I - Le dialogue entre le terrain et l’écriture.

Nous rappelons qu’aucune des préparations écrites étudiées n’a été conçue en cycle entier avant intervention sur le terrain. L’analyse compréhensive confirme par ailleurs nos propos en nous fournissant les indices suivants :

*Une évolution des situations d’apprentissage faite suite aux bilans des fins de leçon.

*Une reprise de situations d’apprentissage non terminées dans la leçon précédente est faite dans la leçon suivante.

*La prise en compte des résultats des évaluations intermédiaires au niveau des objectifs de leçons et des contenus d’enseignement.

*Des ruptures dans les progressions classiques et des changements de cap en cours de cycle.

* Tous les enseignants experts handball préparent de séance en séance.

Plusieurs enseignants se sont excusés de ne pouvoir fournir un cycle idéal en invoquant le fait d’avoir préparé leurs leçons au coup par coup. Le plus souvent, les leçons d’éducation physique se préparent pour la semaine à venir, et rarement au-delà d’une quinzaine. La variété des conditions de travail plaide pour cette forme de planification, mais l’intérêt didactique et pédagogique que représente la possibilité de faire un bilan pour préparer la leçon suivante retient aussi notre attention. Le fait d’écrire devient une façon d’étudier et d’évaluer continûment, c'est-à-dire sérieusement, un enseignement renforcé par un dialogue quasiment ininterrompu entre le terrain et l’activité planificatrice.

La trace écrite permet un travail permanent de réajustement, un travail critique donc. Dans l’alternance entre préparation et intervention sur le terrain, l’écrit devient un double professionnel avec lequel l’enseignant peut tenir un discours suivi sur son enseignement et passer d’une pratique plus ou moins spontanée à une pratique plus réfléchie et améliorée. Comme l’écrit Marie-Renée Verspieren, « l’écriture en permettant de revisiter ses pratiques développe une forme d’esprit critique »302.

L’écriture du travail est au centre de l’apprentissage de la pratique éducative ; elle n’est pas un simple aide-mémoire, un pensum. Elle libère l’esprit de celui ou celle qui réfléchit pour lui ou pour elle son enseignement. La planification des intentions devient le lieu de l’élaboration d’hypothèses didactiques sans cesse vérifiées sur le terrain. Dans les réponses à notre questionnaire, les enseignants d’expérience sont justement les seuls à considérer que l’activité d’écriture peut améliorer leur enseignement même s’ils pensent d’abord que le passage à l’écrit les aide à gérer leur leçon.

Notes
302.

Verspieren, M.R., (2006). Le "tiers écrit", ou : comment amener des professionnels de "culture orale" à écrire sur leurs pratiques. In F. CROS (Éd.), Écrire sur sa pratique pour développer des compétences professionnelles (pp. 153-164). Paris : L’Harmattan. (p.158).