Première partie : Gracq et l’invention de l’espace

Nous nous proposons d’étudier tout d’abord le système onomastique qui permet de définir les différents éléments diégétiques. Les règles de la composition des toponymes et des anthroponymes nous intéressent, car elles donnent une vision préliminaire de l’univers gracquien. Elles révèlent un projet poétique et disent la volonté de créer un monde imaginaire autant dans son contenu que dans sa forme. Par une étude sur la forme topographique et géométrique, nous essaierons de mettre en relief les structures de l’espace fictif. La description spatiale met sous nos yeux un réseau lexical appartenant à la science géographique, tout en décelant le secret de cette passion des espaces. Celle-ci provient en effet des études de géographie et de l’amour des voyages. L’écrivain, qui a voyagé dans tout l’Europe et aux Etats-Unis, ne se retient pas d’imprégner son écriture de son expérience personnelle et de son activité professionnelle.

Le style figural de Julien Gracq fait du texte le lieu de l’expansion des figures de style. C’est pour cette raison que toute lecture doit être un parcours des figures qui donnent à voir l’image que le créateur aime à accorder à son monde inventé. Celle-ci montre que la physionomie de l’univers gracquien prend l’homme comme modèle pour se manifester. Nous nous attardons dans le troisième chapitre aux figures organiques où le projet poétique de « la plante humaine » semble articulé d’une manière harmonieuse à la représentation de l’espace. Nous allons voir que Gracq cultive une poétique de l’anthropomorphique où l’homme et le monde se rencontrent sans obstacle.