II.5. Du langage didactique au langage pédagogique.

L’écriture du travail réel qui se dit et s’écrit difficilement constitue peut-être l’essentiel de la destination des écrits de planification. Pour comprendre les effets pédagogiques de cette formalisation, il nous faut dépasser le savoir interne au processus didactique et envisager les intentions pédagogiques de ces enseignants à partir de quelques exemples.

Prenons l’exemple de l’enseignant débutant PLC2 n°19 (leçon 2, situation d’apprentissage 4).

Traces écrites Analyse compréhensive et interprétation
L2.S4 : « Par 2 Remontée de balle sur tt le terrain pr aller tirer ». L’écrit est complété par un dessin qui indique que les élèves vont aller d’un but à l’autre en longeant la touche du côté de progression. Il y une cible dessiné avec 4 cerceaux dans les angles du but. « Consignes : pas d’arrêt, pas de perte de balle, respect des 3 pas, récept 2 mains (pas de consignes/ dribble). Cpter les pts marqués (3 à 5 tirs par j.). ‘tir intelligent’. » La remontée de balle sur le terrain se fait à vide. Cette situation impose des contraintes fortes ; il y a des interdictions et des obligations. Pour cet enseignant, on note une forte propension à planifier des énoncés qui sont de véritables obligations d’actions.Ces dernières sont imposées et contrôlées ; il n’y a pas de débordement possible. Le désordre et l’aléa ne sont point de mises. Il y a un ordonnancement des actions à faire et l’organisation des déplacements est fixée d’une manière rigoureuse. Les énoncés sont brefs et les consignes sont écrites dans un style militaire. Nous posons alors inévitablement la question pédagogique suivante : pour apprendre en éducation physique et sportive, faut-il passer par des exécutions commandées et par des gestes obligatoires ?
Pour interroger cette forme d’apprentissage et sa pertinence motrice au sein de l’école, nous proposons le débat suivant :
En éducation physique se pose la question du faire et du dire ainsi que du comprendre. Faut-il dire la connaissance et la faire exécuter ? Ou bien faut-il simplement dire la connaissance et proposer son expérimentation ? En reprenant les propositions de cet enseignant, faut-il imposer les 3 pas pour que l’élève sente la limite des trois pas ou faut-il seulement en fixer la limite ? Dans le deuxième cas, l’élève devra gérer en fonction du contexte s’il faut faire trois, deux et ou un pas. On a pu voir des élèves, sans que cela corresponde à un besoin du contexte, comptaient les trois pas d’une façon mécanique avant de faire la passe alors que le futur réceptionneur n’est déjà plus en synchronie avec son passeur. L’enseignant ayant imposé les 3 pas, les élèves obéissent.

Les mises en forme didactiques sont déjà des "pré-actions" pédagogiques. La hiérarchisation des énoncés, leur brièveté, les consignes planifiées, la façon de dire et de proposer la situation d’apprentissage, tout cela annonce une intervention pédagogique stricte pour le cas étudié ; l’obligation des gestes et les modes mécaniques d’exécution planifiés ainsi que la façon de transposer l’activité culturelle handball sont dès lors les indices sûrs de cette intervention. De l’écrit de planification transpire la future relation entre l’enseignant et l’élève ; cet écrit du quotidien montre comment les choses surviennent en éducation physique et sportive.