Entretien avec le responsable chargé des affaires de sécurité de la délégation turque auprès du secrétariat général de l’OTAN

Bruxelles, le 14.02.2006, 16h00 – 17h00

Question 1 : Quels sont les approches et les rôles de l’OTAN dans la lutte contre le terrorisme ?

Réponse 1 : À l’origine, l’OTAN est une organisation politique de défense. Le terrorisme a été mis au jour dans les priorités de l’OTAN depuis le 11 septembre 2001. Il faut dire qu’il n’y a pas un consensus des Etats membres, sur le rôle de l’OTAN dans la lutte antiterroriste. Il y a différents projets, parce qu’il y a des Etats qui veulent que la lutte antiterroriste se dirige sous la responsabilité de l’ONU ou de l’UE, ou bien, parce que ces organisations internationales disposent de projet plus larges et complexes que ceux de l’OTAN. Par exemple, l’UE dirige son projet antiterroriste dans le cadre de la sécurité intérieure et de la justice.

A peu près tous les Etats membres de l’OTAN ont eu les mêmes problèmes devant la menace terroriste. Les Etats-Unis en 2001, le Royaume-Uni depuis des années, l’Espagne ou la France. Les Etats membres européens espèrent suivre des politiques antiterroristes au sein de l’UE, voire même, si c’est possible, dans les politiques nationales. Le rôle de l’OTAN semble alors seulement comme un ajout aux politiques de sécurité nationales ou européennes.

L’OTAN a dirigé un projet politique tout au long de la guerre froide. Elle a aussi dirigé des projets afin de finir les crises dans les Balkans ou ailleurs. Pendant ces projets, elle s’est occupée de la menace terroriste religieuse : Al-Qaida. Mais en ce moment il est possible de dire que, dans les évaluations récentes, le terrorisme est l’une des menaces les plus importantes pour l’OTAN.

Question 2 : Quelle est l’attente de l’OTAN des Etats membres, de la Turquie par exemple, dans la lutte contre le terrorisme ?

Réponse 2 : L’OTAN attend que tous les Etats membres soient d’accord sur une décision de lutte antiterroriste et qu’ils soient plus actifs, parce que si chaque Etat membre est d’accord sur une décision, l’OTAN peut intervenir. La Turquie aussi assume des responsabilités comme tous les Etats membres. Par exemple, la Turquie a fondé un centre de la lutte antiterroriste à Ankara. On pense que ce centre fonctionne bien. Nous avons un grand ajout sur le plan philosophique. Le personnel des Etats membres échange les informations et les expériences pendant les séminaires et les programmes réalisés dans ce centre. Chaque Etat membre participe à ces échanges par ses meilleures méthodes et applications.

Question 3 : Quelles sont les différences dans les approches des Etats membres de l’OTAN dans la lutte contre le terrorisme ? C’est-à-dire, qu’est-ce que signifient la menace terroriste et la lutte antiterroriste pour les Etats membres de l’OTAN, une menace intérieure ou extérieure ?

Réponse 3 : Comme je vous ai dit déjà, il n’y a pas un consensus. La France qualifie la menace comme intérieure, mais les Etats-Unis voient la menace plutôt comme un problème de sa politique étrangère. Pour certains Etats membres, la lutte antiterroriste est l’affaire des services secrets intérieurs. Les Etats essayent de construire des unités de coordination, notamment pour l’analyse de la menace. Par exemple, les Anglais ont fondé une unité et les membres des différents services travaillent sous le même toit, dans un même office. Mais selon les américains, chaque service de sécurité doit préparer son analyse, et les différentes analyses permettront de mieux prendre les mesures nécessaires. Sur ce point, l’OTAN travaille comme une entreprise et elle décide selon la volonté de ses Etats membres décideurs.

Du côté de la Turquie, elle est d’accord avec les politiques antiterroristes de l’OTAN. Mais il faut être prudent. Car, lorsqu’on parle de la lutte antiterroriste, on utilise le terrorisme au sens large. Il ne s’agit pas directement des organisations terroristes comme IRA, ETA, PKK ou le Hezbollah. On parle des mesures générales.

Question 4 : Comment l’OTAN réalise ses fonctions, quelle est sa capacité de lutte antiterroriste ?

Réponse 4 : L’OTAN a deux secrétariats : civil et militaire, c’est-à-dire délégation et militaire. Il y a des points de contacts par l’intermédiaire de comités (économique, défense, scientifique etc.). La délégation s’occupe des sujets non militaires. Les unités se contactent quotidiennement sur les sujets techniques. Pour les militaires, ils s’occupent des enjeux et des capacités militaires. L’OTAN n’est pas une organisation seule. Pour qu’il y ait un consensus il faut que tous les vingt-six membres soient d’accord. Alors c’est vraiment difficile de prendre des décisions facilement. Et s’il y a une décision signée par tous les Etats membres, chaque Etat assume ses responsabilités.

De l’autre côté, l’OTAN a une capacité sur la planification et la direction de politiques de sécurité pendant les crises internationales. Sa capacité vient de la période de la guerre froide. Il réalise aussi des travaux scientifiques et techniques utilisables dans la lutte antiterroriste. En plus, il a une capacité de lutter contre les armes CBRN. Mais, il faut que tous les Etats membres décident pour l’utilisation de cette capacité. La coordination est très importante pour les fonctions de l’OTAN dans la lutte contre le terrorisme. Sur le plan opérationnel, il dispose d’un mécanisme de la défense contre la menace terroriste probable par la mer. En plus, il coopère avec les Etats méditerranéens et les Etats du Golfe.

Question 5 : Qu’est-ce qu’un Etat membre peut ajouter aux travaux de l’OTAN dans la lutte contre le terrorisme ? Par exemple la Turquie ?

Réponse 5 : Chaque Etat considère la terreur selon qu’elle est menacée. C’est pour cela qu’un Etat membre, par exemple Turquie, n’a aucune priorité. Ce qui est important pour l’OTAN c’est l’échange de l’information, comme dans le cas d’ Interpol. Les Etats transmettent leurs formations aux autres Etats par l’intermédiaire du Secrétariat général. Si un Etat n’est pas prêt à donner ou à partager ses expériences, les autres Etats n’en veulent pas. Le partage de l’information et de l’expérience change selon les volontés propres des Etats membres.

Question 6 : Si la police turque est réussie mieux dans sa lutte antiterroriste, quelles peuvent être les conséquences pour les objectifs de l’OTAN ?

Réponse 6 : Bien sûr qu’on sera content. Parce que le terrorisme est considéré aujourd’hui comme l’un des principaux problèmes de sécurité et de justice dans tous les Etats membres de l’OTAN.

Question 7 : Et vos dernières remarques ?

Réponse 7 : Finalement je peux vous dire que la menace terroriste est toujours dans la priorité de l’OTAN. Il n’y a pas une certitude en mettant en place des politiques de sécurité, parce que les 26 Etats membres ont des idées différentes. On peut parler plutôt d’un partage quand on réalise des opérations. La Turquie peut jouer un rôle important pendant la coopération avec les Etats musulmans et méditerranéens. La Turquie veut ce qui est possible. Tous les membres de l’OTAN sont aussi membres de l’ONU, alors il ne faut pas fonder de nouvelles institutions dans la lutte contre le terrorisme.

Merci beaucoup.

C’est moi qui vous remercie.