2.5 Formation à Distance 

2.5.1 Un Bref Historique

Notre objectif ici est de présenter quelques étapes du processus d’évolution historique, et alors contextuel, de la formation à distance.

Considérons le parcours depuis l’apparition des cours en présence de l’époque platonicienne, où la mémoire était le focus d’attention, jusqu’à nos jours, nous pourrions mesurer combien d’innovations ont été introduites, mais aussi combien de pratiques pédagogiques se sont pérennisées, pour certaines malgré leurs obsolescence. Depuis les premières universités jusqu’à l’enseignement à distance, par correspondance puis l’usage de l’ordinateur et de l’Internet, un long chemin a été parcouru rempli de points de continuités et de points de rupture.

Charlier et Peraya (2003) font une très intéressante exposition de l’évolution de l’éducation à distance. Celle-ci a surgi en Angleterre au siècle XIX avec les cours par correspondance. Cela est marqué par la création du timbre-poste, du service postal fiable et régulier et d’une bonne relation prix/qualité du papier.

Avec l’évolution des supports de stockage, des techniques de diffusion et des supports de restitution au milieu du 19ème siècle, suivi par la numérisation de l’information, et de son stockage, la télématique et les réseaux, la diffusion de l’information se transforme mais finalement elle va dans le même sens que la poste et le livre d’autrefois.

Nipper (1989, apud Charlier et Peraya, 2003) distingue trois phases dans l’évolution de la formation à distance :

1) L’époque de l’imprimé,

2) Dans les années 60, avec les multimédias (les imprimé, la radio, la télé, la vidéo)

3) Dans les années 80, avec la micro-informatique et la télématique (hypermédia/multimédia, multi-utilisation).

De leur coté, Taylor et Swannel (1997) divisent cette troisième phase en deux :

3) Les télé-learning et télé-enseignement, avec les technologies de téléprésence (audio, video-conférence) ;

4) Flexible Learny Model, avec les multimédia interactifs, la communication médiatisée par l’ordinateur (CMO) et cours par ressources d’Internet.

Le tableau suivant montre clairement les étapes médiatiques de la formation à distance et leur modèle pédagogique respectif  (Charlier et Peraya, 2003, p. 81) :

  Rôle des Médias Concept de FAD Scénario Pédagogique
Imprimé
(milieu du XIXème siècle)
Auxiliaire Support substitutif Vaincre la distance géographique.
Enseignement de substitution
Expositif, primat du discours verbal éventuellement illustré.
Multi-média
(1960)
Convergence et complémentarité.
Spécificité et efficacité propre de chaque média.
Concept de médiatisation.
Evolution du concept de distance.
Vaincre les distances socio-economiques autant que spatio-temporelles.
Enseignement de deuxième chance
Modalité d’enseignement spécifique, andragogie.
Complémentarité des ‘ressources audio-visuelles’.
Modalités sensorielles, systèmes sémio-cognitifs, modes de traitement distincts.
Focalisation progressive sur l’apprentissage et l’apprenant.
Telématique CMO
(1980)
Dispositif de communication et de formation.
Quatre formes de médiation : technologiques, corporelles, semiocognitives et relationnelles.
Formation à distance ouverte et flexible.
Système mixte, hybride.
Environnement intégré ou travail.
Télépresence.
Campus virtuel.
Activités d’apprentissage et ressouces.

Une des principales difficultés dans la diffusion de l’enseignement à distance, dans tout les moments historiques, est le temps de réponse entre l’apprenant et l’enseignement/tuteur. Cela peut être classé comme une des causes de l’abandon pendant la formation.

Le processus d’insertion des TIC dans l’éducation a passé au premier moment par l’utilisation des médias dans la forme classique de l’éducation. Ensuite il y a eu l’introduction de l’informatique et des logiciels éducatifs. Cela a un rapport direct avec l’auto-formation dans la mesure où les enseignants les utilisaient pendant une activité individuelle ou en petit groupe d’élèves. Après nous avons eu l’expansion de la Net et du Web, suivie par la micro-informatique et la télématique. La recherche via Web et les publications électroniques ont donné suite aux sites d’écoles et aux travaux en réseaux et ensuite à la création des campus virtuels.

Charlier et Peraya (2003) définissent un campus virtuel comme

‘« Plate-forme unique, intégrative, multidimensionnelle et multifonctionnelle mettant à disposition des outils spécifiques susceptibles de réaliser les objectifs de base du projet de formation » Charlier et Peraya (2003, p. 84).’

Créer un campus virtuel est mettre à disposition/ intégrer les outils (sites éducatifs, ressources pédagogiques, messagerie, forum, etc) dans une plate-forme, dispositif médiatique unique.

‘« Un espace de travail virtuel, intégrant de multiples outils et géré dynamiquement, organisé conceptuellement et structurellement à partir de la métaphore du campus constitue un campus virtuel » (Charlier et Peraya, 2003, p. 90). ’

Nous ne pouvons pas parler de formation ouverte et à distance sans parler du processus de globalisation. Ce processus s’est déclenché après la deuxième guerre mondiale dans un contexte qui exige une nouvelle lecture du monde, du temps et de l’espace.

L’ordinateur développe de nouvelles capacités cognitives, on peut dire qu’il développe les capacités spatio-temporelles, tout comme les capacités procédurales.

Nous avons vu dans la partie précédente quelques aspects ergonomiques à laquelle la construction d’un support didactique virtuel doit faire attention, comme par exemple, les capacités humaines de sensation, perception, attention, mémoire, enfin, l’interface doit être « amicale » (Luchesi, 1998).

Pour récapituler quelques aspects humains importants pour l’utilisation des TICE, nous pouvons les citer en trois niveaux :

  1. Niveau fondamental : perception visuel, psychologie cognitive de la lecture, mémoire humaine, raisonnement inductif et déductif ;
  2. Deuxième niveau : comprendre l’utilisateur et son comportement ;
  3. Troisième niveau : comprendre les tâches que le système réalise et celles qui sont exigées du utilisateur comme partie de l’interaction homme-machine.

Concernant le premier niveau, au-delà de la capacité de mémoire (3 à 7 éléments), les études montrent que le niveau de rétention d’information varie selon la forme de sa présentation à l’être humain :

Tableau 3: Capacité de rétention 
Forme de Présentation Capacité de Rétention
Lecture 10%
Narration 20%
Vidéo sans audio 30%
Vidéo avec audio 70%
Débat 70%
Débat et pratique 90%

Il est important de citer aussi l’aspect économique de la fonction psychologique que Stemberg (2000) développe, en tant que processus évolutif et naturel qui donne au procès cognitif une fonction plus légère et économique, avec l’utilisation de structures ou outils cognitifs qui fonctionnent comme des schèmes dans une situation.

Concernant le deuxième niveau, l’habilité et la personnalité sont très importantes pour la construction d’une interface amicale. La connaissance du domaine et du contexte dont il est présenté le contenu, favorise beaucoup l’utilisation de l’interface. Une interface homme-machine idéale serait celle qui s’adapterait aux différences de personnalité des utilisateurs. Convenons que la création d’une telle interface est si complexe que les données empiriques ne permettent pas sa concrétisation. Néanmoins, nous avons déjà connaissance de la préférence pour quelques types d’interface plus que pour d’autres.

Ces aspects des TICE dans une formation à distance mettent en évidence l’importance de l’interaction entre outil et utilisateur. Linard et Zuleger (1995) citent l’orientation (représentation global du contenu), l’initiation (le fonctionnement de l’activité) et la réflexion (la réalisation active pour le contrôle des activités et la construction des connaissances).