2.3.1. Le Rhône et Le Domaine Public Fluvial

Le Domaine Public Fluvial

Une portion de chaque espace fluvio-urbain rhodanien appartient au D.P.F. Il relève donc pour partie d’un cadre juridique spécifique. Quels sont les impacts de ce statut sur la production de ces espaces?

Le domaine public est l’ensemble des biens appartenant à l’Etat, à des collectivités locales et à des établissements publics et affectés à une utilité publique. Le régime du domaine public se caractérise par l’imprescriptibilité - impossibilité pour les tiers d’acquérir un droit sur ces biens par voie de prescription, c’est-à-dire par une possession prolongée - et par l’inaliénabilité – impossibilité de recourir à l’encontre des personnes publiques aux voies d’exécution du droit privé -. Le domaine public fluvial est défini à l'article premier du code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure. Il appartient à l'Etat par détermination de la loi du 16 décembre 1964, et est à la disposition du public. Il comprend six éléments :

  • les cours d'eau navigables et/ou flottables,
  • les lacs navigables et/ou flottables,
  • les cours d'eau navigables et/ou flottables rayés de la nomenclature mais maintenus,
  • les cours d'eau et lacs classés,
  • les berges recouvertes par les eaux,
  • les eaux des départements d'outre-mer.

Concernant plus spécifiquement les cours d'eau navigables et/ou flottables, il faut retenir les faits suivants. Avant 1910 faisaient partie du domaine public fluvial les cours d'eau effectivement aptes à la navigation et/ou au flottage par train de radeaux dans tout leur cours à partir du point où ils commencent à être navigables et/ou flottables jusqu'à leur embouchure. La loi de finances du 8 avril 1910 a substitué un élément formel à l'élément fonctionnel, à savoir le classement par un texte législatif ou réglementaire. En conséquence, depuis 1910, appartiennent au domaine public fluvial les cours d'eau figurant sur une nomenclature prévue par une ordonnance du 10 juillet 1835 et les cours d'eau entrés dans le domaine public à la suite de travaux déclarés d'utilité publique ou à la suite d'actes de rachat.

La définition spatiale du D.P.F. dans le cadre de cours d’eau navigables comme le Rhône est théoriquement assez précise. Sont assimilés aux cours d’eau navigables et/ou flottables les bras de ces cours d’eau, même non navigables et non flottables, ainsi que les noues (prairies périodiquement inondées) et les boires (réserves pour les animaux), qui tirent leurs eaux de ces mêmes cours d’eau. Les terrains recouverts par les eaux des cours d’eau domaniaux coulant à pleins bords avant de déborder, en l’absence de perturbations météorologiques exceptionnelles, appartiennent au domaine public fluvial en vertu du principe dit du « plenissimum flumen ». Cela signifie que le chenal, les bras du Rhône ainsi que les berges relèvent du Domaine Public. Ainsi les fenêtres fluviales se développent-elles dans cet espace public.

Les espaces fluvio-urbains comportent aussi des éléments du Domaine public fluvial artificiel. Ce dernier comprend :

  • les rivières canalisées, les canaux de navigation, les réservoirs d’alimentation, les contre-fossés et dépendances (soit 17 500 km pour 258 000 km de voies fluviales totales) ;
  • les ports publics situés sur les voies fluviales et leurs dépendances ;
  • les ouvrages publics construits dans le lit ou sur les bords des voies fluviales, pour la sûreté et la facilité de la navigation et/ou du halage (digues, balises, remblais...) ;
  • les dérivations ou prises d’eau artificielles, même établies dans des propriétés privées, à condition qu’elles aient été pratiquées par l’Etat dans l’intérêt de la navigation et/ou du flottage ;
  • les retenues établies sur les cours d’eau du domaine public, à condition que les terrains submergés aient été acquis par l’Etat ou par des concessionnaires, à charge de retour à l’Etat en fin de concession.

Selon sa classification, le D.P.F. est géré par différents types d’acteurs. Le D.P.F. inscrit à la nomenclature des voies navigables est géré par le Ministère de l'Équipement représenté à l'échelle locale par le Service de la Navigation et la Direction Départementale de l'Équipement (D.D.E.). Depuis la loi n°83-8 du 7 janvier 1983, la gestion des voies navigables relève de la compétence des régions ainsi que celle des ports (domaine public artificiel fluvial). La décentralisation a donc concerné la gestion du domaine public fluvial, devenu pour partie une nouvelle compétence régionale. Le domaine public fluvial non navigable, n'appartenant pas à cette nomenclature, est quant à lui géré par le Ministère chargé de l'environnement.