2- Références citationnelles

Lorsque le récit est fabriqué autour d’une énigme et ne possède pas d’intrigue proprement dite, à part des allusions indirectes à des événements disparates, comment continue-t-il à intriguer les lecteurs ?

Dans un entretien accordé à Jean-Louis Tissier, Julien Gracq affirme avoir eu le goût pour les cryptogrammes. Cela explique sans doute sa préférence de l’énigme qui envahit presque tous ses écrits romanesques. Mais cela ne signifie pas que le romancier laisse son texte baigner dans une ambiguïté totale. Au contraire, il fournit des clés qui permettent de le déchiffrer. L’intertexte semble chargé de cette mission ; il est le complément de ce qui manque au texte. Autrement dit, l’ambiguïté qui représente un obstacle à la compréhension est décodée par le texte extérieur. Ce dernier lève l’obstacle empêchant la progression narrative et soutient le lecteur dans sa démarche de lecture. C’est donc l’écriture qui constitue l’élément de l’attraction. Elle manifeste l’originalité créative de l’écrivain d’avoir couvé plusieurs écritures pour faire éclore un texte métis. En plus, le créateur n’hésite pas un instant à exprimer, en plusieurs occasions, sa reconnaissance de la littérature des précédents. Elle est un point de support pour envisager l’activité de l’écriture :

‘« Je pense – et j’ai écrit – que tout livre pousse (en bonne partie) sur d’autres livres. Le besoin chimérique, qui démange beaucoup de créateurs de ne sentir redevables en rien à la littérature qui les a précédés, ne m’obsède en aucune façon. Le monde et la bibliothèque font partie à titre égal des éléments auxquels je me réfère, quand j’écris, et je ne ferai jamais preuve d’aucune fausse honte à ce sujet »690 avoue Gracq.’

Elément de décodage, l’intertexte apparaît comme un socle de l’écriture gracquienne. Notre attention va maintenant repérer des passages considérés comme des références citationnelle.

Notes
690.

GRACQ, Julien. Entretien avec Jean Carrière. op. cit., p. 1249.