1855-1878 : les débuts difficiles de la régularisation du Rhône

« C’est à partir de 1860 seulement que les travaux ont été entrepris d’une manière régulière sur le Rhône en vue de l’amélioration du chenal navigable »355. Dans un premier temps (1855-1878), le resserrement du chenal navigable est recherché par la construction de digues submersibles. Cette technique « consiste à concentrer les eaux du lit moyen du fleuve dans un chenal unique par deux méthodes a) le barrage des bras secondaires b) l’endiguement submersible des rives (…). Le principe général qui commande ces aménagements est de « calibrer » la rivière en lui imposant un « profil normal » qui se réaliserait en théorie dans un canal de pente régulière et de profondeur constante, et de chercher à provoquer cette régularité et cette constance »356.

Différents programmes sont conçus par le service spécial du Rhône pour mettre en place ces aménagements. Fondé sur un système de digues longitudinales submersibles, le premier programme général des travaux à réaliser pour l’amélioration du Rhône est présenté en 1860 avec un coût estimé à 36 000 000 Francs. D’autres programmes suivent, notamment en 1865, mais tous connaissent le même sort : une réalisation incomplète faute de financement suffisant.

Le résultat est qu’en 1875, le fleuve ne possède pas encore sur tout son cours un lit fixe et régulier. Le tonnage transporté sur le fleuve continue à décliner : il est réduit à 173 000 tonnes en 1880 (contre 370 000 en 1840). Qui plus est, les endiguements réalisés ont tendance à provoquer le déplacement des hauts-fonds plus qu’à les faire réellement disparaître. Ils en accentuent même un certain nombre par le développement de profondes mouilles fixées le long des digues submersibles. Par la suite, il s’agira de réfléchir à des modalités d’amélioration plus efficaces. Alors même qu’il est apparu impératif d’améliorer la navigabilité du fleuve dans le contexte de l’apparition de la concurrence du chemin de fer, l’essentiel des travaux se fait attendre faute de financement, et ceux qui sont réalisés sont peu efficaces. Encore une fois, le discours politique est en décalage avec les réalisations, et ce au détriment de l’économie rhodanienne. Ce déclin rejaillit sur les espaces portuaires urbains, sur les basses villes, la navigation perdant le dynamisme qui la caractérisait dans la première moitié du XIXème siècle.

Notes
355.

Ingénieur Jacquet, Service spécial du Rhône, Archives départementales du Rhône, série S 3243.

356.

Poinsart D., Salvador G., 1993, pp. 301 et 303.