1.3.1.3 Étude iconographique de la personnalité

La physionomie et la psychométrie ne sont pas les seuls moyens d’investigation de la personnalité. Tous les signes, dont l’écriture, le dessin, le geste, sont d’autres outils à disposition. L’hypothèse que la personnalité s’exprime dans la physionomie, le geste, la parole, est tout aussi plausible que celle de la projection de la personnalité dans les dessins ou les récits. Il serait dommageable de passer à côté d’une partie importante de l’information disponible. Ces épreuves peuvent constituer un bon moyen d’investigation si toutefois une grande vigilance est portée à l’interprétation. Dès le début du XIXe siècle, avec l’expérience du fil et de la bille de plomb orienté dans différentes directions, le Marquis de Chevreul démontre que la seule pensée d’un mouvement peut créer le mouvement. Sur ce champ, dans le contexte routier, nous pouvons citer l’approche atypique de Matsuoka qui défini des profils à risque en fonction des aptitudes graphiques (Matsuoka 1997). L’expérimentation consiste à faire une multitude de cercles sur une feuille de papier, dans un temps donné. Les réponses au test sont ordonnées en fonction de la vitesse et de la qualité d’exécution (irrégularités) des cercles produits. Selon les auteurs, les 103 conducteurs enclins à l’accident produisent, en moyenne, plus de cercles que les 178 sujets dits « bons conducteurs ». Les sujets du premier groupe exécutent des cercles dont le graphisme est globalement moins harmonieux que celui des « bons conducteurs ». Précisons que l’approche de Matsuoka, sans le spécifier, est une reprise partielle du test projectif (Psychodiagnostic MyoKinetique P.M.K.) de 1962 de Mira et Lopez, utilisé pour la détection de l’alcoolisme et la mesure des perturbations de la personnalité dans le domaine de l’agressivité, l’émotivité, l’excitation/inhibition, l’introversion/extraversion et le tonus vital. Le PMK comprend également un étalonnage pour les conducteurs « normaux » versus les « mauvais » (Mira y Lopez 1962). Le PMK consiste à élaborer non seulement des cercles mais plusieurs séries de mouvements dans les divers plans de l’espace afin de déceler la formule  « attitudinelle » du sujet, son squelette psychique c'est-à-dire ses penchants tempéramentaux et caractérologiques ». Il s’agit de la mesure « Myopsique » qui assure l’adaptation psychomotrice de l’individu à l’ambiance. Les mesures Myopsiques reposent sur le principe selon lequel chaque attitude ou intention de réaction s’accompagne d’une attitude musculaire déterminée qui vise à favoriser les mouvements projetés et à inhiber ses contraires (dépendance indépendance à l’égard du champ). Mira et Lopez, dans la mesure de la production des cercles précisent qu’une augmentation graduelle du diamètre des cercles est en lien avec l’anxiété alors qu’une diminution l’est avec l’inhibition. Ainsi, les déviations secondaires (de plan) expriment l’émotivité du sujet. L’ensemble de ces approches repose sur une même idée : la substance se manifeste dans la forme et la vie s’exprime dans le mouvement selon la doctrine motrice de William James : on peut déduire de l’attitude praxique21 une attitude mentale et vice versa. La qualité du graphisme serait-elle un indicateur de prise de risque, de motivation, du mode de locus de contrôle, de dépendance-indépendance à l’égard du champ, ou simplement liée à la rapidité avec laquelle les cercles sont réalisés (nervosité du sujet, par exemple ou maladresse) ?

Sur le plan neuropsychologique, les expérimentations de Matsuoka et de Mira et Lopez peuvent être mises en relation avec les capacités d’appréhension de l’espace en deux dimensions (espace, vision, coordination visuo-spatiale). Nous nous éloignons de la simple notion de locus de contrôle (voir partie ), pour aborder celle d'aptitude visuo-spatiale contrôlée. Bien que la remise en cause de l’outil ne soit pas notre propos, nous attirons néanmoins l’attention sur la nécessité de circonspection face aux interprétations.

La personnalité s’exprime dans la physionomie, le geste, la parole, le dessin et au sens large dans toute expérience humaine. Tout individu possède une signature comportementale stable qui rend compte de sa personnalité.

Notes
21.

La praxie fait référence à l’action et désigne les fonctions de coordination et d'adaptation des mouvements volontaires de base dans le but d'accomplir une tâche donnée