3. L’affirmation d’une métropole régionale et d’une communauté urbaine

Au cours des Trente Glorieuses, l’agglomération lyonnaise connaît parallèlement de profondes mutations sur le plan administratif et politique, dues essentiellement à la volonté planificatrice et technocratique de l’État.

Les nouveautés résident d’abord dans la production d’une série d’études destinées à connaître et maîtriser la croissance urbaine de Lyon et de sa région. Plusieurs documents élaborés à la fin des 1950 témoignent d’une certaine vitalité de l’urbanisme au moment où le nouveau maire Louis Pradel (1957-1976) succède à Édouard Herriot (1905-1957) : avant-projet de plan de la « région lyonnaise » par l’Atelier régional d’urbanisme signé J. Foch en 1959, « Plan Maillet » en 196071. En 1965, le Plan d’aménagement et d’organisation générale (PADOG) vise à limiter le développement de l’agglomération en reportant l’urbanisation sur des villes périphériques (Villefranche-sur-Saône, Vienne) mais aussi des villes nouvelles. Choisie avec d’autres capitales régionales comme « métropole d’équilibre » par la Commission nationale d’aménagement du territoire (CNAT), Lyon devient l’épicentre de l’Organisation d’études d’aire métropolitaine (OREAM) Lyon-Grenoble-Saint-Étienne. Ce nouvel organisme se voit attribuer un « Schéma » adopté entre 1968 et 1970, qui souhaite promouvoir Lyon comme un véritable centre métropolitain. Les aides de l’État contribuent fortement à la réalisation de grands équipements : aménagement du centre décisionnel et de la première gare TGV à la Part-Dieu, construction d’un réseau d’autoroutes en étoile et d’un aéroport international à Satolas, promotion du métro. La loi d’orientation foncière (LOF) de 1967 confirme la rédaction d’un Schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme (SDAU) par l’Atelier d’urbanisme de Charles Delfante, mais approuvé dans les années 1970 seulement72. Dans la région lyonnaise, expliquent les auteurs de l’Atlas historique du Grand Lyon, « le schéma de l’OREAM, le SDAU, les Plans d’occupation des sols [créés en 1967] et les Plans d’aménagement de zones s’emboîtent pour constituer les cadres des évolutions urbaines à court, moyen et long terme »73.

Le SDAU est cependant remis en cause par plusieurs facteurs : le zoning prévu n’est pas partout respecté (implantation de zones industrielles dans les espaces naturels et agricoles, ou à l’inverse abandon de tronçons d’autoroutes sous la pression d’élus locaux) ; surtout, le ralentissement démographique du centre de l’agglomération et le retournement de la conjoncture économique ont mis à mal les tentatives de rationalisation et de planification de la croissance urbaine74.

Sur le plan institutionnel, des changements importants ont lieu au cours de la période. Au début des années 1950, l’agglomération lyonnaise est une juxtaposition de communes, présentant une continuité du bâti et des fonctions urbaines mais sans que cet ensemble urbain soit institutionnalisé. Ce manque d’unité administrative réelle tient d’abord au fait que les politiques du Plan portent sur des secteurs économiques plus que sur des espaces. En outre, les communes périphériques ont longtemps regardé avec suspicion une intégration politique qui aurait menacé leur autonomie. En 1959, la loi sur les districts urbains a été refusée par les communes de la région lyonnaise75.

Un tournant a lieu sous l’impulsion de l’État en 1966 avec la création des Communautés urbaines. Le but est de conférer à ces instances intercommunales des compétences qui permettent une conception d’ensemble de l’urbanisme et des grands équipements (voirie, assainissement). Celle de Lyon (regroupant initialement cinquante-cinq communes) entre en fonctions à partir du 1er janvier 196976.

Notes
71.

Charles Delfante et Jean Pelletier, Atlas historique du Grand Lyon…, op. cit., p. 242.

72.

Mais les dates divergent : 1978 pour les auteurs de l’Histoire de Lyon (p. 428), 1972 et 1978 (les deux !) pour Charles Delfante et Jean Pelletier (p. 244).

73.

Charles Delfante et Jean Pelletier, Atlas historique du Grand Lyon…, op. cit., p. 183.

74.

Françoise Bayard et Pierre Cayez, Histoire de Lyon…, op. cit., p. 428.

75.

Marc Bonneville, Lyon : métropole régionale ou euro-cité ?, Paris, Anthropos, 1997, p. 24.

76.

Charles Delfante et Jean Pelletier, Atlas historique du Grand Lyon…, op. cit., p. 182.