2.1.1 L’usage comme processus de médiation en communication

Dans le contexte du secteur agricole, La diffusion de l’information aux agriculteurs, qu’il s’agisse de documents écrits ou audio-visuels s’effectue sans référence à l’usage qui en est fait. Même si le premier souci du vulgarisateur demeure toujours l’accessibilité physique, et considérant qu’elle soit acquise, il en est moins sûr pour ce qui est de l’accessibilité intellectuelle. Car pour que l’agriculteur puisse comprendre le contenu des documents mis à sa disposition, le système de vulgarisation qui est «l’émetteur » et l’agriculteur qui est le « récepteur » doivent se situer dans un même cadre de référence. D’ou la nécessité d’étudier les attitudes, les pratiques et usages pour le déterminer. A ce propos, Poissenot Claude et Rangard Sophie affirment que « Les usagers professionnels sont modelés par leur profession dans leur rapport à l’information. Il faut alors s’intéresser à la manière dont ils respectent, contournent ou négligent le rapport spécifique à l’information en vigueur dans leur environnement, les usagers dans cette logique sont, le plus souvent, tendus vers un objectif précis… Ils vivent leur demande comme un besoin. Par ailleurs, ces usagers professionnels privilégient l’accès direct aux documents et apprécient de trouver les articles en plein texte plutôt que les références »198.

Dans le cas des agriculteurs, l’usage autonome des documents nous semble a priori complexe, compte tenu, de leurs niveaux d’instruction. En effet, confronté à un problème donné qui exige une réponse rapide, l’agriculteur favorise plutôt une pratique consommatoire de l’information. Il ne prend pas le temps de sélectionner l’information qui lui permet d’apporter des solutions à son problème, mais il souhaite être accompagné dans ce processus de repérage de données utiles, d’où la nécessité de tenir compte d’une mise en forme du document qui favorise un accès rapide au texte.

Khiati Mohamed199, notent au passage que « les systèmes de l’accumulation des expériences et de la communication des données et de l’information, déterminent la manière dont les connaissances se développent dans les communautés « paysans ». Cela implique la nécessité d’examiner en détail les connaissances réelles du système pour être en mesure de choisir les instruments d’intervention les plus appropriés ». La réflexion autour des usages pourrait constituer un cadre théorique pour les vulgarisateurs afin de construire une démarche d’accompagnement adaptée. Dans le domaine de la communication de l’information, la nécessité d’une médiation réfléchie en terme d’usage permet de renouveler l’offre sous une forme moins standardisée. La diversité de la population d’agriculteurs implique des produits et services différenciés.

Le choix des supports de communication est un enjeu important pour la gestion de l’information et de la communication. Les spécialistes du domaine, affirment que la communication repose sur des éléments complexes : la catégorie socioprofessionnelle des usagers, leur culture, l’environnement socioéconomique, culturel… Pour les pays émergents, dont l’Algérie, une autre préoccupation, non des moindres, se rajoute, c’est la question de l’analphabétisme. Bédrani Slimane, affirme à ce propos, « que l’efficacité de la vulgarisation dépend donc d’abord du degré de formation, et d’information des agriculteurs. L’apprentissage d’un savoir-faire ou d’une technique est d’autant plus rapide que celui auquel il s’adresse est préparé à recevoir par ses connaissances générales et particulières, qu’il est capable de l’approfondir au moyen de documents écrits », il conclut que « l’alphabétisation des agriculteurs et la scolarisation de leurs enfants est un investissement important à long terme» 200 .

La combinaison de plusieurs types de médias et de supports pourrait être une démarche adaptée. Par ailleurs, l’utilisation des technologies de l’information et de la communication rationalise les activités de traitement et de transfert de l’information. La mise en œuvre de systèmes d’information intégrant les TIC doit être réfléchie en complémentarité avec les outils traditionnels. Nous essayons, dans ce qui suit, de connaître les outils de communication en milieu rural, en définir les concepts pour disposer d’un cadre de référence et d’analyse nécessaire à notre travail.

Élaborer une stratégie de communication, c’est définir des options autour desquels doivent être articulées des orientations porteuses. Pour cela, il est impératif de faire des choix d’outils de communication les plus adaptés au contexte d’usage des destinataires.

Notes
198.

Poissenot Claude, Ranjard Sophie. Usages des bibliothèques : approche sociologique et méthodologique d’enquête. Villeurbanne, Presses de l’Enssib, 2005, p. 256

199.

Khiati Mohamed. De la communication en général et de la vulgarisation en particulier. Alger, Ed. Interimages, 2003, p. 33

200.

édrani Slimane. La vulgarisation au Maghreb : essai de synthèse d’un séminaire.

(Page consultée le 05 avril 2005). Adresse URL. http://ressources.ciheam.org/om/pdf/co2-1/93400066.pdf