Gaston Bardet est à la fin des années 1940 directeur d’études à l’Institut international d’urbanisme appliqué de Bruxelles et professeur à l’Institut d’urbanisme de l’Université d’Alger. Il s’est fait connaître dans les années 1930 par ses critiques à l’encontre des thèses « progressistes » de Le Corbusier, auxquelles il oppose une vision « culturaliste » fortement teintée de spiritualisme1061. Bien que président d’honneur de la Société française des urbanistes, il n’a pas exercé d’influence majeure en France pendant les Trente Glorieuses, tant l’architecture et l’urbanisme sont alors dominés par les théories fonctionnalistes1062. Pourtant, les analyses de cet élève de l’historien de Paris Marcel Poëte inspirent à la Libération des lieux de réflexion, tel Économie et Humanisme1063. La vision communautaire que développe Gaston Bardet trouve un intérêt auprès du père Lebret attentif à la dimension humaine des villes modernes1064. Bardet se défend de théoriser un urbanisme spécifiquement chrétien. Il admet cependant que l’attention qu’il porte aux communautés naturelles, tout comme l’analyse quasi clinique qu’il développe du « citadin malade en son corps et en son âme », ajoutées à la portée morale et spirituelle du « Nouvel urbanisme » qu’il appelle de ses vœux, donnent à son travail, de fait, une coloration chrétienne qu’il ne renie pas1065.
Gaston Bardet n’a pas consacré d’ouvrage particulier aux questions de l’urbanisme religieux et de l’implantation des lieux de culte. Seule une conférence sur ce thème prononcée à la demande de la revue L’Art sacré le 14 novembre 1944, et reprise avec des modifications dans le premier numéro de 1945, apporte des éléments d’information sur son point de vue en la matière1066. Or, cette « causerie » a fait l’objet d’un compte-rendu dans la Semaine religieuse du diocèse de Lyon un mois plus tard1067. Il apparaît très nettement que les principes d’implantation des églises nouvelles énoncées par l’ODPN renvoient pour nombre d’entre eux aux idées de Gaston Bardet sur la question.
Pour reprendre les modèles d’interprétation proposés par Françoise Choay (L’Urbanisme…, op. cit., p. 7-83).
Françoise Choay, L’Urbanisme…, op. cit., p. 42 ; Françoise Choay, « Culturalisme », dans Pierre Merlin et Françoise Choay (dir.), dans Dictionnaire de l’urbanisme…, op. cit., p. 186-188.
Denis Pelletier, Économie et Humanisme…, op. cit., en particulier p. 106-107.
Dans une bibliographie abondante, voir en particulier: L’Urbanisme, Paris, PUF, collection, « Que sais-je? », 1947 pour la 1ère édition ; Problèmes d’urbanisme, Paris, Dunod, 1948 ; Mission de l’urbanisme, Paris, Éditions ouvrières - Économie et Humanisme, 1949.
Gaston Bardet, « L’urbanisme chrétien. La structure communautaire », Pierre sur Pierre, Paris, Vincent et Fréal, 1946, p. 271-276.
Reconstruire les églises. I. L’esprit et les principes. L’Église dans la Cité, Cahiers de l’Art sacré, 1, 1945, chapitre III « L’Église dans la Cité », p. 19-28. Des extraits de la conférence, agrémentés de remarques complémentaires, sont également publiés dans « L’urbanisme chrétien… », op. cit.
« Urbanisme et paroisses nouvelles », Semaine religieuse du diocèse de Lyon du 29 décembre 1944.