8.1.2. Description de la situation en termes de mise en œuvre du savoir

Nous avons retenu les trois dimensions de description de la mise en œuvre du savoir dans la classe proposée par Sensevy (2007): la chronogénèse, la topogénèse et la mésogénèse. Chaque épisode a été analysé de façon à rendre compte, au moins en partie, de chacune de ces trois dimensions.

L’analyse en termes de type d’échange se distingue des deux autres analyses : il s’agit d’une analyse qui prend en compte seulement ce qui se passe dans l’épisode, alors que pour les autres il s’agit de regarder la continuité ou au contraire l’écart par rapport aux thèmes.

Ces analyses ont comme point commun d’être basées sur l’utilisation de mots clés, ce qui implique de pouvoir, en plus de les décrire, catégoriser les événements. L’analyse en termes de topogénèse se fait en catégorisant les événements de l’épisode, et seulement ceux-ci. En effet nous avons choisi de rendre compte de la topogénèse en analysant le type d’échanges en jeu dans l’épisode interactionnel. Cette analyse prend appui sur ce qui se passe à l’intérieur d’un épisode, indépendamment de ce qui se passe dans le thème auquel appartient l’épisode en question, contrairement aux analyses en termes de chronogénèse et mésogénèse où les événements de l’épisode sont mis en perspective avec les événements du thème pour pouvoir être catégorisés. Ainsi par exemple pour rendre compte de la mésogénèse nous avons regardé si l’enseignante introduisait de nouveaux éléments du milieu par rapport au milieu mis en place dans le thème. Cette distinction tient à ce qui est analysé : un « état à un moment donné » pour la topogénèse, une « évolution à l’échelle du thème » pour la chronogénèse et la mésogénèse. Remarquons que nous aurions pu étudier l’évolution de la topogénèse à l’échelle du thème, seulement dans cette classe la responsabilité des acteurs de la classe vis-à-vis de l’avancée du savoir dans la classe est quasiment toujours la même : l’enseignante dirige cette avancée du savoir à l’aide de questions relativement fermées, c’est elle qui choisit les réponses des élèves qui sont discutées (même dans ces instants de discussion des réponses, c’est l’enseignante qui guide la classe à l’aide de questions). L’évolution de la topogénèse n’aurait ainsi pas été très marquée dans ce type de classe. Alors qu’en regardant le type d’interactions, c'est-à-dire en ayant une approche plus microscopique de la topogénèse, plus de nuances apparaissent (par exemple entre un épisode où il y a plusieurs sollicitations d’élèves, ce qui correspond l’avancée du savoir est sous la responsabilité des élèves, et un épisode ou l’enseignante pose elle-même des questions aux élèves, ce qui correspond à une avancée du savoir sous la responsabilité de l’enseignante).

Voyons maintenant en quoi la description des épisodes interactionnels en termes de mise en œuvre du savoir nous a aidé dans le processus de reconstruction des TPC. La description de la mise en œuvre du savoir participe à la description de la situation dans laquelle les TPC sont en jeu. Cette situation est considérée comme discrète (c'est-à-dire bornée) au sein d’un épisode interactionnel : au sein d’un épisode interactionnel on ne considère qu’une seule situation, recouvrant l’ensemble de l’épisode. Rendre compte de cette situation permet de voir en quoi elle diffère de situations à l’œuvre dans d’autres épisodes. Ainsi par exemple dans certains épisodes l’enseignante ne répond pas tout de suite à la question de l’élève alors que dans certains autres l’enseignante développe sa réponse. Cette différence dans la façon de répondre de l’enseignante, mise en lumière par l’analyse de l’avancée du savoir, amène à se poser la question de la connaissance mise en œuvre par l’enseignante pour faire ce choix entre développer ou non sa réponse. Ainsi en différenciant les épisodes par la description de la situation à l’œuvre dans l’épisode, l’analyse de la mise en œuvre du savoir nous oriente dans « ce qu’il faut chercher à voir » : comment l’enseignante gère certains éléments du milieu, comment le savoir progresse dans la classe et quel est son statut (rappel, savoir nouveau …) et enfin comment se distribue la responsabilité de l’avancée du savoir entre les élèves et l’enseignante.