II.10. Les oubliés du modèle. La transposition didactique à l’intention de qui ? Cela fait partie du contrat professionnel.

Le modèle de transposition didactique proposé par Michel Verret et Yves Chevallard semble dépendre seulement de la logique des contenus dans son utilisation radicale. Dans tous projets d’enseignement, il y a cependant une pensée tournée vers l’élève. Michel Develay nous met sur la voie en indiquant au premier chapitre de son ouvrage que lorsque l’enseignant prépare une situation d’apprentissage, il doit intégrer trois logiques : « la logique des contenus, la logique des élèves, et sa propre logique pédagogique »90. Il se propose de démontrer que les savoirs scolaires ne sont pas un décalque appauvri des savoirs savants et qu’une épistémologie scolaire est seule capable de mettre à jour le double travail de didactisation et d’axiologisation ; nous avons envie d’ajouter à cette classification l’idée d’une « pédagogisation ».

Les préludes moteurs ou les jeux traditionnels pédagogiquement adaptés que l’on repère dans les situations des traces écrites sont des modèles inférieurs issus des contraintes de transposition didactique dues à l’âge des élèves. Cela fait dire à Michel Chevallard que, faute de pouvoir changer les élèves, il ne nous reste plus qu’à changer le savoir.

D’après Olga Galatanu, les savoirs à enseigner ne dépendent plus de « la logique du champ disciplinaire » 91 mais d’une « logique didactique » qui concerne les publics enseignés.

Philipe Sarremejane considère que la connaissance professionnelle d’un enseignant ne peut se réduire à la planification anticipée d’une leçon et que son expérience vient « des retours fournis par l’élève »92.

François Victor Tochon93 nomme le travail interne de transposition didactique « transposition pédagogique ».

Enfin, Brou N’zi et Pauline Desrosiers94 montrent que les enseignants ne font qu’une application partielle des recommandations officielles. Selon ces chercheurs, si les enseignants réalisent pratiquement ce qu’ils ont planifié, ils évaluent leurs prestations plus en fonction du degré de participation des élèves que par rapport à la réalisation des objectifs planifiés ou recommandés.

Notes
90.

Develay, M. (1992). Déjà cité. (p.15).

91.

Galatanu, O. (1996). Savoirs théoriques et savoirs d’action dans la communication didactique. Point de vue pragmalinguistique. In J.M. Bardier (Dir.), Savoirs théoriques et savoirs d’action (pp.101-118). Paris : PUF. (p.105).

92.

Sarremejane, P. (2006). Accepter une part d’ombre. Cahiers pédagogiques, 441, 22-23. (p.22).

93.

Tochon, F.V. (1992). Trois épistémologies du bon enseignement. Revue des sciences de l’éducation, 28, 181-197.

94.

N’zi, B. et Desrosiers, P. (1992). Stratégies de planification et contenu de l’éducation physique dans les écoles secondaires. Revue canadienne de l’éducation, 17 :1, 66-85.