6.1.2. Séance 07A, effet d’une décision rétro-interactive

Deux jours plus tard, l’enseignante retrouve la classe A, pour la septième séance, après son échec à montrer qu’il n’y a qu’un sens de passage pour le courant en utilisant un moteur (cf. figure 6.2, 10_S06A). L’enseignante change d’activité et passe à l’activité de la DEL dans le but de caractériser le sens du courant électrique. Comme dans la 11_S05B, après que les élèves aient fait l’activité et conclu que le courant a un seul sens, l’enseignante passe à l’indication du sens du courant électrique en se basant sur le symbole de la DEL (figure 6.2, Détermination du sens du courant électrique à partir de la DEL).

Une fois que le symbole de la DEL est présenté (transcriptions 6.8 et 6.9), l’enseignante passe directement à l’insertion de l’invention qu’elle avait faite lors de la séance 5B (transcriptions 6.10 et 6.11).

Elle passe du monde des théories et des modèles (figure 6.2, transition A1) aux liens entre les deux mondes (figure 6.2, transition A2). Nous remarquons ici l’effet de la progression de la séance 5B sur le discours de l’enseignante dans la classe A. Une fois que les deux éléments de la correspondance sont prêts, elle passe à la liaison entre l’objet et son symbole. L’enseignante effectue une liaison entre le monde des objets et des évènements et le monde des théories et des modèles (transcriptions 6.10 et 6.11, ci-dessus).

Ce n’est qu’à ce moment là (transcription 6.12) que l’enseignante détermine le sens du courant électrique en se basant sur le symbole de la DEL (figure 6.2, transition A3).

Quand elle prononce les mots « le sens de la flèche [sur le symbole de la DEL] (transcription 6.12, 5) vous indique le sens du courant », c’est-à-dire quand elle termine son explication, les élèves poussent le même « aaah ! » (transcription 6.12, 6) que les élèves de la classe B quelques jours auparavant.

L’insertion de cette invention provient d’une décision rétro-interactive de l’enseignante qu’elle prend sous l’effet de ce qui se passe lors de la séance 5B. Il est important de souligner ce glissement et cette restructuration dans le discours de l’enseignante par rapport à la séance 5 de la classe B. La décision qu’elle avait prise lors de la séance 5B d’introduire la correspondance entre l’objet et le symbole, nous la voyons ici (dans le passage de la séance 7A) complètement intégrée dans son discours sur le savoir enseigné. La durée de l’indication du sens du courant électrique dans la classe B est de 3 minutes 25 (figure 6.2, transition B1 à la transition B4) alors que la durée de sa présentation dans la classe A est de 2 minutes (figure 6.2, transition A1 à la transition A3). L’enseignante a reconstruit son discours dans la classe A lors de ce passage.

En conclusion, ce que nous venons de présenter dans cette partie, est l’effet retro-interactif que peut avoir une décision prise dans une séance d’une classe sur une séance d’une autre classe. Cette analyse a pour but de souligner l’articulation et la structuration dans le discours d’un enseignant d’une classe à une autre. Elle met en évidence une transformation au sein d’un contenu non prévu que l’enseignante décide de présenter. La logique de structuration et l’organisation que fait l’enseignante consciemment ou inconsciemment de son discours en alternant entre les deux mondes des théories et des modèles et des objets et des événements sont différentes d’une classe à une autre. L’analyse en épisode nous permet de voir un aspect de cette différence. Le déroulement d’une classe est forcement affecté par le processus d’enseignement global. Un enseignant va modifier la façon dont il installe le savoir dans une classe en fonction de ce qui lui arrive dans n’importe quelle classe.