2.2.3. Connaissances professionnelles et action

Nous avons présenté dans les pages précédentes notre position par rapport à l’action d’une part et aux connaissances professionnelles d’autre part. Étudier les connaissances professionnelles à partir de l’action de l’enseignant dans sa classe implique l’existence d’une correspondance entre action et connaissances. Altet fait ce lien en notant que l’activité professionnelle « se traduit par la mise en œuvre des savoirs, procédés et compétences en actes d’une personne en situation professionnelle » (Altet, 2002). Nous regroupons sous le terme de connaissances professionnelles les savoirs, procédés et compétences en actes. Notons que cet auteur, sans se positionner explicitement comme tel, adopte un point de vue très proche du nôtre sur l’activité puisque celle-ci est vue comme étant « située, orientée par des fins, des buts et les normes d’un groupe professionnel» (Ibid.). Ce lien entre l’activité de l’enseignant et ses connaissances professionnelles est aussi souligné par van Driel et al. (1998) pour qui ces dernières renvoient aux pratiques professionnelles.

Il nous faut aussi préciser notre interprétation de ce qu’est une connaissance professionnelle à la lumière de notre cadrage théorique de l’action. Partant de l’affirmation que les actions sont situées et dépendantes du contexte, il serait contradictoire de penser les connaissances comme n’étant que ce qui est su par l’enseignant. Il s’agit plutôt pour nous de ce qui permet de rendre compte de l’action de l’enseignant dans un contexte donnée et qui est en jeu au sein d’une situation. Nous parlons donc de connaissances mises en œuvre par l’enseignant plutôt que de base de connaissances. Ce dernier terme implique l’existence de connaissances « telles quelles » que l’enseignant aurait à sa disposition et dans lesquelles il pourrait puiser.

Cette interprétation des connaissances est-elle compatible avec le modèle de Shulman (1986) ? Historiquement, celui-ci a été rattaché au paradigme cognitiviste mais l’auteur ne s’est jamais explicitement prononcé sur ce sujet. Il nous semble que le concept de PCK est transversal et peut être rattaché à différents paradigmes. De fait, le concept des PCK a été introduit à partir d’une observation ne provenant pas d’un cadrage théorique mais d’un constat. Shulman a analysé les concours de certification des enseignants aux États-Unis à différentes périodes, et a mis en évidence que les concours étaient passés d’une évaluation du contenu seulement (arithmétiques, grammaire …) en 1875, à une évaluation des connaissances pédagogiques détachées de tout contenu en 1980. Shulman pose donc la question suivante : n’existe-t-il pas un juste milieu entre une approche du métier d’enseignant basée seulement sur les connaissances disciplinaires et une approche basée sur les seules connaissances pédagogiques ? Le concept de PCK permet de répondre à cette demande et de prendre en compte un aspect essentiel de l’activité de l’enseignant qui est d’aider les élèves à apprendre et de transmettre des savoirs sans toutefois imposer de cadre théorique.