2.2 Les TIC dans l’Education

Dans le domaine de l’éducation, les termes « logiciel éducatif » ou « didacticiel » (contraction de « didactique » et « logiciel ») abordent l’adaptation des outils numériques à l’enseignement-apprentissage.

L’insertion des technologies de l’information et de la communication dans l’éducation (TICE) exige une certaine adaptation de l’outil, de ceux qui travaillent avec l’éducation et du système éducatif lui-même. Il existe toujours une discussion sur les aspects enrichissant et les aspects troublants de ces outils. Ces questions influencent directement le processus d’enseignement-apprentissage, ce qui exige, encore une fois, une évaluation de ses effets.

Comme nous l’avons vu, les technologies de l’information et de la communication incitent à une évaluation ergonomique des caractéristiques de l’interface (inspection ergonomique, cognitive et de la conformité aux recommandations) et une évaluation sur l’activité de l’utilisateur (tests d’utilisation, questionnaires/entretiens). L’utilisation de ces outils dans l’éducation implique aussi une évaluation de leurs aspects pédagogique et d’apprentissage.

Ainsi, pour une évaluation et surtout, une bonne utilisation des TICE, nous devons considérer l’aspect qui consiste à apprendre le système (comment l’outil fonctionne) et apprendre ce qui est médiatisé par le système (le contenu). S’il y existe une interaction entre les propriétés d’utilisabilité de l’outil (son ergonomie) et les propriétés d’apprentissage, nous pouvons attendre un succès dans le processus d’apprentissage.

L’ergonomie logicielle se focalise sur l’utilité et l’utilisabilité des interfaces homme-machine. L’utilisabilité concerne la facilité, l’efficacité et l’intuitivité de l’utilisation de l’outil et la satisfaction de l’utilisateur. La norme ISO 9241 définit l’utilisabilité comme « le degré selon lequel un produit peut être utilisé, par des utilisateurs identifiés, pour atteindre des buts définis avec efficacité, efficience et satisfaction, dans un contexte d’utilisation spécifié ». Ainsi, nous pouvons constater que l’utilisabilité peut varier selon la population des utilisateurs et le contexte d’utilisation de l’outil. D'un autre côté, l’utilité d’une interface logicielle dépend des fonctionnalités que le système offre et cette évaluation se focalise sur l’utilisateur, ce qu’il considère pertinent dans les informations, selon ses objectifs.

Nous avons vu au sous-chapitre précédent, sur l’ergonomie, les caractéristiques de l’interface que Bastien et Scapin (1997) préconisent. La démarche sur une étude, telle que celle des caractéristiques de l’interface n’implique pas la participation directe de l’utilisateur. Elle peut se concrétiser à partir de modèles théoriques et/ou formels (conseils et méthodes de production de systèmes interactifs) ; d’expertise (un expert fait référence aux normes ou recommandations qui existent sur un système interactif) ; analyse de la conformité du système à un ensemble de recommandations (à partir de guides et recommandations ergonomiques, ex. SCAPIN, 1986) ; l’analyse de la conformité du système à des dimensions ergonomiques (normes, principes, dimensions ou heuristiques selon les travaux de plusieurs domaines comme les sciences cognitives et l’ergonomie) et les méthodes d’inspection (inspection cognitive – identifier les choix conceptuels pour l’apprentissage de l’utilisation du système par exploration des utilisateurs. Ici l’utilisateur participe mais c’est l’observateur/chercheur qui fait les analyses).

Bastien et Scapin (2001) ont aussi fait une description des démarches de l’activité de l’utilisateur :

La démarche sur l’activité de l’utilisateur consiste à observer les interactions entre l’utilisateur et l’outil. Pour cela, nous avons comme ressource les tests d’utilisation (performances et comportements des utilisateurs lors de l’interaction) ; questionnaires et entretiens (données déclaratives, donc subjectives, sur l’attitude, l’opinion ou le degré de satisfaction de l’utilisateur sur l’outil) ; et les outils logiciels (enregistrement vidéo ou d’autres formats, des traces du comportement de l’utilisateur pensant la navigation).

D’autres aspects de l’ergonomie des supports numériques sont très importants lorsqu'ils sont appliqués dans l’éducation :

Cybis et Heemann (1996) présente les modèles cognitifs utilisés dans un travail avec les TICE ou sur l’Internet. Ces modèles sont considérés pendant la construction et l’évaluation des logiciels éducatifs :

  1. Ecriture et lecture : les informations sont liées par des nœuds, ce qui a une corrélation avec les modèles mentaux. La pensée n’est pas linéaire et obéit au modèle du réseau sémantique ;
  2. Stockage : la mémoire de travail comporte de 5 à 7 éléments. Le respect de cette caractéristique facilite la prise de décision pendant la réalisation d’une tâche ;
  3. Récupération : l’organisation des items et le contexte dans lequel ils sont stockés ont une grande importance pour l’efficience de la récupération de l’information ;
  4. Métacognition : la conscience de ses propres processus cognitifs favorise le contrôle et la régulation de l’activité cognitive. Les outils numériques peuvent offrir des stratégies métacognitives pour favoriser la réalisation de la tâche et de la navigation ;
  5. Prise de décision : le choix du prochain nœud à examiner par similarité, prototypes, connaissances, importances et pertinence, favorise l’exécution de la tâche et de la navigation.

La lecture sur l’écran est aussi un aspect important pour la construction et l’utilisation des TICE. Ce type de lecture est réalisé plutôt de façon sélectionnée, dans une lecture de surface ou en diagonale. L’espace de lecture et le défilement vertical ne facilitent pas la compréhension. La vélocité de lecture sur l’écran est 25% plus faible que sur support papier.

La navigation en espace multidimensionnel (multifenêtrage), bien qu'elle soit chaque jour davantage banalisée grâce à l'utilisation d’Internet, n’est pas toujours facilitatrice de compréhension, laissant l’utilisateur parfois ‘perdu’ pendant la navigation. Pour cela, des aspects ergonomiques jouent un rôle important, comme plusieurs de ceux listés au sous-chapitre sur l’ergonomie (II.1), tels que la convention de quelques aspects comme l’affichage des informations de gauche à droite et de haut en bas (pour l’occident), le placement des informations plus importantes au coin supérieur gauche (Mullet et Sano, 1995), les icônes, figures, polices et les couleurs regroupées selon la hiérarchie des informations (Marcus, 1992).

Nous n’allons pas approfondir l’analyse de chacun de ces aspects. Mais nous pouvons citer comme exemple l’aspect des couleurs qui peuvent influencer l’état émotionnel de l’individu (d’après plusieurs études en psychologie (Schiffman, 2005), ainsi que la perception, la productivité et la qualité d’un travail. Dans notre culture occidentale nous trouvons les associations suivantes sur les couleurs :

Figure 1: Signification culturelle des couleurs
Figure 1: Signification culturelle des couleurs

Il existe également les dérivées des couleurs, la quantité de couleur sur l’interface (2 au minimum et 6 au maximum), le contraste entre l’écran et les lettres, les nuances des couleurs et des textures pour l’organisation hiérarchique des informations, etc.

Tous ces aspects doivent être pris en compte pendant la construction, le choix des matériaux, de l’environnement et de l’organisation du travail réalisé pendant l’utilisation des technologies de l’information et de la communication dans l’éducation.