Les sessions de formation EH à destination des prêtres et séminaristes citées dans la Semaine religieuse pour les années 1945-1954 correspondent pour la plupart d’entre elles à une initiation à l’ « économie humaine » que veut promouvoir l’association. L’urbanisation n’était donc pas évoquée directement, même si la ville pouvait constituer un cadre possible, mais non exclusif361. Or, une session spécifique pour la région lyonnaise est organisée les 8-9 mars 1952, sous le titre « Économie et Humanité [sic]. Session d’études pour la région lyonnaise »362. La rencontre a lieu à la Maison des étudiants catholiques, au 6 quai Claude-Bernard à Lyon.
Beaucoup de sujets abordés portent sans surprise sur des thématiques inspirées du marxisme (« Tensions : classes dirigées et classes dirigeantes, pays avancés et pays sous-développés » par le père Lebret par exemple) ou sur l’organisation des équipes (« Les communautés de travail » sur le modèle Boimondau, « Comment constituer un groupe d'action et d'éducation communautaire »). Mais l’aménagement du territoire, et en particulier le territoire de la ville, fait son apparition dans les exposés et les discussions qui les suivent. Ainsi, un atelier sur « l’expérience communautaire de Clair-Logis et des Castors » invite à réfléchir sur l’habitat urbain, les insuffisances de la Reconstruction en matière de logement et l’engagement chrétien dans la ville en train de se construire. De même, animée par Jean Labasse, toute la veillée du samedi est consacrée à la « situation économique et sociale de la région lyonnaise »363. Sans précipiter une analyse plus approfondie des aboutissements éditoriaux de ces travaux364, il faut retenir ici les échelons privilégiés : les niveau local (avec le partage d’expériences que représente la construction d’un quartier « castor ») et surtout régional : Lyon organise son espace environnant en le polarisant. À ce titre, les limites communales ne sont pas jugées pertinentes et la notion de « région » permet sans doute une plus grande souplesse d’utilisation que le terme encore peu significatif d’ « agglomération ».
À vrai dire, le recrutement sociologique des sessions de formation qu’organise EH à la Tourette laissait déjà présager un engouement pour les thématiques urbaines. Certes, ces sessions de formation recrutent bien au-delà des limites de l’agglomération. Des représentants des syndicats chrétiens et de l’Action catholique spécialisée - ouvrière ou agricole - assistent nombreux aux conférences proposées. Cependant, Denis Pelletier repère en plus grand nombre dans ces sessions « ce qu’on appellera, faute de mieux, des gestionnaires du corps social : ingénieurs et cadres, professions libérales (avec un fort contingent de médecins), enseignants, travailleurs sociaux »365. C’est-à-dire des professions que l’on trouve très majoritairement en ville. EH attire par conséquent des professionnels qui travaillent en milieu urbain et qui sont tous soumis aux mêmes interrogations liées à la masse et à la diversité de ces populations. Un certain nombre de ces sympathisants, notamment parmi les professions libérales et les ingénieurs, vont alors trouver dans le tout jeune Comité pour l’aménagement de la région lyonnaise un lieu qui rejoint leurs préoccupations à la fois professionnelles et civiques.
C’est le cas pour la session d’initiation EH des 9-11 juillet 1947. Au programme des journées : « présentation d'Économie et Humanisme, introduction à ses méthodes, connaissances sociologiques des faits religieux, diagramme paroisse ; bilan du capitalisme, le catholicisme social (avec messages de Pie XII), le marxisme comme humanisme, principes et perspectives d'une "économie humaine" ; expériences communautaires, structures et échelons communautaires, mission ouvrière et sacerdoce, paysannerie ; prolétariat colonial, conclusions » (Semaine religieuse du diocèse de Lyon du 5 juillet 1947).
Semaine religieuse du diocèse de Lyon des 29 février et 7 mars 1952.
« Économie et Humanité [sic]. Session d'études pour la région lyonnaise », Semaine religieuse du diocèse de Lyon du 29 février 1952.
Voir infra dans le même chapitre.
Denis Pelletier, « Économie et Humanisme dans la région lyonnaise… », op. cit.