La reconquête

Jacques Bethemont et Jean Pelletier soulignent la difficulté de dater de façon précise : « le moment où est apparue cette nouvelle sensibilité qui a suscité un mouvement de réappropriation des espaces fluviaux »130. Mais il semble, à la lecture de différents travaux, que le mouvement ait été amorcé à partir des années 1950 dans les grandes villes nord-américaines et qu’il se poursuive actuellement.

Un « véritable retournement de valeurs »131 s’opère à Tokyo dans les années 1970 avec la lutte contre la pollution et l’amélioration écologique des cours d’eau, bientôt suivies dans la décennie 1980 par la considération des bords de l’eau sous un angle « esthétique et symbolique »132. Cette prise de conscience apparaît entre 1975 et 1977 dans la région francilienne et « conduit à définir en 1978 un Schéma Directeur des Berges de la Seine »133. Pour Claire Gérardot, c’est la mise en place en 1981 de la « commission « Lyon ville fluviale » [qui] marque le point de départ (…) de la « reconquête » du Rhône et de la Saône » 134. En effet, « les années 1980 marquent le début d’une prise de conscience de la nécessité de retrouver les cours d’eau en ville et de se les réapproprier. L’anathème est jeté sur le fonctionnalisme »135.

Concrètement, cette réappropriation consiste en des « opérations d’urbanisme visant à réutiliser les rives »136. Il s’agit de privilégier les fonctions de services, de loisirs et la convivialité dont le fleuve peut être le support et cela, dans une société qui valorise désormais l’écologie, l’environnement et la qualité de vie. La « réhabilitation » des fleuves passe par différents processus :

Ces réaménagements participent au façonnement d’une nouvelle image de marque des villes fluviales. Cette reconquête peut même être interprétée, selon Laurence Cottet-Dumoulin (2004), comme le signe d’une mutation urbaine : le passage de la ville moderne à la ville postmoderne. La qualité de « l’image de marque » qui peut découler de telles mises en valeur représente un enjeu régional, national, voire européen. Les rives aménagées constituent à la fois une vitrine de la ville et un élément privilégié du paysage urbain.

Notes
130.

1990, pp.303-304.

131.

Berque A., 1990, p.257.

132.

Berque A., 1990, p.257.

133.

Guillerme A., Hubert G., Tsuchya M., 1992, p.15.

134.

Gérardot C., 2004..

135.

Joubert-Milot F., 1998, p.5.

136.

Pelletier J., 1990, p.238.

137.

Pelletier J., 1990, p.238.