Arles et Vienne ont un poids démographique équivalent, de l’ordre de 53 000 habitants (Tableau 3). Elles partagent aussi un important passé romain240. En 46 avant J.C., Arles devient colonie romaine puis, au Ier siècle après J.C., un des plus grands centres commerciaux de l’Empire Romain, fondé sur le transbordement entre navires de mer et bateaux de rivière, et marqué par la présence de grands entrepôts. Sont chargés sur les navires à destination de Rome, des huiles et des blés gaulois, des vins, des salaisons, des bois flottés du Dauphiné tandis que marbre, soufre, épices et poteries sont réceptionnés. Vienne, cité allobroge conquise au cours du Ier siècle après J.C., devient, elle aussi, une grande cité commerçante accueillant de vastes entrepôts le long du Rhône. Elle exporte ses vins, ses étoffes, sa plomberie et sa céramique. Elle importe des pierres à bâtir, de l’huile et du plomb. Les vestiges de ce passé romain sont une ressource pour le tourisme : Arles a conservé ses arènes et un amphithéâtre, Vienne, le temple d’Auguste et Livie, son théâtre antique et, à Saint-Romain-en-Gal, une partie du quartier romain de rive droite où a été construit un musée.
Au-delà de ces traits communs, les deux villes se différencient nettement. Arles doit son originalité à sa superficie de 72 000 hectares qui en fait le plus grand territoire communal français. Elle s’étend des Alpilles au Nord, en passant par la Crau à l’Est ; au Sud, elle inclut la Camargue jusqu’à la mer241. Elle se compose d’une agglomération centrale et de 11 noyaux villageois comme Salin-de-Giraud, Gîmeaux ou encore Raphèle. Elle est le centre agricole de la Camargue avec 6,2 % de ses actifs travaillant dans le secteur primaire (deux points de plus que la moyenne française, Tableau 4). Son profil est nettement tertiaire (77,5 % de ses actifs) grâce aux services agricoles et au tourisme. A l’inverse d’Arles, Vienne est la ville regroupant le moins d’actifs agricoles de toutes les villes étudiées (1,5 % de sa population active, tableau 4). Comme Valence, elle est un centre de petites industries diversifiées. Occupant 21,2 % de sa population active (trois points de plus que la moyenne française), le secteur industriel se fonde sur le textile, héritage de la draperie traditionnelle dont les usines étaient installées au bord de la Gère242. Cet affluent du Rhône a longtemps animé moulins, foulons et tanneries. Sont présents aujourd’hui, en plus de ces industries textiles et de travail du cuir, des établissements chimiques et de construction mécanique.
Autre différence de taille : le dynamisme démographique. Si l’aire urbaine de Vienne connaît un accroissement démographique (12,2 % de gain entre 1982 et 1999, Tableau 3), celle d’Arles est en crise. La population de son aire urbaine s’est accrue seulement de 0,97 % entre 1982 et 1999 et surtout, elle a décliné de 2,30 % entre 1990 et 1999. Le dynamisme viennois peut s’expliquer en partie par la présence de l’agglomération lyonnaise. Cette dernière se trouve à 33 km et son aire d’influence croît, intégrant peu à peu Vienne dans sa grande banlieue. La crise démographique arlésienne s’explique, quant à elle, par la conjonction de deux facteurs :
Arles perd donc des habitants, fait remarquable au sein d’un département qui dans la même période fait preuve d’un dynamisme démographique puisque son taux de variation annuelle en 1900 et 1999 est de 0,47 % (et son solde migratoire de 0,15 %). Cela témoigne d’une situation exceptionnelle marquée par un fort déclin et une certaine répulsivité urbaine.
Il faut noter que Vienne et Arles ne sont pas les seules villes romaines de l’espace étudié. Avignon et Valence le sont aussi mais leur statut et leur dimension lors de la période romaine ont été moins importants et les vestiges sont actuellement moins visibles.
Voir Allard P., 1992.
Pour l’histoire de la ville de Vienne, se référer aux travaux d’A. Pelletier (1980) et M. Mermet (1992).