Comme on a pu le voir dans le cas d’Avignon et Arles en 1856, durant la première moitié du XIXème siècle les villes possèdent des ouvrages de protection ponctuels qui ne forment pas un système cohérent et réfléchi. Cela peut paraître paradoxal étant donné que l’on sait aujourd'hui que le Petit Age Glaciaire, qui s’achève au milieu du XIXème siècle, est une période marquée par de fortes crues579. Seule Avignon possède une protection plus élaborée : elle a conservé ses remparts dans leur intégralité afin d’assurer une défense contre les incursions récurrentes du Rhône. D’une manière générale, l’endiguement rhodanien est peu développé à cette date, il a été décrit dans le chapitre précédent. Il convient cependant de distinguer les villes du Bas-Rhône (Tarascon, Beaucaire et Arles) qui bénéficient d’un endiguement plus important et plus ancien que les villes de l’amont. Nous avons vu précédemment que les riverains, regroupés dans des associations syndicales, ont érigé des levées de terre le plus souvent fondées sur les bourrelets alluviaux naturellement construits par le Rhône. Ces digues, qui forment un système presque continu de 300 km580, protègent avant tout les terres agricoles mais parfois aussi une partie des espaces urbains. C’est notamment le cas de la chaussée de la Montagnette, qui protège Tarascon des incursions du Rhône par le Nord, de la chaussée du Trébon, qui protège le nord d’Arles, ou encore de la Digue à la Mer, qui protège la plaine sud de Beaucaire. Entre Lyon et Beaucaire, l’endiguement est beaucoup moins important581 et vise avant tout lui aussi la protection de terres agricoles582 et non d’espaces urbains.
Dans cette optique, il n’a jamais été réalisé de plan ou de programme de protection des villes contre les inondations dans les villes à l’aval de Lyon et cela pour plusieurs raisons. D’une part, durant l’Ancien Régime et au début du XIXème siècle, la défense des terres agricoles est bien plus développée que celle des villes. Ces dernières ne sont pas encore les centres économiques qu’elles deviendront grâce à la révolution industrielle. D’autre part, la conception fataliste de l’inondation propre à la société de l'Ancien Régime ne suscite pas non plus la construction systématique d’ouvrages de défense. Au XVIIIème siècle, l’inondation est perçue comme une fatalité583 quasiment inévitable comme il a été démontré dans l’étude de la crue de 1856. En conséquence, la réponse apportée à ces catastrophes relève plutôt du domaine spirituel et des pratiques religieuses que de la technique et la protection adopte un caractère limité. Surtout, se pose le problème du coût de la protection, difficile à assumer par une collectivité locale et que l’Etat ne prend pas à sa charge.
Pichard G. (1996), et Arnaud-Fassetta G. (2003).
Selon Bethemont J. (1972).
Rappelons qu’il occupe seulement 103 km linéaire sur 600 km de rives selon Bethemont J. (1972).
Ces digues sont essentiellement édifiées par des communautés rurales.
Selon Allard P., Pailhès S. (1999).