Packs touristiques

Les touristes qui viennent dans la Chapada Diamantina avec une agence de voyage (ou qui achètent un « pack » sur place), vivent de façon différente la randonnée pédestre et sa préparation. En effet, toute l’intendance et l’organisation est faite en coulisse, à leur place. Après avoir choisi le menu de leurs activités, souvent par Internet, ils n’ont plus rien à gérer. Ils quitteront São Paulo avec la certitude qu’il n’y aura pas d’imprévus, d’autant qu’avant le voyage, l’agence aura délivré un document où figure une liste du matériel indispensable au bon déroulement des activités : bonnes chaussures, chapeau, crèmes solaires… S’ils partent en avion, comme ce fut le cas pour les personnes avec qui j’ai passé cinq jours en excursion, un chauffeur viendra les chercher pour les amener jusqu’à la pousada qui leur a été réservée.

À la gare routière, les vans des agences attendent leurs clients à la sortie du bus. Certains marcheurs choisissent de commencer tout de suite les activités et ne font qu’un petit tour dans le village. Ainsi, à 6h du matin, alors que j’attendais pour assister à l’arrivée du car, je discutais avec un guide qui devait accueillir des clients pour les emmener tout de suite sur le sentier de la Fumaça por baixo (la promenade que j’ai faite avec H2 et H3) : « il y en a qui ne veulent pas passer un jour dans la ville, pour eux c’est marche marche marche ! 100% nature ! Mais ils sont rares ceux qui font ça ». Dans ces conditions, un minimum de temps est consacré à la préparation de la marche. Tout est organisé à l’avance par l’agence, de façon à répondre aux demandes des randonneurs.

Généralement les packs permettent aux touristes de faire un « tour ». Ainsi, sur cinq jours d’excursion, mes interlocuteurs ont dormi deux nuits à Lençóis, deux nuits au Capão et deux nuits à Mucugê. Durant les marches que nous faisions en journée, ils transportaient les quelques affaires dont ils avaient besoin dans un petit sac à dos et ne se souciaient pas de l’intendance. Si nous ne mangions pas à une table (chez l’habitant ou bien dans un restaurant), des lunchs nous étaient servis par le guide, lui-même ravitaillé par un service interne de l’agence. Durant ce périple, nous prîmes souvent la voiture, soit pour nous rendre aux départs des marches, soit pour visiter plusieurs « sites naturels » dans la même journée. Un chauffeur nous laissa par exemple au départ d’une promenade dans le village du Capão, et vint nous chercher dans celui de Guiné en fin de journée. Il avait récupéré nos bagages à la pousada du Capão le matin, vint nous chercher à Guiné le soir et nous amena à Mucugê pour passer la nuit. Ainsi, certains jours nous parcourûmes plus de 200 km en voiture.

Il me semble que cette modalité touristique est proche de celle où les marcheurs dorment sur les sentiers. Elle dénote cependant un autre niveau social, car elle est beaucoup plus onéreuse et beaucoup plus luxueuse (qualité de la nourriture, standing des pousadas, formation des guides…). Elle demande aussi moins de matériel spécifique (tente). Si mon questionnement me permet de la considérer avec le même regard que les autres excursions, il faut cependant garder présent à l’esprit que j’ai relativement peu fréquenté cette classe sociale à São Paulo, et que je n’ai pas réalisé d’autres marches avec des personnes issues de ce milieu. Mon expérience est donc suffisante pour affirmer que les points communs entre les deux types de pratiques sont assez importants pour ne pas diviser la pratique brésilienne en sous-catégories, mais elle est insuffisante pour affiner l’analyse et repérer des écarts plus significatifs. Il me semble important de noter que cette modalité peut être préférée par les « parents» d’une classe sociale, alors que leurs enfants, lorsqu’ils commencent à voyager seuls, peuvent choisir la modalité moins luxueuse et moins confortable. Les personnes avec lesquelles j’ai marché selon cette modalité, se situaient entre le haut de la classe moyenne et le bas de la classe supérieure.