2.2.1 Principes d’organisation des représentations

Doise complète le processus d’objectivation et d’ancrage de Moscovici par les principes organisateurs (Doise 1986). Toutes les représentations sociales sont organisées autour d’un noyau central dont la fonction est structurante et gère l’ensemble du champ représentationnel d’un objet donné. Le noyau central, dit également causal, donne signification à un ensemble d’événements particuliers et permet la vision cohérente. Les représentations revêtent donc un caractère structural. Abric distingue deux sous-systèmes de représentations, un système central et des éléments périphériques : le système central est peu évolutif à court terme, il est déterminé par l’histoire du groupe et marqué par la mémoire collective. Sa fonction est consensuelle, il est la base commune, collectivement admise et partagée des représentations sociales. Les éléments périphériques, quant à eux, sont gouvernés par le noyau central, se sont de réels schèmes prescripteurs de comportement. Ils jouent un rôle dans la dynamique des représentations sociales et, contrairement au système central, ils sont fortement liés au contexte, ils sont souples et évolutifs permettant ainsi l’adaptation du système central à la réalité concrète sans en modifier la structure profonde. En résumé, les représentations sociales sont consensuelles par leur noyau central mais elles peuvent manifester de fortes différences interindividuelles par leurs systèmes périphériques. Pour un individu l’importance que peut prendre un élément périphérique, dépend essentiellement de la structure et de la signification de son système central perceptuel.

Il est possible de raisonner sur les représentations et de rechercher le lien entre comportement et représentation. Le rapport entre les deux suppose que le comportement n’est pas déterminé par les caractéristiques objectives de la situation mais par la représentation que chacun en a. La difficulté consiste à rendre compte du continuum entre deux pôles. Le premier correspond aux savoir-faire activés pour faire face à la situation sans que l'opérateur n'en ait directement conscience ; le second correspond aux représentations explicites, ayant valeur de symbole dans la réalité objective pour le sujet. C’est l’appropriation de la réalité par l’individu, à travers son système de représentation, beaucoup plus que la situation réelle elle-même, qui conditionne l’apparition de tel ou tel comportement. La situation étant toutefois réversible, une pratique nouvelle peut provoquer une transformation (seules les informations pertinentes sont incluses), et modifiée, amplifiée fonctionnellement (les informations les plus importantes pour la tâche sont accentuées). C’est une manière de s’interroger sur le déterminisme en sens inverse. Soit, comment les pratiques peuvent-elles déterminer les représentations plutôt que comment les représentations déterminent les actions ?

Les représentations sociales ne sont néanmoins pas immuables, un événement peut être à l’origine d’une transformation, dans la mesure où il est particulièrement impliquant pour le groupe d’appartenance et qu’il induit des modifications concrètes des circonstances externes appartenant au champ de la représentation. La pratique sociale et les représentations afférentes sont modifiables, si tant est qu’elles restent en accord avec le système de représentation de base.