Sous-section 1. La définition de politiques publiques de sécurité contre le terrorisme

Depuis des ères primitives jusqu’aux civilisations modernes, l’homme s’est beaucoup efforcé pour combler son besoin de sécurité. Selon le psychologue américain Abraham Maslow 63, le besoin de sécurité doit être rempli juste après des besoins fondamentaux. Aujourd’hui, la menace est plus que jamais présente, notamment sous la forme du terrorisme, et le besoin de sécurité est d’une importance vitale préoccupant tout le monde.

Les philosophes du siècle des lumières ont souligné que le besoin d’assurer collectivement la sécurité des individus constituait la première légitimité pour la formation d’un Etat.64 Comme le terrorisme est une menace croissante visant essentiellement à porter atteinte aux droits de l’Homme, la lutte contre ce type de menace constitue la mission primordiale de tout Etat. Ainsi, la protection des droits de l’homme, des institutions étatiques et des biens est la priorité préservée dans la compréhension de sécurité de plusieurs Etats.

Depuis plus de vingt ans, la menace terroriste a eu un impact sur les politiques publiques de sécurité de plusieurs Etats, notamment celles des Occidentaux. Les événements récents, notamment ceux du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis, du 11 mars 2004 en Espagne et du 7 juillet 2005 au Royaume-Uni, ont eu à l’évidence des conséquences majeures. Au niveau national, ce type de menace a invité les responsables décideurs à une révision des concepts de politiques de sécurité. La menace a aussi poussé les gouvernements à chercher des solutions efficaces pour mieux répondre à la menace et à être plus sensible qu’avant. Ce dernier élément a facilité la mise en place de nouvelles politiques de sécurité. Au niveau international, la menace a eu pour effet une nouvelle donne stratégique non seulement pour les Etats puissants mais également pour les organisations internationales.

La lutte contre le terrorisme est aujourd’hui plus complexe. Elle se présente sous différentes images et est présente aussi bien au niveau national qu’international. Nous n’aborderons pas ici les aspects et les conséquences essentielles de mesures du domaine international. En revanche, nous chercherons à déterminer dans quelle mesure la menace terroriste impacte les données de la sécurité intérieure. Parce que le terrorisme, du côté de la police, même s’il est aussi transnational, reste encore une menace pour la sécurité intérieure.

La sécurité intérieure est aujourd’hui l’un des enjeux les plus importants pour les Etats et leurs institutions. Elle désigne, selon Maurice Cusson, « l’ensemble des méthodes, dont l’usage éventuel de la force, et des moyens déployés pour assurer la protection des personnes, des biens et des institutions contre les menaces issues de la société elle-même » 65. Cette définition nous paraît logique mais pas suffisante, car nous devons étendre à cette définition le caractère transnational de la menace terroriste. C’est-à-dire, le terrorisme est à la fois issu de la société elle-même mais également de causes étrangères.

En fait, la majorité des Etats met en place des politiques publiques de sécurité afin d’assurer la sécurité intérieure et de lutter contre le terrorisme. Sur ce point, la question essentielle est de définir une politique publique de sécurité contre le terrorisme et sa mise en place. Pour définir une politique publique, nous nous référons d’abord Yves Mény et Jean-Claude Thoenig. Selon eux, une politique publique « se présente sous la forme d’un programme d’action gouvernementale dans un secteur de la société ou un espace géographique » 66 . Dans ce sens Pierre Muller, ajoute le point suivant : «il y a une politique publique, il y a un problème à résoudre » 67 . Alors les politiques publiques sont des méthodes d’intervention des instances légitimes pour résoudre les problèmes de la société.

Dans le domaine de la sécurité, les auteurs français, tels que Sébastian Roché et François Dieu nous offrent une compréhension logique d’une politique publique valorisant les instances politiques et les dispositifs législatifs. Selon Sébastian Roché, cette politique signifie « l’ensemble des dispositions législatives et réglementaires prises pour gérer le champ de la sécurité… » 68. Pour François Dieu, elle est « un ensemble plus ou moins cohérent de décisions et de mesures prises par les instances politiques légitimes…» 69 .

Selon Xavier Crettiez, il faut trois principes pour nommer une politique publique appliquée à la lutte contre le terrorisme : « l’ensemble des actions considérées doit relever d’un même domaine d’activités… les actions entreprises par les services d’application des politiques publiques doivent s’enchaîner les unes aux autres… l’autorité publique doit être responsable des décisions prises et s’engage à les faire respecter » 70 . A partir de là, une politique publique antiterroriste pourra être identifiée selon le secteur auquel elle s’applique. Elle nécessitera une bonne coordination des services en veillant à rester au niveau politico administratif.

A la lumière de ces explications, une politique publique de sécurité contre le terrorisme peut se définir alors comme l’ensemble des mesures prises par les instances politiques, des dispositions législatives et réglementaires en intéressant les acteurs politiques, juridiques et opérationnels, destinés à gérer le champ de la lutte antiterroriste. Ce type de politique publique contient des mesures politiques, juridiques et opérationnelles en ayant des conséquences au niveau national et international.

Notes
63.

Abraham Maslow (1908-1970) est un psychologue américaine, qui a classé les besoins humains dans son article « A Theory of human motivation », art.pp.370-396, in Psychological Review, vol.50, no.4, Washington, 2002. Il a en effet remarqué que certains besoins étaient plus importants que d’autres, que certains besoins devaient être comblés en priorité par rapport à d’autres. Maslow a donc obtenu une pyramide en classant les besoins humains en cinq catégories, et en les hiérarchisant. Les besoins fondamentaux sont à la base de la pyramide, les besoins accessoires (le confort) sont au sommet. Pour les détails voir le dossier Pyramide de Maslow sur www.chez.com/deuns/ps/maslow/maslow.html

64.

DAVID Dominique, Sécurité : l’Après – New York, Paris, Presses de Sciences Po, 2002, p.9-21.

65.

CUSSON Maurice, « Qu’est-ce que la sécurité intérieure ? », 21p., Revue internationale de criminologie et de police technique et scientifique, volume LIII, octobre - décembre, 2000. L’article est accessible sur http://www.crim.umontreal.ca/cours/cri1600/prepress/cahier32.pdf

66.

Pour une définition plus large des politiques publiques, voir MULLER Pierre, Les Politiques Publiques, Paris, PUF, 2003, 127p. ; MENY Yves et THOENIG Jean-Claude, Politiques Publiques, 1989, 392p. ; MULLER Pierre et SUREL Yves, L’Analyse des politiques publiques, Paris, Montchrestien, 1998, 156p.

67.

MULLER Pierre, Les Politiques Publiques, op.cit., p. 27.

68.

ROCHE Sébastian, Sociologie politique de l’insécurité, Seuil, 1998, p.157.

69.

DIEU François, Politiques publiques de sécurité, Paris, L’Harmattan, 1999, p.30.

70.

CRETTIEZ Xavier, Terrorisme indépendantiste et anti-terrorisme en France, Paris, IHESI, 1993, p.47-48.