Le Rôle du Médiateur

Pour Bruner (1983), l’interlocuteur est le médiateur, celui qui a la capacité de créer des structures d’ordre supérieur, qui effectivement remplacent et donnent plus de pouvoir aux structures conceptuelles déjà acquises, conduisant à des apprentissages supérieurs. Ces apprentissages supérieurs permettent un degré de liberté supérieur à l’interprétation des choses de l’environnement et au contrôle de l’action.

Pour Vyghotsky (1987) les médiateurs peuvent être des adultes, des enfants ou même l’environnement. Il est considéré comme tel s’il est capable d’offrir n’importe quel stimulus que l’apprenti peut élaborer à partir de l’expérience, en construisant des nouvelles connaissances et de nouveaux concepts. Selon l’auteur, en tant que sujet de connaissance, l’homme n’a pas d’accès direct aux objets, mais un accès médiatisé, au travers du découpage du réel, opéré par les systèmes symboliques qu’il possède. Nous voyons l’emphase que cet auteur donne à la construction de la connaissance comme interaction médiatisée par diverses relations.

Quelques comportements amenant à une médiation suffisamment bonne ont été identifiés par Reuven Feuerstein (selon Klein, 1996) et décrits dans sa théorie sur la modificabilité cognitive, dont le principal point est le postulat que « tout être humain est modifiable » et, pour cela, il doit avoir un bon médiateur.

Les aspects que Feuerstein établit pour définir un bon médiateur sont : l’intentionnalité et réciprocité, la signification, la transcendance, la compétence, la régulation et contrôle du comportement, le comportement de coopération, l’individuation, la recherche de buts, le « challenge » défi, le changement, l’alternance positive, l’appartenance à l’espèce humaine.

Klein (1996) décrit dans son travail cinq comportements basiques d’une médiation de qualité : la focalisation, l’expansion, l’affectivité, la récompense et la régulation du comportement. A partir de ces concepts, Vectore (Vectore, 2001/Braga et Vectore, 2002) les caractérise à partir d’une étude exploratoire sur les bonnes médiations d’éducatrices avec des enfants en situations ludiques :

a) Focalisation : indique la proximitéde l’éducateur à l’enfant, ainsi que la participation de l’enfant aux activités développées par l’éducateur. Ce concept inclut tout essai du médiateur pour assurer que l’enfant focalise l’attention sur le sujet qu’il doit apercevoir ;

b) Expansion : indique tout comportement de l’éducateur qui a pour but d’amplifier la compréhension de l’enfant sur ce qui est présenté;

c) Médiation du signifié/affectivité : inclut toute l’énergie émotionnelle utilisée par l’éducateur pendant l’interaction avec l’enfant, l’amenant à comprendre le signifié des objets, des personnes, des relations et des événements de l’environnement;

d) La récompense : arrive quand l’éducateur exprime sa satisfaction sur le comportement de l’enfant et explique pourquoi il est content, en facilitant l’arrivée des sentiments d’autocontrôle, de capacité et de succès, mais aussi l’amplification de sa disponibilité d’explorer activement le nouveau;

e) La régulation du comportement : arrive quand l’éducateur aide l’enfant à penser avant d’agir, de façon à ce que l’enfant puisse se sensibiliser à la nécessité de réguler sa démarche pour arriver à un objectif.

Par une bonne médiation, le médiateur cherche à ce que l’apprenant soit effectivement engagé dans l’activité proposée, sans laisser de côté l’objectif de l’étude. L’engagement peut être déterminé par la tendance que le sujet a d’explorer ce qu’il ne connaît pas lorsque les nécessités individuelles du développement de chaque enfant se font présentes (Leavers, 1994). Elle est caractérisée par la motivation, l’engagement et l’attachement à l’stimulus et par l’intensité de l’expérience, physiquement et cognitivement, ainsi que par une profonde satisfaction et un fort flux d’énergie (Braga et Vectore, 2002).

Cette vision d’engagement dans une activité peut être interprétée dans la théorie des champs conceptuels à travers l’entraînement, le but et sous-but et l’anticipation, dans une analyse du concept du schème, ce qui, selon Vergnaud, décrit et caractérise les actes de médiation (Vergnaud, 2007, p. 11). Le médiateur peut et doit travailler sur ces quatre composantes, selon la situation.

Ainsi, pour parler de médiateur, il faut parler de choix de la situation. L’acte de médiation prend en compte la situation, les invariants opératoires, les schèmes et les inférences, les buts et l’anticipation et les règles d’action.

C’est à partir de cette idée que nous affirmons qu’un support didactique numérique peut être considéré comme un médiateur. Pour cela, il doit être capable d’offrir quelques stimuli pour que l’apprenant puisse élaborer à partir de l’expérience, en construisant des nouvelles connaissances et des nouveaux concepts. Dans notre étude, le contenu à être considéré est la statistique.