Cette mobilisation présente plusieurs caractéristiques. Elle est d’abord très fortement et très régulièrement rythmée et encadrée par des circulaires. D’une durée estimée entre cinq et six mois, la préparation s’effectue selon une « feuille de route »535. Ainsi, pour la période du 1er janvier au 21 mars 1954, pas moins de neuf circulaires ont été repérées, soit presque une par semaine. Ces quelque trente-cinq pages au total portent sur le dispositif d’ensemble, sur les choix qui doivent présider à la constitution des équipes paroissiales ou encore sur le détail du bulletin de recensement536.
D’autre part, l’organisation est strictement hiérarchisée à partir d’une base géographique : « La paroisse est l’unité géographique de base : elle est responsable durecensement dans tous les lieux de culte situés sur son territoire. Le secteur est l’échelon intermédiaire : assure la liaison avec l’Archevêché, étudiera avec les paroisses les conséquences pastorales du recensement. Le diocèse donne les directives. Fournit le matériel de recensement et assure le dépouillement avec le concours de l’Institut national de statistique »537. Ce partage des rôles se retrouvera quelques années plus tard lors de la création des paroisses nouvelles : si l’Archevêché est sans surprise la seule instance à prendre les décisions et prend à sa charge les compétences techniques, la paroisse doit répondre du bon déroulement de l’enquête sur son territoire et est désignée unilatéralement comme responsable des échecs ou difficultés qui pourraient advenir. Le secrétariat général souhaite trouver à chaque échelon de cette mobilisation - de la paroisse au secrétariat général - un tandem composé d’un prêtre et d’un laïc538, sans doute afin de décharger le clergé d’une charge particulièrement lourde.
Enfin, la préparation du recensement est l’occasion pour l’Archevêché de mettre à jour l’inventaire des lieux de culte présents dans l’agglomération et d’en contrôler l’usage. Chaque curé est en effet chargé d’établir la liste des églises et chapelles situées sur le territoire paroissial, accompagnée pour chacune d’entre elles d’un certain nombre de renseignements (type de lieux de culte, adresse exacte, nombre de messes célébrées le dimanche, horaires)539. Les curés sont appelés à mentionner en particulier le nombre de bulletins à prévoir pour chacun de ces lieux de culte, ce qui suppose paradoxalement que celui-ci ait, avant même l’enquête, une idée assez précise du nombre de pratiquants réguliers ! La centralisation de ces informations par le secrétariat permet la constitution d'un fichier géographique actualisé des églises et chapelles de l'agglomération540. Cet inventaire sera d’autant plus précis que le secrétariat général demande à chaque curé d’établir un plan géographique détaillé de sa paroisse. La somme des informations demandées et le minimum de compétences cartographiques qu’elle requiert a sans doute effrayé ou agacé plus d’un curé. Ce plan doit en effet obligatoirement comporter : « 1° L’indication du nom des rues avec les numéros des immeubles aux carrefours, ainsi qu’aux limites paroissiales ; 2° L’emplacement des lieux de culte (église paroissiale et chapelles de toutes espèces) ; 3° L’emplacement des immeubles non destinés à l’habitation (usines, bâtiments administratifs, écoles, etc… ) »541.
Jean Labbens, Les 99 autres…, op. cit., p. 45 et 49.
Liste sans doute non exhaustive des circulaires (la plupart non datées) envoyées aux paroisses ou aux supérieur(e)s des maisons religieuses : « Recensement diocésain de pratique religieuse (un dimanche de printemps 1954) : organisation d’ensemble », 2 pages ; « Recensement de pratique dominicale : instructions générales. Destinataires : MM. les curés », 1 p. ; « Recensement de la pratique dominicale. La constitution des équipes paroissiales », 2 p. ; « Recensement de pratique dominicale : prospection des lieux de culte », 3 p. ; « Recensement de la pratique dominicale. Instructions transmises par la Paroisse à chacun des lieux de culte situés sur son territoire », 3 p. ; « Recensement de la pratique dominicale. Aux Supérieurs et Supérieures des communautés religieuses», 10 février 1954, 2 p. ; « Textes à lire en chaire à chaque messe, le dimanche 21 mars dans toutes les églises et chapelles », 8 p. ; « Recensement de la pratique dominicale. Dernières précisions aux paroisses », 3 p. ; « Fiche du recensement religieux "Étude religieuse. Lyon-Villeurbanne et leur périphérie" », 1 p. (AAL, fonds Gerlier, 11.II.126, dossier « Pratique dominicale », 1954).
Mots soulignés dans la circulaire. AAL, fonds Gerlier, 11.II.126, dossier « Pratique dominicale », 1954.
La fiche de prospection des lieux de culte en atteste et Jean Labbens le rappelle dans Les 99 autres… (p. 52).
AAL, fonds Gerlier, 11.II.126, dossier « Pratique dominicale », 1954.
Le secrétariat général demande à chaque curé de remplir trois exemplaires de cette fiche de prospection des lieux de culte. L’une est conservée à la cure, les deux autres sont envoyées au Secrétariat général.
AAL, fonds Gerlier, 11.II.126, dossier « Pratique dominicale », 1954. Ces cartes n’ont hélas pas pu être retrouvées aux Archives diocésaines. Dans le cas contraire, elles auraient constitué une source inestimable pour connaître les représentations des curés de leur espace paroissial.