3.4 L’information/communication en agriculture

Jamais dans l’histoire des hommes le savoir n’a occupé une place aussi stratégique Ghersi Gérard108. Les pays riches ont bien compris qu’ils devaient investir dans la gestion des « savoirs » et dans le capital humain. Ils ont également pris conscience de l’importance qu’il fallait accorder à l’intégration des connaissances au sein des processus de production et du rôle que pouvaient jouer dans cette «dynamique de transfert» les moyens de communication (Technologies de la Communication et de l’Information).

L’apparition d’une agriculture des savoirs, Shah M.-M.109, dans laquelle les connaissances et la maîtrise des technologies sont des conditions essentielles de réussite. Dans ce type d’agriculture, l’information est un intrant, au même titre que les engrais ou les produits phytosanitaires. Par rapport à cette donnée, les pouvoirs publics en Algérie doivent se mobiliser pour mettre en place un système d’information en mesure de répondre au défi de la sécurité alimentaire qui se pose avec acuité.

Sur le plan mondial, Giovannetti Jean-François110 note, « que les nouvelles technologies de l’information et de la communication constituent un champ d’investissement à part entière pour le secteur du développement rural et de la coopération internationale qui le sous-entend ». Dans les thèmes de réflexion développés durant le premier forum européen de la recherche agricole pour le développement, les nouvelles technologies de la communication et de l’information sont placés sur le même plan que, la gestion des ressources génétiques, les biotechnologies ou encore l’agro-écologie et la gestion des ressources naturelles. L’information et la communication sont reconnues comme des composantes essentielles du processus de développement dans la mesure où il s’agit de donner à l’exploitant agricole des moyens d’évoluer en devenant un partenaire social important, pour mieux défendre ses intérêts, pour produire davantage, et enfin de mettre à la disposition des organismes chargés de la vulgarisation et aux décideurs les informations nécessaires, de façon à relier les processus de prise de décision à tous les niveaux.

Dans le secteur agricole algérien, les compétences liées à l’information sont limitées, c’est un facteur de frein majeur. Cette situation a des conséquences négatives pour les secteurs de la recherche, de la formation et de la vulgarisation, particulièrement, face aux mutations importantes que connaît le monde rural. Le rôle des acteurs du monde agricole a évolué. Les agriculteurs en plus d’être producteurs, ils doivent avoir des compétences de gestion, s’impliquer davantage dans le processus de prise de décision. Cette situation influe considérablement sur le rôle primordial que l’information et la communication sont appelées à assumer, sur la nature, les besoins et les attentes en matière d’information et de communication. D’autre part, certaines données nous rappellent que le secteur de la vulgarisation, pour différentes raisons, n’a pas joué le rôle qui lui est assigné. Les données du recensement général de l’agriculture relatives à l’environnement socio-économique, précisent que 2% des exploitations agricoles tiennent une comptabilité conforme aux règles en la matière. 9% d’entre elles ont accès au crédit111 octroyé par des particuliers. Ces chiffres montrent que les mécanismes de crédit ne sont pas maîtrisés par les producteurs, les recouvrements sont donc difficiles. Les difficultés multiples relevées attestent que les pouvoirs publics n’ont pas assigné un rôle stratégique à l’information dans les programmes de développement agricole et rural. Dans les pays développés, la gestion de l’information et des technologies qui y sont liées est au cœur de l’exécution de la politique agricole du pays. L’existence d’un système d’information efficient aurait certainement eu un meilleur impact sur l’utilisation des aides de l’état, du crédit bancaire, du recours aux données scientifiques et techniques à même d’améliorer la production, les rendements et le niveau socio-économique de l’agriculteur. Cependant, quelque soit le système d’information et de communication mis en place, il ne pourra aboutir à des résultats probants auprès d’une population dont la majorité souffre d’analphabétisme.

En effet, l’alphabétisation est une composante essentielle du développement. Sans un niveau d’instruction, il est difficile de demander aux paysans d’adhérer aux décisions politiques, économiques et sociales que le gouvernement met en œuvre. La réponse à ce problème consisterait sans doute à mettre en œuvre un programme d’alphabétisation ou les jeunes agriculteurs et les femmes auront une place de choix. L’alphabétisation est une porte qui permet à l’agriculteur de s’ouvrir sur le monde, et l’information et la communication en sont les moyens d’y parvenir. Sur un autre plan, pour amener les décideurs à soutenir leur action, les acteurs impliqués dans la gestion des systèmes d’information devraient mettre en œuvre régulièrement des programmes visant à mettre en relief l’importance des produits et services d’information dans l’accroissement de la production et de l’amélioration de la productivité et les coûts qui y sont investis ont un impact positif sur le système agricole.

Notes
108.

Ghersi Gérard. Les nouvelles technologies : outils et méthodes. Options méditerranéennes. Série A, n° 36, 1999. (Page consultée le 11 avril 2005)

Adresse URL : http://ressources.ciheam.org/om/pdf/a36/C1990738.pdf

109.

Shah M.M. Global know bye system for food security : information, initiatives in agricultural research : enhancing global cooperation. Rome, FAO, 1999

110.

Giovannetti Jean-François. Les réseaux et les modalités de partenariat dans le domaine de l’information et la communication pour le développement agricole et rural des pays ACP. Séminaire sur le développement de l’information agricole et rural dans les pays ACP. Paris, 29 mai- 2 juin 2000, p. 250

111.

Algérie. Ministère de l’agriculture et du développement rural. Recensement général de l’agriculture (2001) : rapport général des résultats définitifs. Direction des statistiques et des systèmes d’information, 2003. p.44