II.3.3.2.3 Mouvement effectif imparfait

Il y a un troisième cas de figure, qui du point de vue de la constitution du psychique pourrait être le plus intéressant. En effet, le mouvement de l’organisme dans le monde n’est pas nécessairement exhaustivement anticipable – et ce d’autant moins qu’il s’agirait d’une motricité complexe. En effet, la réalité peut « accrocher » le mouvement et le faire dévier de son cours prévu. C’est le cas à chaque fois qu’un mouvement rencontre un obstacle dans le monde. D’une part, cette déviation ne sera pas atténuée et pourra émerger comme une activation somatosensorielle positive; de l’autre, l’écart entre le mouvement espéré et le mouvement effectivement réalisé fera émerger un manque à agir – notamment, le manque à agir qui serait capable de résorber le fragment d’atténuation prévu mais non rencontré. Il s’agirait alors d’une activation somatosensorielle négative.

Reprenant le cas des mouvements oculaires, les copies d’efférence ne peuvent atténuer que la motricité anticipée. La façon non anticipée dont la cible « accroche » la motricité oculaire ferait émerger à la fois une activation somatosensorielle non atténuée, positive, et un manque à agir, c'est-à-dire un manque de résorption de l’atténuation somatosensorielle ou une activation somatosensorielle négative. Ce troisième cas de figure montre bien que le caractère inanticipable d’un mouvement n’est pas en tant que tel un critère d’agentivité extérieure en contrepoint de ce que prétendent certaines théories sensorimotrices sur la fonction d’atténuation. En effet, dans ce troisième scénario la non-atténuation est conséquence du fait que dans la perception, ou dans le mouvement, et bien que ces mouvements soient initiés à partir de l’organisme, quelque chose de l’ordre du monde extérieur a fait accroc, quelque chose s’est inséré.