2-4 Maremma

Le toponyme trouve un rapport graphique dans la série onomastique d’Orsenna et du Farghestan. La conjonction des lettres A, R ainsi que leur position le rapprochent phonétiquement du Farghestan, tandis que les graphèmes : E intérieur, A final, partagent la même position que ceux d’Orsenna. Le nombre de ses lettres présente une équivalence avec cette dernière. Nous pouvons alors dire que Maremma est le point de croisement de ces deux pays. Campé sur une lagune, la ville est une francisation du mot italien « maremma » qui désigne un terrain marécageux en bordure d’un littoral. L’onomastique trouve sa signification dans les caractères géographiques du lieu qu’il désigne. « Marais », « lagune » sont les lieux constitutifs de la ville.

Maremma forme autour d’elle une série paragrammatique essentielle qui s’enracine dans sa graphie et qui joue un rôle important dans la diégèse. La ville fait entendre un bruit qui capte l’audition :

‘« Un faible et profond murmure entrait par les fenêtres, peuplait maintenant le silence […] Sur le front de mer, les premières façades de Maremma […] sortaient vaguement de l’ombre. […] une rumeur plus lointaine immobilisait ces faces de pierre. […] les rouleaux de vagues gonflés par la marée déferlaient en paliers phosphorescents de neiges écumeuses, […] une nappe aveuglante venait se défroisser à mes pieds même sur les eaux mortes »51.’

Le texte unit tous les paragrammes topographiques qui désignent effectivement le toponyme dans le récit : « marée », « mer », « marécage ». Et il définit la source du bruit que la ville ne cesse de faire entendre : « rumeur », « murmure », considérés comme des paragrammes préfigurés dans sa graphie. La rumeur de la ville vient répondre à celle de la mer, tout en indiquant le lieu d’origine des bruits, qui est sans doute le Farghestan, absent du texte. Ville de marais, Maremma bourdonne comme un marécage dont Aldo voit dans le murmure, interprété comme la poussée d’une « fièvre des marées », une manifestation de la « haute marée émotive qui submergeait Maremma »52. C’est par ce biais que le toponyme dessine le rapport entre les deux pays adversaires.

Notes
51.

Le Rivage des Syrtes,p. 644.

52.

Ibid.,p. 808.