5.3 Capacité, habileté, aptitude, compétence

Nombre d’auteurs utilisent indifféremment les termes de capacité, habileté, aptitude et compétence pour définir le conducteur dans sa tâche de conduite. L’usage d’un terme plus qu’un autre renvoie aux définitions de concepts de base. Les termes d’aptitude, capacité et habileté peuvent se comprendre comme faculté, talent, disposition, qualité. Nous constatons que des mots aussi différents que capacité, habileté et aptitude définissent l’exécution d’une tâche alors que leurs sens donnent des précisions particulières.

Ces termes ne peuvent être utilisés de façon isolée et exclusive pour appréhender l’activité de l’homme dans la tâche de conduite. En effet l’automobiliste est, tout à la fois, une personne qui doit être capable de comprendre son rôle dans le contexte ; habile dans l’exécution des gestes et apte à mettre en œuvre les enseignements relatifs au code de la route.

Nous devons donc nous efforcer de dépasser les termes qui peuvent s’appliquer au conducteur, pour en trouver un ou plusieurs, fédérateurs.

Verré parle d’aptitude, définie d’une part par « la disposition naturelle ou acquise de quelqu’un à faire quelque chose » et d’autre part, par le sens psychologique « dimension selon laquelle se différencient les individus » (Verré 1997) p.120. Il reconnait l’utilité d’introduire la notion d’aptitude. Il justifie la dimension psychologique des études et admet que l’expérience (savoir-faire) évolue à des rythmes variables selon les aptitudes et caractéristiques individuelles. Il considère aussi que la mesure de l’aptitude à la conduite est du ressort du médecin et du psychologue. Nous défendons également l’idée selon laquelle l’aptitude n’est qu’un potentiel à activer pour devenir une compétence. En cela, nous rejoignons Aubret qui, à partir de la définition de l’aptitude, dégage des facteurs restrictifs et affirme que les aptitudes s’envisagent comme des caractéristiques cognitives responsables de l’acquisition et du traitement de l’information (Aubret, Gilbert et al. 1993) p.21-22. Par ailleurs, ils rappellent que le concept d’aptitude n’est pas un observable mais un construit cognitif. Cette acception n’est pas unanime : Gentil71, notamment, relève un déficit dans le concept d’aptitude et affirme que : « […] par son caractère analytique, déterministe, non évolutif [l’aptitude] ne rend pas compte des possibilités d’adaptation. »

Encore aujourd’hui, une terminologie consensuelle qui cerne la globalité de la tâche de conduite reste à établir. Les termes de capacité, habileté ou aptitude ne cernent pas avec justesse l’intégralité des facteurs. In fine, nous retiendrons le terme de compétence72 en accord avec Aubret et Bailet. (Aubret, Gilbert et al. 1993; Bailet 1999). La compétence est faite de qualités humaines et sociales qui peuvent rendre efficace la qualification en conduite automobile. Elle se mesure par rapport au nombre d’accident ou par une variable intermédiaire, le nombre d’infraction. En ce sens, l’infraction au code de la route ou l’accident de circulation traduisent un déficit de compétence.

J.M. Bailet dans sa thèse, récapitule la notion de compétence dont nous proposons la schématisation Figure 3. Elle correspond à notre acception. Pour nous, la compétence comprend la compétence personnelle (qui comprend la méta-compétence73 74), la compétence procédurale et la compétence sociale. Le conducteur en situation de conduite fait des choix qu’il n’est pas toujours capable d’expliquer, il ne serait donc pas systématiquement dans la méta-compétence. Il peut éventuellement se situer dans la méta-performance (justification des performances). La notion de compétence comporte donc de l’inné (aptitudes naturelles) et de l’acquis/appris. Nous pouvons poser l’hypothèse selon laquelle plus le conducteur est dans la méta-compétence plus il est sûr.

Figure 3 : Schématisation de la notion de compétence du conducteur
Notes
71.

B. Gentil, Directeur général de l’Institut Entreprise et Personnel, cité par Aubret & al, 1993, p 211.

72.

La compétence regroupe des notions d’aptitude, d’acquis ainsi qu’une capacité cognitive à la modification du comportement de base plus ou moins marquée.

73.

Je suis dans la métacompétence quand je suis en mesure d’expliquer ce que je fais et comment je le fais.

74.

Je suis dans la métacompétence quand je suis en mesure d’expliquer ce que je fais et comment je le fais.