1.5.2 Accident et filiation

Certains auteurs mettent en lien les accidents selon une filiation père/fils (Carlson and Klein 1970; Ferguson 2001). Un travail canadien de Wilson (non publié), en collaboration avec la compagnie d'assurance ICBC confirme une corrélation entre les accidents et les infractions des parents et ceux des enfants, alors que l'exposition au risque est contrôlée par la connaissance des données chiffrées du fichier des assureurs (kilométrage, nombre d'infractions, type de permis, accident). Wilson note une prédictibilité de la carrière accidentelle et infractionniste du jeune, en fonction de celle des parents. Il précise même une augmentation moyenne de 7 % du risque additionnel d'accident de l'enfant par rapport à ses parents.

Les variables les plus fréquemment reliées à l'accident dans la littérature demeurent les infractions, les condamnations et les accidents antérieurs. Il va sans dire que l'âge, le sexe, le statut socioéconomique et le kilométrage annuel parcouru s'ajoutent à ces données. La corrélation, pas toujours démontrée et quelquefois faible, entre traits de personnalité et implication dans l'accident, n’autorise pas l'usage fiable de tests psychométriques à des fins de prédiction. Cependant, la recherche de liens avec un vocabulaire plus précis et plus circonscrit semble néanmoins indispensable, pour établir une typologie à des fins heuristiques et préventives. La corrélation, observée entre le nombre d’accidents d’un conducteur et les infractions commises débouche sur un transfert du concept d’ « état dangereux » vers le conducteur à « haut risque ». Nous associons les facteurs de prise de risque au terme d’addiction, plutôt que la prédisposition à la prise de risque. Cette évolution du vocabulaire fait essentiellement référence aux divergences historiques sur fond de déterminisme.

Pour nous, les désaccords actuels sur la notion de prédisposition à l’accident (qui se distingue du déterminisme mais qui permet une modélisation) sont à rechercher dans la sémantique, c’est-à-dire dans le sens profond. En effet, pendant longtemps, lors des accidents industriels, la notion de prédiction a conduit à blâmer les victimes, au détriment de la recherche de la sécurité des ateliers et d’une analyse des contextes dangereux. Cette conception a donc freiné la prévention. En outre, la majorité des études évoquant ce concept procédaient à la comparaison d’un groupe exempt d’accident avec un groupe d’individus anormalement impliqués. La sélection avait lieu aux deux bornes d’un continuum d’identités psychosociales, ce qui, a priori, fausse la pertinence de ce type d’approche.

En définitive, nous savons seulement que certains facteurs de risque sont stables et généraux (personnalité, constitution…) et que d’autres varient au cours de la vie (âge, expérience, exposition …). Le concept comprend donc des éléments intrinsèques et stables, présents avec des éléments évolutifs, dynamiques.