II.1. Evénement-monstre et événement-monde

Le 11-Septembre s’impose comme un événement-monstre par son caractère exceptionnel et son imprévisibilité. Il s’impose aussi, comme le propose l’historien Jean-François Sirinelli, comme un « événement-monde ». C’est que l’événement n’est pas aussi inouï que le discours du direct le laisse notamment penser. Il est, aussi et surtout, l’illustration de la convergence de « l’instantanéité permise par le progrès technique » et de « la dilatation géographique produite par lui »621. Il est le fruit de la convergence d’une technique télévisuelle puissante qui permet de maîtriser le direct et de la prise en compte par les terroristes des logiques médiatiques contemporaines.

Qu’il soit « monstre » ou « monde », l’événement s’inscrit dans un réseau constitué par l’ensemble des occurrences portées à la connaissance du public. « Le fait d’être un événement parmi d’autres appartient à la nature de l’information », indiquent Maurice Mouillaud et Jean-François Tétu622. L’événement est structurellement solidaire de l’ensemble des autres événements : c’est le système de l’information. Au cœur de celui-ci, l’événement 11-Septembre est exceptionnel car il bouleverse l’espace de l’information et macule « la carte des événements »623. Certes, par son caractère extraordinaire, le 11-Septembre gagne une autonomie dans le temps du direct mais celle-ci se dilue aussitôt dans les liens qui se tissent entre lui et les autres événements, proches ou lointains, passés et futurs, similaires ou non. Bref, le réseau des événements est traversé (et reste traversé) par le 11-Septembre.

Notes
621.

SIRINELLI, Jean-François, « L’événement-monde », Vingtième siècle, n°76, p. 35-38, 2002, p. 36

622.

MOUILLAUD, TETU, 1989, p. 22-23

623.

idem