Conclusion générale

L’espace et ses différents aspects sont largement présents dans l’œuvre romanesque de Julien Gracq. Il suffit de jeter un coup d’œil rapide sur les titres de ses ouvrages pour en mesurer l’importance. La description des lieux et du paysage devient l’objet dominant de ses écrits. Elle interpelle le lecteur qui s’interroge sur l’enjeu de la description spatiale dans les romans de l’écrivain. Celle-ci n’est plus en effet un élément secondaire dans la génétique du récit, elle s’avère au contraire un principe fondamental de sa constitution, tout en occupant son premier plan. C’est elle seule qui prend en charge la mission de relater l’histoire par la mise au jour de certains faits naturels considérés comme des signes prémonitoires. La description se substitue donc à la narration. Raison pour laquelle le rôle des personnages en tant qu’actants se voit diminué. En termes plus précis, il n’y a plus d’événements proprement dits. Le lecteur emporté par l’avidité de connaître la fin ne peut pas sauter certains passages de la description. Il doit les suivre tous, car ils sont porteurs d’informations.

L’espace et ses éléments constitutifs ont donc été l’objet de notre étude. Outre qu’ils construisent l’espace romanesque, ils esquissent les caractères de l’espace rêvé de l’écrivain. Pour donner une justification raisonnable à ce processus d’écriture, l’écrivain a placé son personnage dans un lieu non commun. Toutes les fictions gracquiennes s’ébauchent par un mouvement, c’est-à-dire par un personnage en voyage. La description des lieux non familiers et du paysage étranger devient dans ce cas évidente, elle concerne aussi la surface de la terre. Le voyageur décrit en mettant les perceptions sensorielles en éveil, parce que ce sont les cinq sens qui assurent la connaissance et la découverte. En marchant, il jette son regard sur le monde extérieur et décrit subtilement les éléments de sa configuration. Rien ne lui échappe, la marche et le déplacement d’un point à un autre lui permettent de bien les repérer. La description n’est pas gratuite ; elle prend une place dans l’instauration de l’histoire. Nous pouvons dire que l’espace ne se réduit jamais aux décors de l’œuvre. À l’opposé, il produit de la fiction, d’où le grand intérêt accordé à sa description. Celle-ci paraît riche des termes qui appartiennent à différents champs lexicaux : la littérature, l’art et la science. Tous ces champs se combinent, en constituant le texte tel qu’il est présenté dans son état publié. Nous nous sommes intéressée à la valeur que chaque terme prend dans l’élaboration du récit : soit sur le plan diégétique, soit sur le plan structurel. Nous avons procédé dans un premier temps à une démarche descriptive et la représentation de l’espace dans les romans de l’écrivain a été notre point de départ. Nous nous sommes arrêtée sur la nomenclature de la description spatiale. Ce procédé permet à la fois d’apprécier la manière dont Gracq présente l’espace et de déceler les secrets de son style.