L’Archevêché adopte une politique d’achat systématique de terrains, avant même de déterminer si ces tènements accueilleront ou non finalement des lieux de culte. L’important est d’y être et d’arriver à temps, explique le cardinal Gerlier au moment de lancer le premier emprunt : « Parce que le diocèse doit procéder sans tarder à des achats multiples de terrains dans tous les endroits où s'édifient, en ce moment, ou vont s'édifier, dans un délai relativement court, des quartiers nouveaux, peuplés de façon massive […]. Il y aura donc à édifier bien des constructions indispensables à la vie religieuse d'une paroisse vivante, moderne. Mais, dès maintenant, une première opération s'impose : acquérir les emplacements de ces constructions, sous peine de n'en plus trouver de disponibles, à brève échéance »1132. De même, un an plus tard, dans une brochure distribuée aux fidèles à l’occasion du bimillénaire de la Ville de Lyon, l’Archevêché prévient : « Dans le grand Lyon, il faut fonder des paroisses. Il faut faire vite. Réserver aux futures églises des terrains qui ne seraient plus libres »1133. En 1959, dans un rapport au cardinal Gerlier, Mgr Dupuy s’inquiète de l’achat des terrains, question primordiale à ses yeux : « C’est le plus tôt possible qu’il faut acquérir la propriété des terrains, faute de quoi on les paie plus cher ou, chose plus grave, il n’en est plus de disponible »1134.
L’effort auquel se livrent les autorités diocésaines est donc doublement démesuré : à une course contre le temps qui oblige à penser toujours plus en amont la réservation de terrains, s’ajoutent une infinité de situations locales susceptibles de donner lieu, dans l’espace de l’agglomération, à l’acquisition préventive d’un terrain. Deux exemples localisés tirés d’un rapport de 1958 peuvent servir d’illustration de cette course aux terrains1135. Le quartier de la Buire, dans le 3ème arrondissement de Lyon, est alors l’un des espaces à équiper en priorité : « Il fait actuellement partie de la paroisse Sainte-Marie-de-la-Guillotière. Il y faudrait au moins une annexe. Deux emplacements sont encore disponibles : rue Danton et l’autre place Danton. Le prix en est assez élevé. Des pourparlers rapides seraient nécessaires ». Au nord de Villeurbanne, dans le quartier des « Poulettes », l’Archevêché est en passe de négocier une parcelle « près d’immeubles qui vont être construits à l’emplacement des jardins de l’usine Bertrand-Clayette. La cession de ce terrain ne serait pas très onéreuse, mais des pourparlers difficiles seraient immédiatement nécessaires avec la société constructive propriétaire ». Dès lors, une solution semble trouver satisfaction à l’Archevêché pour faire face à la déferlante urbaine : acheter, quel que soit l’endroit dans le quartier en question, mais acheter rapidement, afin d’utiliser éventuellement les terrains acquis comme monnaie d’échange.
« Lettre de Son Éminence Gerlier aux prêtres et aux fidèles de son diocèse au sujet de l'emprunt pour les paroisses nouvelles », Semaine religieuse du diocèse de Lyon du 17 février 1957.
AAL, fonds Gerlier, 11.II.31, « Vingt siècles de Chrétienté, de Lugdunum au plus grand Lyon », sans date, vraisemblablement 1958.
AAL, fonds Gerlier, 11.II.31, rapport de Mgr Claude Dupuy au cardinal Gerlier, sans date, vraisemblablement 1959.
AAL, fonds Gerlier, 11.II.31, rapport « Les projets des futurs paroisses », sans date, avec la mention manuscrite de l’archiviste « 1958, je pense ». Des recoupements d’informations laissent plutôt conclure pour 1956 ou 1957. Mgr Dupuy en est vraisemblablement l’auteur.