Entretien avec Gunhan AKMERIC

Commissaire principal de police, chargé au sein du Secrétariat Général d’Interpol

Lyon, le 27 avril 2007, 17h00-19h00

Question 1 : Comment trouvez-vous la participation de la Turquie (politico administrative et juridique) à la lutte antiterroriste internationale, notamment en matière de terrorisme religieux ? Si nécessaire, qu’est-ce qu’on peut faire pour une participation efficace ?

Réponse 1 : Avant de répondre à cette question, je voudrais citer une phrase de l’ouvrage du professeur turc Emre Kongar, intitulé « la terreur globale et la Turquie ». Selon lui, « il n’y a aucune autre société qui est autant menacée par les attaques terroristes ». Il est vrai que la Turquie est l’un des Etats rares qui ont souffert / sont en train de souffrir du terrorisme depuis plusieurs années. En général, la vague du terrorisme qui a commencé par l’ASALA, a continué avec les conflits droites et gauches vers la fin des années 1960, ensuite le terrorisme religieux radical et enfin le terrorisme séparatiste ont entraîné la Turquie à vivre avec la menace terroriste.

Dans cette période, on ne peut pas nier que la Turquie a pris une distance importante en matière de lutte contre le terrorisme. Notamment à partir des années 1960, elle a soutenu et participé à toutes les actions positives au niveau international, soit en faisant partie de tous les protocoles des Nations Unies en matière de lutte contre le terrorisme, soit en signant les accords bilatéraux et multilatéraux avec plusieurs Etats dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. A l’occasion de cette perspective, je trouve que la participation turque en matière de lutte contre le terrorisme est réussie. De l’autre côté, je pense que les changements d’après le 11 septembre, notamment les initiatives du Conseil de Sécurité des Nations Unies et les plans d’action de l’Union Européenne, contiennent les thèses que la Turquie défendait depuis des années, et mise en lumière la légitimité de cette dernière. Cependant sur ce point, comme dans les attaques du 11 septembre 2001, notamment le lancement des paroles relatives à faire un amalgame entre le terrorisme religieux et l’Islam est inquiétant. Comme le terrorisme n’a ni nation ni religion, il faut éviter des paroles et des actes qui donneront l’impression des musulmans comme la cible de la lutte contre le terrorisme religieux.

Question 2 : Comment évaluez-vous cette participation en matière de plan opérationnel, notamment à l’égard des services de sécurité ? Si nécessaire, comment peut-on augmenter la qualité de cette participation ?

Réponse 2 : La coordination et la co-direction sont deux matières importantes en matière de lutte contre le terrorisme. Ainsi il faut constituer des dimensions de communication fonctionnellement et structuralement correcte avec les institutions nationales et internationales. Une autre matière importante est le renseignement, et il faut le transformer mieux aux travails opérationnels. De cette dernière phrase, je trouve que les services de sécurité turcs sont réussis dans les missions de renseignements dans le cadre de « conditions juridiques existantes au niveau national » et d’« équilibres politiques internationales ». Il est certain qu’il faut penser à la lutte contre le terrorisme dans son ensemble. Comme les luttes antiterroristes intérieure et internationale font parties de cet ensemble, la prise d’une conséquence définitive est possible en cas d’unification de la lutte intérieure avec la lutte internationale.

C’est vrai, en matière de lutte contre le terrorisme, que la Turquie est restée « seule » et « intelligible difficilement » pendant de longue durée dans la plateforme internationale. Les différences « ethniques et religieuses », la position « stratégique » de la Turquie – même si ce point est discutable pour certains - sont des uns des raisons importantes. Mais en ce moment, dans les perspectives que j’ai parlé ci-dessus, je trouve également que les opérations réalisées par les services de sécurité au niveau à l’intérieur et extérieure des frontières – qu’il est discutable la source juridique des opérations en dehors des frontières nationales- sont réussites et correctes.

Question 3 : Qu’est-ce que vous pensez sur la participation de la police turque dans cette lutte ? Qu’est-ce que vous proposez pour une participation active de la police turque, notamment dans le cadre des missions internationales d’Interpol, d’Europol, des Nations Unies ou d’Europe ?

Réponse 3 : Même si la participation de la police turque à la lutte antiterroriste internationale est efficace dans les conditions présentes, je ne trouve pas qu’elle est assez suffisante. Le manque de l’organisation des unités de la Police turque à l’étranger est la principale raison pour une telle insuffisance. De l’autre côté, j’observe que la participation de la Police turque aux congrès, séminaires, travaux, réunions etc. relative à la lutte antiterroriste internationale n’est pas suffisante. Je crois qu’il faut consacrer un budget et assurer une participation efficace avec les équipes spécialistes de ces plateformes afin de mieux échanger l’information, de mieux comprendre les stratégies relatives à la constitution des plans d’actions. De plus, il me semble important de préciser qu’il faut placer le plus de policiers turcs possibles pour une longue durée, notamment dans les unités de la lutte antiterroriste des organisations internationales telles qu’Interpol ou Europol.

Question 4. Une dernière question... Qu’est-ce que vous pensez de la participation de la Police turque à la lutte antiterroriste d’Interpol ? Quels sont vos idées et vos conseils ?

Réponse 4 : Les événements du 11 septembre 2001 ont entraîné, comme dans les autres organisations internationales, une mobilisation, des priorités et des élans. Cette année-là, le développement du département de la lutte antiterroriste a été une priorité et les fondements d’une unité, qui donne un service 24h/24 aux Etats membres, ont été mis en place. La Police turque a envoyé un personnel spécialiste au secrétariat d’Interpol en 1998. Grâce aux travaux réussis et les relations personnelles de notre personnel, les travaux turcs relatifs à la lutte antiterroriste au niveau international ont été bien saisis par Interpol. Grâce aux rapports d’évaluation préparés par notre personnel, Interpol a bien saisi l’organisation, le fonctionnement, les relations et les activités internationales des organisations terroristes turques de toutes motivations –séparatiste, révolutionnaire et religieuse–, et la lutte antiterroriste policière turque. Comme je vous ai déjà dit, l’augmentation du personnel turc dans ce type de départements sera certainement en faveur de la Turquie et de la police turque.

Je vous remercie pour ces informations bénéfiques et sincères.

C’est moi qui vous remercie et vous souhaite bonnes chances pour votre travail.