Durant la vie de l’écrivain, il est impossible de ne pas penser à elle, tellement son image publique, son œuvre et la star que Duras devient dans les années 80 invitent à l’aimer ou à la détester. « Je pense que l’écriture de Marguerite Duras ne laisse au lecteur que deux possibilités : l’aimer ou la détester » 2082 , affirme en 2006 Enrique Vila-Matas, disciple et grand admirateur de Duras. Elle ne laisse personne indifférent. Après son « passage vers un autre degré », comme elle appelle la mort dans C’est tout, des pages entières sont couvertes d’hommages par des gens qui l’ont côtoyée, lue, aimée, appréciée, mais qui n’osent pas faire ce geste du vivant de l’écrivain. Il ne s’agit pas ici de biographies, plutôt de récits empreints de nostalgie, de pages écrites sous l’influence directe, fortement visible, que la lecture de l’œuvre durassienne ou le contact personnel avec l’écrivain exercent sur quelques personnes. Ces pages témoignent du désir violent d’écrire sur Duras, par amour pour elle, tout en lui empruntant parfois son style. Ce sont des effets de lecture incontestables censés prolonger la vie de l’œuvre durassienne, après la mort de Marguerite. Comme si écrire l’amour qu’on a pour Duras ne suffisait pas, deux gestes particuliers rendent hommage à l’écrivain après sa disparition : donner son nom à un prix littéraire et à une place du Lot-et-Garonne.
« L’écrit et la mouche », par Enrique Vila-Matas, Le Magazine littéraire, n° 452, avril 2006, dossier Duras réalisé par Aliette Armel, p. 30