 .
‘« L'éthique, ici, ne vient pas en supplément à une base existentielle préalable; c'est dans l'éthique entendue comme responsabilité que se noue le nœud même du subjectif » 120 . Emmanuel Levinas fixe cette nouvelle figure de l'altérité dans une interprétation du verset Tu aimeras ton prochain comme toi-même. Ce n'est pas tu aimeras ton prochain « car il est comme toi-même » ou autant que toi-même ». Le « comme toi-même » porte sur tout le début du verset. Aime ton prochain; c'est toi-même »; « c'est cet amour du prochain qui est toi-même »121 .’La relation à autrui se définit d'abord comme proximité dans un sens qui peut dérouter. La proximité d'autrui ne naît pas de la rencontre, elle n'est pas le résultat d'une quelconque prise de conscience. Elle est constitutive du sujet humain avant tout savoir et toute représentation. Elle désigne un contact immédiat. En outre il ne faut pas s'y tromper. La proximité à autrui ne doit pas être comprise selon le mode symétrique suggéré par le langage courant pour lequel la relation de proximité englobe simultanément deux entités (dire que A est proche de B équivaut à dire que B est proche de A, ou encore que A et B sont proches). De même la proximité n'est pas une fusion. Bien au contraire, elle maintient l'autonomie de l'autre dans l'infini de son altérité. Quel peut donc être le contenu d'une telle proximité sans réciprocité ni fusion ? Emmanuel Levinas répond par la responsabilité. Pour lui, proximité et responsabilité ne vont pas l'un sans l'autre ; ce sont même quasiment des termes synonymes : « La proximité du prochain - la paix de la proximité - est la responsabilité du moi pour un autre.. ». (Ibid., Altérité et transcendance, 147). Il ajoute : « La subjectivité est ... responsabilité dans la proximité des autres » (Ibid. Autrement qu’être, 97)
Mais, de qui est-on responsable ? D'autrui certainement, mais puisque cette responsabilité ne se décrit pas comme postérieure à la rencontre, puisque qu'elle est a priori constitutive du sujet, il s'agit donc d'autrui le premier venu ou même d'autrui l'inconnu. De quoi est-on responsable ? Emmanuel Levinas s'engage ici sur un chemin abrupt de radicalisme croissant.
En premier lieu, je suis responsable de l'oppression et des malheurs subis par autrui. Ce degré de la responsabilité n'est pas déconnecté de la réalité quotidienne, du moins dans ses aspects les plus nobles. S'il y a utopie, c'est une utopie observable, et c'est justement ainsi qu’il répond au reproche de développer une pensée utopique. « La passivité la plus passive, l'inassumable subjectivité - ou sujétion même du sujet - tient à mon obsession par la responsabilité pour l'opprimé autre que moi » (Ibid. Autrement qu’être, 70).
Si je ne suis pas seulement responsable des malheurs d'autrui, l'homme libre est responsable de ses propres actes et coupable de ses propres fautes. Emmanuel Levinas va plus loin. « Responsable d'autrui » signifie responsable pour les fautes d'autrui, responsable de la liberté d'autrui. Je suis responsable de la faute d'autrui et même de la persécution dont il me persécute. Emmanuel Levinas va jusque là tout en marquant qu'une telle perspective doit immédiatement être nuancée.
‘« Il m'est arrivé de dire quelque part, c'est un mot que je n'aime pas beaucoup citer, car il doit être complété par d'autres considérations, que je suis responsable des persécutions que je subis. Mais seulement moi! Mes « proches » ou « mon peuple » sont déjà les autres et, pour eux, je réclame justice.... Ce sont là des formules extrêmes qu'il ne faut pas détacher de leur contexte. Dans le concret, beaucoup d'autres considérations interviennent et exigent la justice même pour moi » (Ibid., Totalité et Infini, 106). ’Emmanuel Levinas, Entre nous, Paris, Grasset, 1991, p.114
Ibid.
Cahiers de l’Herne, 1991
Dans son ouvrage Totalité et Infini, Emmanuel Levinas semble employer éthique et morale de manière indifférente.
Levinas Emmanuel citant Jean-Paul Sartre, in En découvrant l’existence avec Husserl et Heidegger, Paris, Vrin, 1967, p.198.
Entre nous, p.38
En découvrant l’existence avec Husserl et Heidegger, p.172
Totalité et Infini, p.37
Ibid., p.47
Ibid., p.229
Ibid., p.175
Du sacré au saint, Paris, Editions de Minuit, 1977, p.20
Cf. Altérité et transcendance, Editions Fata Morgana, 1995, pp.151-154
Du sacré au saint, p.17
Totalité et Infini, p.23
Ethique et Infini, p.100
De Dieu qui vient à l’idée, Paris, Editions Vrin, 1982, p.144