II.4. Un langage professionnel propre à l’éducation physique et sportive.

La plupart des énoncés sont communs à la profession et possèdent néanmoins une organisation propre à chacun des enseignants. Le découpage de la matière sportive se fait selon des préoccupations didactiques personnelles. Mais la logique interne de l’activité cède souvent à l’activité planificatrice des enseignants ; l’écrit devient un moyen d’accès au travail réel des enseignants et rend visible les différentes opérations didactiques menées.

Dans cette concentration de mots et de signes, nous pouvons faire l’interprétation suivante pour l’enseignante d’expérience n°23 (leçon 1, situation d’apprentissage 2).

Traces écrites Analyse compréhensive et interprétation
L1 S2 : « à 2 c conserver la balle pdt 1’. Echanges des rôles. Sur terrain largeur ». Un petit croquis représente un terrain de HB qui comporte un quadrillage, trois zones en longueur et 4 zones en largeur. « sur terrain largeur » « Se déplacer avec balle → limite à fixer. Faire des passes à Part. Attention au déf. → Chaque fois que le ballon est posé sur ligne = 5pts. Compter les pts –le déf marque 1 pt s’il intercepte » « Bilan = diminuer l’espace large. » Caractérisation de la situation d’apprentissage et de la structure planificatrice à partir d’une modélisation des énoncés :
Action à faire/contrainte : à 2 c 1 conserver la balle.
Durée de l’action : 1’.
Organisation/Gestion du groupe classe : échanges des rôles.
Localisation spatiale/représentation visuelle de l’espace de travail : croquis + sur terrain largeur.
Précision sur la forme de l’action/contrainte : se déplacer avec balle.
Alternative didactique : limite à fixer.
Consigne d’exécution/contrainte : faire des passes à part.
Consigne de réalisation/obligation : attention au déf.
Indicateur de réussites : chaque fois que le ballon est posé sur la ligne = 5pts.
Compter les pts, etc.
Bilan et proposition didactique pour la prochaine leçon : diminuer l’espace de travail.

L’écrit est court mais dense, et propose une organisation rationnelle de l’enseignement. La situation nous apparaît comme fonctionnelle et les énoncés respectent un schéma de pensée. Seuls, les points-clefs de la situation d’apprentissage sont planifiés. L’enseignant édicte là un véritable code didactique ; il légifère en quelque sorte sur le milieu d’apprentissage qu’il crée. En général, les logiques spécifiant la pratique d’enseignement émergent dans le processus d’écriture.

Nos trois groupes d’enseignants procèdent de la même façon : ils construisent à partir de règles d’action ou de consignes d’organisation un langage professionnel spécifique. Le schéma, le plan du lieu de travail, les objectifs, les descriptions de ce qu’il y a à faire, les autorisations et les interdictions, les gestions d’effectifs, les alternatives didactiques sont des formes énoncées qui expriment les stratégies professionnelles employées pour enseigner. Ce langage dit et fait la pratique.