1.1.1 Sémantique 

La personnalité au sens large englobe les notions de caractère, tempérament, attitude, style de comportement et aptitudes. Ces aspects font partie d’une même entité. La personnalité est à la fois innée et acquise voire en partie apprise. À partir du tempérament, on aborde plutôt le versant inné alors que l’environnement agit sur les aptitudes, le comportement, le caractère et les attitudes (Figure 1).

Le caractère représente le versant expressif d’une personnalité, ce qui se voit ; il se compose de traits qui comportent eux-mêmes un versant inné et un versant acquis-appris. Dans la littérature, le caractère correspond à la désignation française du terme générique anglo-saxon « personality ».

Mc Crae discute cette acception du concept de personnalité comme entité englobante du tempérament (inné) et de l’expérience (acquise/apprise) (Mc Crae 2000). Pour lui, il n’y aurait pas de distinction claire entre tempérament et personnalité. Pour notre part, nous adoptons un point de vue médian, nous n’adhérons pleinement à aucun des courants, sans toutefois en réfuter aucun. Pour nous, trois dimensions s’imbriquent :

  1. le tempérament est la constante de base (innée) ;
  2. le caractère est plus une manifestation circonstancielle, évaluable sur les comportements de socialisation (aspects psychoaffectifs des relations avec l’autre : famille et vie sociale). Il est en fort appui sur les traits (partie droite de la Figure 1).
  3. La cognition concerne les acquisitions/apprentissages, en appui sur les aptitudes innées ou acquises en relation avec la personnalité et le système émotionnel et volitifLe système volitif ou volitionnel traite des facteurs liés à la volonté.

Ces dernières années, de nombreux auteurs confirment la superposition des champs évoqués par Mc Crae. Une nette continuité entre tempérament et traits de personnalité a été démontrée par Caspi en 2003 sur 934 sujets observés à l’âge de trois ans puis à l’âge de 26 ans. Il établit un lien entre le type de tempérament observé pendant l’enfance et le profil de personnalité évalué à 26 ans : cette étude met en évidence une certaine continuité des conduites par rapport à la personnalité initiale de l’enfant et son extension jusqu’à l’âge adulte, en passant par l’ancrage sur le tempérament, et par le potentiel d’adaptation (Caspi and Harrington 2003).

Nous rejoignons l’avis déjà ancien d’Allport, pour qui la personnalité est précocement repérable au cours du développement à partir du tempérament qui serait une base constitutionnelle, qui s’active dans des types (exemples : le tonique, le calme….), à travers les conduites. La personnalité reste stable dans l’espace et le temps. Cependant, la stabilité va de pair avec une certaine flexibilité des traits, d’ordre circonstanciel (Allport 1937). Autrement dit, pour nous, la personnalité observe une fixité au sein de la dynamique du caractère.

L’attitude en psychologie, à la différence d’un comportement ou d’une conduite, ne se voit pas. C’est un construit, un état mental et neuropsychologique de préparation à répondre. Certains auteurs parlent de disposition d’esprit, (attitude mentale en amont des comportements) compatible avec l’ancrage sur l’expérience vécue. L’attitude influence l’orientation des réponses futures à toute situation s’y rapportant. L’attitude comprend à la fois le manifeste et le latent, le conscient et l’inconscient. L’attitude se distingue du trait de caractère, elle est bipolaire (pour ou contre). Les attitudes sont acquises et subissent les effets d’influences externes. Selon Moscovici, l’attitude est construite comme un système regroupant trois fonctions :

  • fonction cognitive ; l’attitude imprime une direction au jugement et à l’activité de connaissance,
  • fonction énergétique ; l’attitude motive l’individu,
  • fonction régulatrice ; l’attitude est un système psychique qui intervient entre les « entrées » et les « sorties » de l’information, donc dans les échanges avec le milieu et avec autrui.

Le comportement est un phénomène psychophysique visible, ancré sur des bases innées ou non de la personnalité. Il est largement imprégné d’une expérience vécue : notion de substrat mémoriel vécu 10 (Jacquet-Andrieu 2001 & 2007). Il découle de phénomènes perceptifs dont l’incidence induit un comportement cognitivo-conatif, directement lié à la personnalité du sujet. Un même comportement n’est pas toujours l’expression d’un même trait. Par exemple le comportement impulsif peut revêtir un versant antisocial, sans prise en compte de ses conséquences, et être alors corrélé au psychoticisme11 alors qu’il peut être corrélé à l’extraversion, avec la prise en compte de la conséquence des actes. On voit alors qu’une même conduite, du fait d’étiologies différentes, n’est pas le symptôme d’un même trait de personnalité. C’est en ce sens que la mesure d’un comportement par une échelle de comportement est une simplification parfois abusive qui peut prêter à confusion.

Le style de comportement humain directement observable est considéré comme un élément de cohésion de la personnalité elle-même : il se manifeste de la même façon dans un grand nombre de situations et d’actions et il présente une forte stabilité intra-individuelle dans un même groupe d’appartenance sociale (cohérence des comportements).

Le Tempérament est un répertoire comportemental qui permet de prédire un événement.

Synthèse :
La personnalité est la structure psychologique du sujet qui développe des formes caractéristiques de conduite au cœur de sa vie sociale
À chaque instant de la vie, chacun ajuste ses systèmes d’action en fonction d’un vécu et d’un schéma d’habitudes, réactionnels et réfléchis, en harmonie avec les exigences présentes de l’environnement.
C’est pourquoi tout en restant dans un continuum, des évolutions demeurent toujours possibles sans pour autant relever du changement.

Figure 1 : Composition de la personnalité du sujet

La Personnalité est donc l'édifice le plus ancien dans la construction du sujet qui s'enrichit en fonction du milieu, selon un modèle rétroactif, sur un mode cognitif et conatif avec des données de l’ordre du volitif12. La grille de lecture différentielle de la personnalité se fait par l'approche des traits ou types. La personnalité comprend les versants de l'inné et de l'acquis, le tempérament étant plutôt du domaine de l'inné et l’ensemble constitué du caractère, des attitudes (sociales et personnelles) et du comportement relèvent du domaine de l'acquis. La partie émotionnelle de la structure conative, niveau le plus basique de la personnalité, s’envisage comme un opérateur entre les traits et le comportement, elle joue un rôle d’interface. La dynamique de la conation comporte une part de volonté et une part de réactivité. La volition est directement liée à l’intentionnalité, en ce sens elle sert la cognition et la conation. Pour Eysenck, les traits se situent à l’interface des causes (déterminants constitutionnels) et des effets (comportements sociaux).

Notes
10.

Substrat mémoriel vécu —« Ensemble de savoir-faire acquis/appris et de connaissances représentées, organisées, dans un climat psychoaffectif spécifique. Il se construit en relation avec le monde extérieur (famille société) et subit diverses influences consciemment ou non. »

11.

Aptitude individuelle à développer de la psychose

12.

Le cognitif qualifie ce qui se rapporte à la faculté de connaître, le conatif traite des aspects affectifs du comportement alors que le volitif se réfère à la volonté.