2.2.2.1.1. Des connaissances spécifiques à un contenu ?

La première étude à avoir identifié les PCK les définit comme étant les connaissances spécifiques d’un contenu que l’enseignant développe et accumule en relation avec l’enseignement de ce contenu (Hashweh, 2005). Au fur et à mesure, les PCK sont passées de connaissances spécifiques d’un contenu à des connaissances plus générales. Pour certains auteurs les PCK ne sont donc plus liées à un contenu. A l’opposé de cette tendance, certains chercheurs insistent sur la spécificité des PCK vis-à-vis du contenu. Ainsi, van Driel, Verloop, & de Vos (1998) notent que « in our view, the value of PCK lies essentially in its relation with specific topics 6» (page 691).

Nous suivons Hashweh lorsqu’il dit qu’une PCK est, par définition, liée à un contenu. Ceci implique qu’une connaissance pédagogique qui n’est liée à aucun contenu particulier. Par exemple, la situation au cours de laquelle un enseignant varie les activités dans la classe pour que les élèves ne s’ennuient pas, ne constitue pas une PCK. La question qui se pose maintenant est de savoir s’il est possible de distinguer une PCK spécifique d’une PCK générale. Un modèle a été proposé par Veal et McKinster (1999), il s’agit d’une taxonomie des PCK, représentée par la figure 8, qui a été construite à partir de la littérature sur le sujet. Il y apparait différents niveaux de généricité de PCK correspondant à différents niveaux de découpage du savoir. Ce découpage provient de l’organisation des savoirs à l’école : au niveau le plus général, ceux-ci sont regroupés en disciplines (histoire, sciences …), chacune regroupée en domaines (chimie, physique …) qui eux-mêmes contiennent des thèmes (oxydoréduction, acides et bases …). A chacun de ces niveaux est associé un type de PCK. Les connaissances qui ne sont liées à aucun contenu en particulier, et qui sont susceptibles d’être mises en œuvre par tous les enseignants (peu importe ce qu’ils enseignent), sont appelées connaissances pédagogiques. Le but du travail de Veal et McKinster (1999) était d’homogénéiser les termes employés et de proposer un modèle de généricité des PCK. Dans ce modèle, le degré de généricité ou de spécificité des PCK se caractérise par un découpage du contenu auquel elles sont liées ; or ce découpage du contenu pose problème. Il suppose en effet que des frontières soient attribuées aux connaissances et que celles-ci soient regroupées en entités (thèmes, domaines, disciplines). Ce découpage nécessite de faire appel à une référence ou un point de vue. Veal et McKinster ont choisi le découpage en œuvre à l’école. Or cette référence est extérieure à la classe : un enseignant de physique peut faire un rappel de mathématiques à ses élèves, et ce faisant, être susceptible de mettre en œuvre des PCK liées à la fois au domaine de la physique et des mathématiques. Imaginons un enseignant de chimie qui introduit la relation mathématique entre le pH d’une solution et la concentration en ion H3O+ présent dans cette solution, cette relation s’écrit : pH = –log[H3O+]

Si l’enseignant, lors de l’introduction de cette relation rappelle aux élèves les relations suivantes :

alors il est possible de dire qu’il a mis en œuvre une PCK concernant les difficultés des élèves vis-à-vis des propriétés algébriques de la fonction logarithme. Cette PCK est liée à la fois à un contenu mathématique (la fonction logarithme) et est utilisé pour l’enseignement d’un contenu de la chimie (relation entre le pH d’une solution et la concentration en ion H3O+). Ces contenus n’ont pas forcément le même degré de spécificité et n’appartiennent pas à la même discipline. Le modèle de Veal et McKinster ne permet pas de caractériser convenablement ce genre de PCK.

Morge (2003) propose une caractérisation des PCK en fonction de la situation dans laquelle les PCK sont mises en œuvre. Il définit des PCK locales, comme étant liées à une situation spécifique, et des PCK globales, comme étant liées à une situation plus générale. Reprenons notre exemple de l’enseignant de chimie : la PCK correspondant au rappel sur les propriétés algébriques de la fonction logarithme est dite locale s’il ne la met en œuvre que lors de cet enseignement. Nous verrons comment nous traitons ce problème de la spécificité des PCK en fonction du contenu lorsque nous présenterons le modèle de PCK retenu.

Figure 8 : Taxonomie des PCK d’après Veal et MaKinster.
Figure 8 : Taxonomie des PCK d’après Veal et MaKinster.

Notes
6.

De notre point de vue, l’intérêt des PCK réside essentiellement dans leurs relations vis-à-vis d’un contenu spécifique.